Il eut un frisson ; ses nerfs étaient très affaiblis. Au bout d’un moment, la porte s’entrebâilla, et par l’étroite ouverture, Adolphe, le fils du chimiste ayant inventé la beuze, examina l’arrivant avec une évidente défiance, heureusement Scotch portait à ce moment là des lunettes aux verres épais dissimulant ses yeux et il s’était déguisé en janséniste radical ; et bien que les petits yeux méfiants d’Adolphe apparaissaient seuls comme des points lumineux dans l’obscurité, le monde qu’il avait aperçu sur le carré le rassura et ouvrit la porte toute grande. Le jeune homme entra dans une sombre antichambre coupée en deux par une cloison, derrière laquelle se trouvait une petite cuisine où les vaisselles sacrées volées par la Gestapo et les SS avaient une bonne place.
Debout devant lui, Adolphe se taisait et l’interrogeait du regard. Auparavant Scotch avait fait avec une application, un traqueur de nazi, un copier-coller de la jaquette du livre d’Hitler, Mein Kampf, et sans dénaturer son propos, il se présenta comme un journaliste d’extrême-droite et le fasciste se radoucit et lui proposa même à boire, ce qui permit à Scotch de lui verser un sédatif puissant dans son verre sans qu’il s’en rende compte.
Il était à présent dans sa caisse avec Adolphe dans le coffre et la tronçonneuse sur le siège passager et il se souvenait du jour où ils avaient ouvert avec Alphonse le coffre contenant la beuze et il se rappelait que dans ce bunker, après avoir découvert la substance hallucinogène, ils avaient mis les voiles en remplissant avant le cercueil du corbillard de cette herbe trafiquée dans les laboratoires allemands et avaient rallié Paris et avec la vente de la drogue s’étaient offert des pompes crocos et des colliers en or et en lapis-lazulis à supplanter en valeur les objets les plus précieux des SS, les pierres et les couronnes d’or pur des nazis, tout ça pour frimer dans la mégalopole en écumant les palaces.
Et parfois, aux heures où ils ne vendaient pas leur came, ils s’accordaient un petit joint qui les expédiait à des latitudes dont les coordonnées géographiques étaient connues de la seule intelligence végétale, cette marijuana foudroyante.
Et pendant qu’il se remémorait ses visions partant en vrille complétement, l’autoradio, après une mélodie lascive, annonça le début d’une nouvelle guerre du Kippour, un journaliste l’informa que les soldats américains étaient en mesure d’abréger le conflit et parmi l’un d’eux, un G.I avait découvert un stock d’Hélicéenne, un stupéfiant beaucoup plus puissant que la beuze d’après ce que Scotch comprit de son discours, et l’avait ramené dans ses bagages en désertant, peut-être en se cachant actuellement dans les squats des dreadlocks de la Jamaïque ou des baies cubaines.
Et en longeant le littoral pour rejoindre Alphonse, en ce dimanche après-midi de printemps, il se disait que le déserteur n’était peut-être pas bien loin au large de l’océan et que le seul moyen de vérifier les pouvoirs étonnants et fulgurants de l’Hélicéenne serait d’organiser une rencontre agrémentée largement de khat avec l’ancien lieutenant ; il était toujours à la recherche d’un hallucinogène capable de transgresser les lois physiques et spatio-temporelles affectant les humains sobres comme des bêtes.
Deuxième chapitre : L'Hélicéenne.
Scotch se méfiait des hologrammes tout comme des agitateurs rouges que James Joyce, s’il avait vécu à notre époque, aurait échaudé en les décrivant comme ayant la comprenette dure ; et sur le chemin qui le menait à Eugène Lami, le déserteur, le remue-ménage dans la rue que les émeutiers avaient engendrée, le désolait. Ce brouhaha carnavalesque aussi qui, s’il avait prêté une oreille attentive, l’aurait instruit sur le rejet d’une robotisation venant d’une corporation invisible et pour l’instant inconnue…
Scotch regarda autour de lui, renifla, s’approcha d’un camion-citerne qui avait un treuil. Aperçut un peu de fumée, ça venait du moteur, il s’approcha : l’engin, il y avait à peine quelques minutes, se trouvait dans un square et les révolutionnaires zélés l’avaient déplacé jusqu’ici pour défoncer les vitrines des grands magasins ; les franchises internationales, les multinationales avaient été particulièrement visées dans cette jacquerie.
Le hasard tombant bien, il se retrouva dans une rue qui jouxtait l’immeuble d’Eugène Lami, il s’engouffra sous un porche pour arriver jusqu’à la porte ; là une lanterne brillait faiblement et conférait à son visage des aplats de masque mortuaire, comme en résonnance avec ce hall d’entrée lugubre où il s’introduisit, plongé dans les ténèbres… en vérité, il n’eut pas à tambouriner à sa porte car elle était déjà grande ouverte, ce qui le dispensa de se présenter. Il était seul dans l’appartement et arrivé au salon, il découvrit dans une kyrielle de godets la drogue qu’il recherchait tant, l’Hélicéenne, que Lami avait sans doute consommé et abusé avant de partir précipitamment, ou pire avant de disparaître.
Il jeta un coup d’œil dehors par la fenêtre. En bas une milice patrouillait, tentant de rétablir l’ordre et de pacifier la zone. Il abandonna rapidement les lieux, non sans avoir récupéré la substance hallucinogène, cette Hélicéenne qui allait conquérir aussi bien les élites que les classes laborieuses…
Troisième chapitre : L'empire Contre-Attaque
Tout avait commencé ainsi en réalité : j’avais sorti le carton où j’avais recopié le nom de Scotch et sur l’écran de l’ordinateur, un pigeon ignoble, aux plumes plâtrées de boue et aux yeux maniaques, me lançait ses imprécations, tout comme l’image suivante d’une femme agenouillée se dédoublant jusqu’à s’obscurcir puis redevenir une icône achromatique.
Je me disais que je venais juste de commencer un jeu, qui en fait n’en était pas un et j’étais assis en plein cœur de la cité, sur un banc avec un type sombre, mon coéquipier restant imperturbable face à cette tentative d’hacking.
On avait fait la bringue jusqu’à une heure du matin et lorsqu’on avait vu apparaître au milieu d’une marée humaine les belligérants qui avaient tabassé Scotch à mort, on avait vite détalé non sans avoir rangé pêle-mêle l’Hélicéenne dans le carton…
Puis un trolleybus nous avait foncé droit dessus pendant qu’on courait et ensuite on avait bifurqué sous un abri de bus dont la publicité vantait des fourrures à collerettes de lapin… puis là, un vagabond avait partagé son vin frelaté avec nous deux et en conceptualisant pas mal les luttes des militants écologistes, féministes et LGBTI.
À chaque gorgée, j’avais l’impression que de nouvelles tentatives d’attentats dans la campagne du président sortant, tout comme celles d’une dirigeante d’extrême droite allaient nous faire revivre un Quatrième Reich. Et les autres partis s’entredéchirant et se divisant, les néo-nazis allaient gagner la guerre, et tout cela démocratiquement comme Hitler en 1933, et ce sans repêchage. Le fils du chimiste ayant inventé la beuze, le macchabée dans la voiture d’Alphonse, devait jouir même mort, mais en quelques mois j’avais trouvé un local où mes potes, des guitaristes d’un label grunge, travaillaient nuit et jours pour démystifier les discours et la trouille xénophobe des concitoyens en mesure de voter pour la haine ; ils ne s’arrêtaient jamais ou seulement pour trouver des kamikazes et d’autres fêlés payés grassement grâce à l’argent de la drogue, et on leur présentait un contrat leur garantissant qu’on payerait généreusement la caution pour leur éviter la prison, et on leur communiquait les informations nécessaires afin qu’ils puissent faire péter des bombes lors des rassemblements autour de la vice-présidente combattant le fascisme.
Mission qui était prévue pour ne faire aucune victime sinon à part eux-mêmes, ce qui était préférable pour nous car nous n’avions alors qu’à dédommager leurs familles.
Ainsi les tentatives d'assassinat présumées la visant firent remonter en haut des sondages la candidate. Certains futurs SS potentiels avaient même reconnu l’effet inverse qu’ils cherchaient à travers des tweets du type : « À cause de ces skinheads, les balles sifflent et cela ne va faire qu'empirer et donc inférer sur le résultat de l’élection »
Puis la date où l’on élisait un monarque républicain, approcha jusqu’à arriver et ce soir-là le verdict tomba et je me souviens qu’on avait l’impression d’être dans un rêve, je me souviens aussi qu’après avoir suivi la nuit ces vieux rails qui semblaient couverts de neige, il n’y avait vraiment plus rien qui nous chiffonnait et je me souviens même qu’on devait rêver dans un rêve car nous voyions étrangement les cerisiers en fleurs de Kyoto se déroulant normalement au printemps, avec les érables du Canada conservant théoriquement leurs couleurs or et rouge pendant l’été indien, l’automne, et je me souviens enfin qu’on inaugura sur une plage des conférences de philanthrope et d’humanistes et d’où l’on ne trouvait que « des guérisseurs » dont heureusement l’excitation était à son comble…
LA ZONE -
Scotch avait oublié ce détail, ce détail qui tenait debout pourtant ; c’était peut-être le tintement de la sonnette qui dut lui rappeler soudain quelque chose, comme cette mauvaise dérouillée que cet ancien nazi des jeunesses hitlériennes lui avait infligée ; mais avant qu’il lui ouvre la porte il tenta de mémoriser les techniques de ses cours de ju-jitsu ainsi que la configuration de l’appartement, notamment où se trouvait la tronçonneuse pour lui ouvrir la vésicule ou la jugulaire.
= ajouter un commentaire =
Les commentaires sont réservés aux utilisateurs connectés.
= commentaires =
De l'avis de ladmin, c'est un peu la pagaille dans ce texte. Il aurait mérité une relecture et probablement quelques bons coups de gomme à droite et à gauche. Après, il y a des choix surprenants, des images étranges, voire luxuriantes comme ces cerisiers en fleurs de Kyoto. Par contre, vraiment, l'histoire m'a vraiment perdu en chemin.
De l'avis du lecteur zonard par la force des choses, putain, faut relire, ré-écrire, corriger. On s'ennuie malgré quelques ambiances intéressantes. Bigre mais oh.
Bah, c'est du HK, tu vas t'habituer.
Au bout d'un moment les yeux se mettent à glisser tout naturellement sur sa prose, comme si on t'avait collé une motte de beurre dans chaque orbite (et un buvard dans le tiroir).
C'est de cette façon que j'ai lu le Festin Nu, d'ailleurs, et ça m'a plutôt réussi.
Je peux le brandir fièrement à la truffe de mon chien : "j'ai lu Burroughs, sale petite vipère !"
Ça ne m'étonnerait pas qu'HK abuse de beuze, d'hélicéenne et d'adenochrome pour pondre ces hideuses histoires Burroughsiennes.
J'ai eu beaucoup de mal avec Burroughs et comme j'avais un bon pote qui en était fou, j'ai fait l'effort de me farcir la moitié de sa bibliographie. Je n'en garde qu'un souvenir confus traversé de phrases mal foutues, et en anglais bordel, parce que j'ai fait l'effort de.
J'étais jeune et con à l'époque.
Maintenant, c'est pareil en moins jeune.
Junky, son seul bouquin sans cut-up, m'avait semblé bon à l'époque où je l'ai lu. Je ne sais pas si j'en penserais la même chose en le relisant aujourd'hui, mais il me semble que le style était froid, sec, efficace, et la narration itou.
Pour le reste, oui, syntaxe approximative (justement à cause du cut-up) et visions hallucinées qui s'enchaînent aléatoirement.