- Bonjour, Caroline.
- Bonjour, Caroline.
- Bonjour, Boule. Bonjour, Bill.
Caroline n'en croyait ni ses yeux ni ses oreilles. Ces deux fils de pute trônaient au centre d'un repas de famille et, le plus amicalement du monde, s'adressaient à elle avec un calme insupportable. Un groupe de mariachis en fond sonore rendait l'insupportable inconcevable.
Elle se tenait à l'entrée de la pièce, l'arme à la main.
Bill s'adressa aux quatre tortues géantes attablées avec eux. L'instinct maternel de Caroline lui avait déjà fait comprendre que ces monstruosités issues de leur exposition en bas âge à un fluide mutagène n'étaient autre que la couvée qu'elle avait cru perdue cinq ans plus tôt. Sa soif de vengeance envers Boule et Bill redoubla. Elle rengaina néanmoins son sabre.
- Dis bonjour à maman, Leonardo.
- Bonjour, maman.
- Dis bonjour à maman, Raphaël.
- Bonjour, maman.
- Dis bonjour à maman, Donatello.
- Bonjour, maman.
- Dis bonjour à maman, Michelangelo.
- Bonjour, maman.
- Tu ne te joins pas à nous, Caroline ? On a commandé des pizzas. Les enfants aiment beaucoup les pizzas.
- Je suis venue te tuer, Bill. Et toi aussi, Boule.
- Papas, elle est méchante, maman ?
- Non, Leonardo, maman n'est pas méchante. Elle est juste très en colère contre tes papas. Vois-tu, tes papas n'ont pas été très gentils avec maman.
- C'est le moins qu'on puisse dire, Boule.
- Vos papas ont mis chacun une balle dans la tête de maman, les enfants. Ça a fait bang ! bang ! mais ça a fait pschit, et hop ! revoilà maman, sexy comme jamais dans sa carapace, et très remontée. On le serait à moins.
- Votre maman n'est-elle pas magnifique, les enfants ?
- Si.
- Davvero, è bellissima.
- Veramente.
- Miam, miam, la bonne pizza aux anchois.
- Tes enfants ne sont-ils pas les plus jolies petites tortues du monde, Caroline ?
La tueuse anciennement connue sous le nom de Black Turtle ne répondit pas. Son instinct de mère ne pouvait vaincre son sentiment de répulsion à la vue de ces grosses tortues humanoïdes en train de se goinfrer de pizzas. Ils lui avaient même pris cela. Son amour maternel.
C'est pourtant bien pour les œufs qu'elle s'apprêtait à pondre qu'elle avait tenté de fuir le monde de violence qui était le sien avec Boule et Bill. Elle était partie, maso, avec un vieux macho qu'elle avait rencontré dans une station de métro. À la suite de cette douloureuse déception sentimentale, d'humeur chaleureuse, Boule et Bill étaient devenus brutaux.
Laissée pour morte par leur groupe de tueurs, elle était finalement sortie du coma contre toute attente et avait alors traqué et impitoyablement massacré l'un après l'autre tous les membres du Détachement International des Chéloniens Assassins. Le corps mutilé de monsieur Coupon-Dubois marinait dans un marais solognot. Le chat Caporal était mort étouffé dans la chatte à la veuve du colonel Stick, dont la tête avait déserté le corps avec un entrain inattendu. Travaillé au deux cent vingt volts avec application, Pouf avait longtemps appelé sa mère en pleurant comme une petite merde avant que son cœur ne lâche. Le père de Boule, amputé de tous ses membres, gisait dans le coffre de sa vieille 2 CV. Sa blonde épouse éviscérée s'était longuement déversée sur le carrelage de sa cuisine, tressautant interminablement dans ses boyaux comme un lapin à piles Duracell.
Caroline dégaina son katana. Les mariachis s'envolèrent par la fenêtre.
- Les enfants, si vous alliez jouer dans les égouts avec votre vieux rat ? suggéra Boule.
- Je lui ai marché dessus sans le faire exprès, confessa Michelangelo. Il ne bouge plus.
- Allez tout de même jouer dans les égouts, ordonna Bill.
Les jeunes tortues mutantes obéirent en traînant quelque peu les pattes. Boule se leva pour aller mettre un disque sur une platine vinyle. La voix de Neil Diamond chantant « Sweet Caroline » s'éleva dans la pièce.
- La haine d'un être n'est pas dans nos prérogatives, Caroline.
- Je suis l'as de trèfle qui pique ton cœur, Caroline.
Ces deux infâmes salopards tentaient de l'amadouer.
- Je ne suis pas passée pour être présente dans votre futur. Pauvres cons, vous n'avez aucun avenir.
- Cette tortue a le droit de se venger, Bill.
- Et nous méritons de mourir, Boule.
Bill se baladait à poil, comme d'habitude, et Boule arborait son éternelle salopette bleue. Bill différait des autres en ce sens qu'il n'avait pas à mettre un costume pour être Bill. Quand il se réveillait le matin, il était Bill. Alors que Boule devait mettre une salopette.
Cette petite salope rouquine de Boule eut un éclair de génie.
- Je crois bien que ça va être un bain de sang, Bill.
- Quoi ? Un bain ! hurla le cocker en un réflexe pavlovien.
Soudainement terrifié, Bill s'élança devant lui en courant comme un dératé, plus véloce et inarrêtable qu'une coulée pyroclastique. Caroline, surprise, fut bousculée et projetée en l'air. Quand elle retomba, Boule la tenait en joue.
- Tu l'as dans le cloaque, ma belle. Lâche ce sabre et assieds-toi.
Ce n'était plus le même film et Neil Diamond enchaîna sur « Girl, you'll be a woman soon ». Boule se mit à danser en faisant des V de la victoire devant ses yeux jusqu'à ce que Bill revienne enfin pointer ses longues oreilles penaudes dans les parages.
- Attache-moi cette petite radasse, couillon. On va la flamber dans le jardin.
Les petites pattes de Caroline était attachées dans son dos à la grille du barbecue.
- Z'y va ! bouge le gros orteil, grosse.
- Nous allons maintenant t'enseigner la technique des cinq bidons et de l'allumette qui fait s'enflammer le corps.
- C'est beaucoup de bidons, Boule.
- C'est la technique, Bill.
Les cinq bidons furent donc déversés. L'allumette fut allumée. Caroline tentait avec fureur de se débattre.
- Enfoirés de petits enculés de m...
L'embrasement la saisit dans cette envolée lyrique. Une odeur de kératine brûlée se répandit très vite dans le jardin. Les flammes étaient belles, ardentes, et montaient haut dans le ciel.
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Un auteur qu'on souhaiterait lire plus souvent sur la Zone.
Encore un texte aux références périmées qui fera grogner Clacker. Belle illustration, petite combustion.
Maieuh ! C'est pas juste c'est Caroline qu'aurait dû gagner !
Moins vingt, moins vingt !
Mais à part ça en vrai c'était marrant, lol.
D'accord avec Dourak, mais je crains que tout ne soit dans le pseudo de l'auteur, faut pas trop en demander d'un glandeur.
Périmées, qu'elle dit, la carcasse de viande faisandée. Et faut pas trop en demander vu le pseudo, qu'il dit, le dégueulis même pas déterminé par son article. Moins vingt ? Mais, à ce stade avancé de putréfaction, c'est la température à laquelle il faudrait vous conserver pour éviter d'avoir à glisser sur vous, ce qui semble hélas être le sort réservé à ce texte, lequel, tant que je n'en aurai pas publié d'autre, constituera incontestablement un chef-d'œuvre, on ne m'en fera pas démordre.
T'écris bien, Dugland.
Un capolavoro dov'essere l'inizio, non la fine d'una carriera d'artista. E non avere paura di fare merda, qui siamo tutti coprophagi.
Ti esperiamo per altri testi.
Testi...
Testicoli.
TESTIPALLE !!!!
Ce texte contient tout de même la plus belle phrase, jusqu'ici, de cette Saint-Con. Voire les deux plus belles.
La mort de Caporal est presque aussi ignoble que celle d'Adolphe, décédé tragiquement il y a de cela deux St Cons. Les greffiers n'ont décidément pas la vie facile, sur La Zone.
Pouf n'a eu que ce qu'il méritait. Je n'ai jamais pu blairer sa coupe de douilles à la Pollux.
"Ce texte contient tout de même la plus belle phrase, jusqu'ici, de cette Saint-Con. Voire les deux plus belles."
QUELLES PHRASES BORDEL DE MERDE §§?? ça fait trois semaines que j'attends que tu nous le dises.
L'écriture est effectivement soignée, c'est notable, mais le fond me semble anecdotique. Pourtant j'ai les références, pour changer.
"Sa blonde épouse éviscérée s'était longuement déversée sur le carrelage de sa cuisine, tressautant interminablement dans ses boyaux comme un lapin à piles Duracell."
Là ça claque, comme image.
C'était il y a neuf jours... Bah oui, cette phrase-là. Et puis "Tu l'as dans le cloaque, ma belle". Après, d'autres textes ont été postés depuis.
Anecdotique, sans doute. J'imagine que ça se voulait avant tout un peu drôle.
Le temps passe plus vite, à Oulan-Bator.
"Les enfants, si vous alliez jouer dans les égouts avec votre vieux rat ? suggéra Boule."
Premier sourire de cette Saint Con.
Tu marques des points, sale Glandeur.
Aimons-nous vivants.
Bref, je poursuis...
"- Nous allons maintenant t'enseigner la technique des cinq bidons et de l'allumette qui fait s'enflammer le corps.
- C'est beaucoup de bidons, Boule.
- C'est la technique, Bill."
Ah, le bâtard !
Deuxième sourire.
Comment t'es trop mon texte préféré jusqu'ici, je te raconte même pas.
Bon, ben c'est cool tout ça.
Je commence à sentir un peu de chaleur émaner de cette St con.
Le bilan carbone de cette crémation est tout simplement scandaleux. Et puis mettre cette tortue au barbecue, c'est dégueulasse. Chacun sait que la tortue est bien meilleure en soupe.
Sinon le récit est très réjouissant.