Natanaël fut d'abord ébloui par un soleil de plomb. Il cligna des yeux quelques secondes et lui fallut quelques minutes pour comprendre où il se trouvait. La chaleur du sud était sans équivoque. Le vent charriait du sable brûlant rendant l'atmosphère presque irrespirable, la fournaise était si intense qu'il avait l'impression de cuire dans son armure de plates. Natanaël regarda à droite et à gauche, le stress le gagna quand il vit d'autres soldats, comme lui, en armure blanche. Ils étaient en première ligne comme toujours, des centaines de milliers d'anges de sang, des soldats de la Septième Armée, comme lui, côte à côte dans cette vaste étendue désertique de Ganymède. Il connaissait ce territoire fait de sable et de roches brisées, il n'y avait rien à des kilomètres à la ronde. Depuis combien de temps n'avait-il pas été mobilisé pour la guerre ? Des siècles, si ce n'était plus. Machinalement, sa main se porta à son épée, rangée dans son fourreau, comme pour se rassurer. Il savait au fond de lui que tout serait différent cette fois-ci, il n'était plus protégé par l'Eternel mais les autres le savaient-ils ? leur ennemi était-il au courant ? Il regarda en face de lui et s'aperçut qu'une armée équivalente leur faisait face. Les bannières d'Astarté III flottaient au vent - un coeur en flamme transpercé par une flèche. Les soldats en tenue de cuir, les "Cœurs Percés", poussaient des hurlements de sauvage, tambourinaient sur leurs boucliers avec leurs masses pour les impressionner. Le commandant en chef de leur armée, Zezobiel, se redressa sur son cheval et se mit à trottiner devant eux. L'homme n'avait pas changé depuis des siècles, il semblait curieusement sans âge, toujours placide, il tonna d'une voix grave et déterminée :
- Mes frères ! Nous avons été appelés pour ramener l'ordre en ces terres sous le regard bienveillant de notre père à tous, l'Eternel. Ces êtres impies doivent être châtiés pour leur péché ! Pour avoir osé bafouer la paix ! L'armée des anges de sang va prouver une fois pour toute que les Sept resteront invaincus ! Pour l'Eternel ! Hurla-t-il en lançant la charge.
Ses frères d'armes s'égosillèrent en répétant ses propos pour se donner du courage. Ils se mirent à courir en direction de la ligne adverse, armes à la main, prêts à fendre les corps qui oseraient s'opposer à eux. Ils avaient tous été conditionnés à ce que l'adversaire ne riposte pas, aucun être sur Luveïs n'aurait jamais osé s'en prendre à un ange de peur de faire descendre les Dominations ou les Puissances. Ils chargèrent donc dans l'idée certaine que leur adversaire prendrait leur jambe à leur coup.
Mais ce ne fut pas le cas.
Alors que l'armée des anges de sang, en première ligne, chargeait sur les Cœurs Percés, il n'y eut aucun mouvement de recul. Bien au contraire, les soldats tendirent leur arc en direction du ciel et décochèrent une salve de flèches dans leur direction. Ils se rangèrent immédiatement en position défensive et une pluie de métal s'abattit sur eux, ricocha sur leur armure de plates, sur leur bouclier et transperça quelques visages au passage. Il eut alors comme un moment de flottement. Des anges de sang étaient morts. Personne n'était tombé du ciel. Ce fut alors comme une brèche qui s'ouvrait violemment, déversant des quantités d'ogres qui se ruaient sur eux avec une rage incontrôlée. Ils se remirent en mouvement et les deux lignes s'entrechoquèrent dans un fracas terrible. Le cliquetis des armes s'accompagnaient des rugissements des sauvages, des appels à l'aide des premiers hommes qui tombent. Natanaël fonça sur l'un des Cœurs Percés et d'une main de fer, brandit son épée en l'air et le décapita avec une force surhumaine. Le sang gicla sur son armure immaculée et l'aveugla durant quelques secondes. Dans la cohue, les ennemis et les anges tombaient à la renverse, des cadavres gisaient sur le sol, des hommes se trainaient par terre à la recherche d'un échappatoire.
Dans une cacophonie sans nom, la bataille faisait rage autour de lui, il ne se cessait porter des coups à ses ennemis avec ardeur. Un autre sauvage se précipita vers lui, transperça sa chair de sa lance avec un geste assuré. Il poussa un cri de douleur et retira presque aussitôt la pointe acérée qui s'était fichée dans son épaule. Les yeux fous, il se rua sur son adversaire, écrasa son visage du pommeau de son épée et lui fracassa le nez. Il continua de le mutiler jusqu'à-ce que son visage ne ressemble à rien d'autre qu'un cratère de chairs. Les runes bleues continuaient de se frayer un chemin à travers son épiderme, creusant des sillons de mort lumineux qui excitaient un peu plus son désir de violence. Il devait les tuer tous, c'était le seul moyen pour que la douleur s'arrête. La masse humaine ne cessait de grossir autour de lui, coagulant le flux d'hommes incessants des deux côtés. Des hommes s'effondrèrent derrière lui, il trébucha sur des corps méconnaissables qui semblaient avoir été piétinés par des centaines de soldats. Il transperça des cuirasses, pourfendit des torses et sectionna des membres dans une rage incontrôlable. La lutte dura ainsi des heures sous un soleil accablant.
Un rugissement retentit derrière lui et Natanaël bondit vers ce qui semblait être le Chef de guerre d'Astarté. L'homme était reconnaissable par la quantité de bijoux honorifiques qui ornait son cou. Son visage entaillé de cicatrices se tourna vers lui lorsqu'il le vit se précipiter dans sa direction. Natanaël se jeta sur le sol, se mit à glisser à côté de lui, l'épée tendue, et il lui trancha net la jambe. Le Chef de guerre s'effondra en poussant un juron mais d'un geste de la main riposta presque aussitôt en lui plantant son poignard dans le dos. La lame lui arracha un cri de douleur, il bascula sur côté et traina son corps dans ce cimetière à ciel à ouvert. Il se sentait épuisé, fatigué de cette lutte qui n'en finissait pas. Les cris retentissaient toujours, les hommes ne cessaient de se battre avec cette même rage qui prenait aux tripes. Pourquoi n'y avait-il pas de renforts ? Où était donc les Six autres armées angéliques ? Derrière lui, il entendit une sorte de gargarisme et s'aperçut que le Chef de guerre se traînait vers lui, crachant des glaires ensanglantées sur son chemin comme une vulgaire limace. Le corps à vif, Natanaël s'empara de son épée qui lui glissa aussitôt des mains. L'homme profita de ce moment de faiblesse pour lui monter sur le corps, ses mains puissantes s'enroulèrent autour de son cou et il serra avec une telle force que sa respiration fut immédiatement saccadée. Le commandant se débattit comme un diable, chercha de l'air dans cette fournaise irrespirable. Sur le dos, ses mains tâtonnèrent le sol fait de sable et de sang à la recherche de son arme. Ses forces le quittèrent doucement, ses bras cessèrent de frétiller comme un poisson hors de l'eau et il relâcha la pression qui l'avait animée jusque là. Petit à petit, ses forces l'abandonnèrent, son corps s'affaissa et le Chef de guerre relâcha sa prise. Dans un dernier instinct de survie, Natanaël effleura du bout des doigts ce qui ressemblait à une masse. Il rassembla ce qui lui restait de force et frappa le chef de guerre au visage. Un craquement sinistre lui confirma qu'il avait bien atteint sa cible. Le crâne fracassé, le sauvage s'affala sur lui, inerte. Avant de sombrer dans un profond coma, il put entendre le cor du royaume de Baatral résonner à ses oreilles. Finalement, ils n'étaient pas les seuls à être condamnés à mourir sur ces maudites terres.
LA ZONE -
= commentaires =
omg c'est Miranda Potter ? j'ai lu absolution il y a peu et mon âme a tressaillit comme si Lord Voldemort lui même la pénétrait. du génie
-10 points pute pour Serpentard
Ben j'ai bien aimé. ça m'a rappelé de longues parties de Warhammer. Bon souvenir.
J'ai un peu de mal avec ce style de littérature, mais c'est pas mal torché. Je peux avoir un autographe SMB ?
Ça c'est de la fresque à grand spectacle. Bien grouillante et colorée. Ben si t'en as une autre, avec plaisir, on aura une belle paire de fresques.
"... leurs adversaires prendraient leurs jambes à leur cou" serait plus mieux, mais c'est toi le chef, à toi de voir.