Cela faisait plus de quinze ans que Petite Maman n'avait pas quitté ce lit. Un lit de bois sombre, sans décoration particulière, des draps blancs, une couverture orange, ou marron clair, élimée sur les bords, un couvre-lit jaune et sale orné de fleurs démesurées, obscènes, et qui ne faisaient plus illusion. La chambre sentait l'urine fermentée, l'odeur avait imprégné jusqu'à l'âme du bois. Tout était sombre. L'unique fenêtre semblait n'avoir jamais été ouverte. Les volets étaient fermés, leurs fentes parallèles laissaient couler une lumière grise et fanée.
Je me tenais debout, au seuil de cette chambre. J'étais là, je devais m'occuper de Petite Maman. Quelque temps auparavant, j'étais arrivé dans cette grande demeure. Je ne me souvenais pas exactement de ce qui s'était passé. Les circonstances étaient incertaines, et ne m'intéressaient pas, au fond. Il y avait du travail. La toilette du matin, le petit-déjeuner. Faire un peu de ménage. Les repas, le linge. La toilette, encore, car Petite Maman souillait régulièrement la longue chemise de nuit en lin qui était son seul vêtement.
J'avais réfléchi, et ma conclusion était qu'il ne s'agissait pas d'un accident. C'est violent, un accident, c'est un choc, et la trace d'un choc révèle inévitablement une discontinuité, un déchirement, une pliure aiguë. Des plaques et des frontières dessinées à coups de hache. Il n'y avait rien de cela dans ce qui restait du visage de Petite Maman. Au contraire. Il était le résultat d'une patiente opération de couture, un rapiécage délicat, un ouvrage de dentelle ancienne. On y décelait une minutie dont la nature seule serait certainement incapable. Une précision, une volonté humaine, un dessein même, un projet. Les lèvres étaient soudées, ce qui aurait dû être l'ouverture d'une bouche se réduisait à une ligne frêle, hésitante et décolorée, une jointure réussie et presque imperceptible entre deux pans de tissu blême qu'on avait décidé de ne plus jamais écarter l'un de l'autre. Cet embryon avorté de bouche ne se trouvait pas au milieu de la face, mais repoussé sur le côté droit, à la place de la joue. Et par une sorte de compensation cynique, l'autre joue était trouée d'une béance qui laissait voir l'intérieur des mâchoires, la langue et le palais. Petite Maman ne parlait pas, cette ouverture décentrée ne lui était utile que pour l'ingestion de matières préalablement broyées. Aussi était-elle la plupart du temps colmatée par un pansement épais, que l'on détachait à l'occasion des repas, ou d'une manière générale lorsque l'on avait besoin d'accéder à la cavité buccale. Cette percée dans la chair était étrange. Les bords étaient fins, ourlés, sans croûte ni fissure, et dessinaient un contour ovale inattendu.
L'oeil gauche de Petite Maman avait suivi le mouvement de rotation qu'un artisan invisible avait imprimé à la bouche scellée, et se trouvait par conséquent lui aussi déplacé vers la droite, rapproché de son homologue, et presque sur l'axe de symétrie de la tête, juste au-dessus du nez. Lequel était absent. Seuls subsistaient les cartilages, et les narines de Petite Maman étaient deux trous rectangulaires et arrondis, accolés verticalement dans leur longueur, et vibrant au rythme de sa faible respiration. Le reste du corps était d'une conception beaucoup plus ordinaire, mais totalement paralysé, à l'exception de quelques soubresauts qui agitaient parfois son torse, ses bras ou ses mains.
Quand je n'étais pas avec Petite Maman, j'errais dans les pièces de la maison, un vaste palais d'ombres et de recoins. C'était une demeure ancienne, du bois presque partout, des meubles vénérables, des tableaux... Des portraits essentiellement, mais je ne me souvenais jamais des visages qu'ils représentaient. Jusqu'à présent, je n'avais jamais osé sortir de la maison. Je savais qu'elle était entourée d'un parc à l'abandon, immense sans doute, car j'entendais à peine les sons qui témoignent d'une activité extérieure, le ronronnement des automobiles était étouffé et lointain, aucune conversation de passants ne me parvenait, et même le vent ne voulait pas se faire entendre. Mais il y avait les pleurs. Quelque part, une petite fille sanglotait.
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Sur le flyer, on avait pas dit que ça commençait le 7 juin ? Ou j'ai tripé ?
Pour la semaine TDM, les contributions sont à envoyer avant le 7 juin mais elle commence dès demain. Sinon ce texte n'est pas du tout merdique mais j'ai déjà dit ce que j'en pensais dans le descriptif.
C'est bon, ça va, je l'ai même pas lu...
Mais tant que j'aurai pas mes points pute, je continuerai dans cette veine de gros lourd. C'est con parce que je peux être très raffiné et constructif, par ailleurs.
Trop court. Ça me rappelle le pénis d'Elon Musk, tiens.
On ne sait pas combien il y aura d'épisodes cela dit. Feuilletonner c'est bien aussi.
Certes. Mais du coup, on ne peut pas en dire grand chose à part « ouh là là comme c’est bien écrit » et là, je ne suis pas d’humeur. On en reparle quand j’aurai un point pute.
ouh là là comme c'est bien écrit
La dernière fois que j'ai vu un truc aussi bien écrit, c'était un texte de Clacker, je crois.
Ça sert à rien de me sucer, je viens de me rendre compte qu'en vérité je n'ai aucun pouvoir et que ma vie est semblable à une succession d'épisodes de Buffy contre les vampires.
Bon et maintenant, lisons ce bazar.
J'ai réussi à connecter mes deux neurones pour me concentrer là-dessus et ça valait le coup. L'ambiance est terrible, vraiment réussie. Contrairement à LC je ne trouve pas ça dickien du tout, dans le sens où je ne vois (pour l'instant) nulle trace de SF, et même pas vraiment de fantastique (même si l'atmosphère est "onirique", effectivement). Et d'ailleurs je propose qu'on fasse un tournoi d'analogies.
J'ai pensé à Tideland de Terry Gilliam mixé avec la rescapée de l'incendie d'une carcasse de bagnole à la suite d'un violent accident de la circulation.
Il y a une vidéo de cette dame-là sur youtube, je ne vous la conseille pas vraiment. Enfin, vous êtes vieux, vous faites ce que vous voulez.
Après, effectivement, c'est court, trop court, comme ma capacité de réflexion.
Ce qui fait que je suis curieux de voir la suite.
moi ça m'a fait penser à ce tableau de Picasso :
https://france3-regions.francetvinfo.fr/grand-est/sites/regions_france3/files/styles/top_big/public/assets/images/2019/03/22/montage_picasso-4150132.jpg
Ben voilà le forum est cassé et le seul qui pouvait le réparer c'est Dourak qui est dans le Tur-fu avec B2O
Ah ouais, ça fait chier. Il t'a pas laissé le numéro d'urgence de sa maison de passe à Sarajevo ?
malheureusement non. Le cours du point pute ne vaut plus rien.
C'est une catastrophe pour toute la nation zonarde.
Je chiale. De vraies larmes.
On est peu de chose, quand même... Il me reste une corde et un tabouret, que je n'ai pas vendus pour de la drogue en pensant à un moment semblable à celui que nous vivons.
OK, je commence à comprendre. C'est une attaque parfaitement voulue de la part de notre cher Dourak, qui ne nous a jamais quitté. J'ai bon, j'ai bon ? Allez, un point pute, s'il te plait !
C'est surtout CTЯL X qui est vieux, avec son alzheimer et tout.
En tous cas, on ne peut pas vous laisser seuls trois minutes que vous cassez tout, bande de branluchons.
Dourak, viens donc leur coller la fessée.
C'est réparé ! L'esprit de Dourak transcende l'espace et le temps.
Même si nous ne le voyons pas, même si nous ne le lisons pas, il est encore là. Je le savais. Ne perdez pas la foi, et détestez-vous les uns les autres. Tout est rentré dans l'ordre. (et j'attends mon point pute)
Le point pute est de retour dans la grande ronde des crypto currencies
La suite, bordel.
Il nous faudrait surtout une bonne suite.
Il est extraordinaire, ce texte...
La suite ! Point pute indexé sur le Bitcoin.
Plot twist : c'est une histoire de cul entre Petite Maman et le narrateur.
Si PhScar ne revient pas, est-ce que je peux écrire la suite de ce texte ? J'ai...des idées. Hum.