LA ZONE -

Des chèvres et des hommes, partie 2

Le 11/08/2016
par Hag
[illustration] - J'ai des rêves de violence et de hurlement, de coups, de déchirement, de cris, de baise. Je tourne en rond dans mon corps parfaitement contrôlé, parfaitement neutralisé, dressée par des forces que je m'épuise à chercher. Je suis parfaitement sabotée, bonne à rien faire à part cracher ma merde interne paresseusement, de temps en temps. Je culpabilise de dormir et de ne pas dormir, je ne contrôle ni mon corps ni mon énergie, m'exprimer me fatigue et ne pas m'exprimer me fatigue tout autant. Je suis épuisée. Merde. J'ai juste envie de chialer, d'arriver à chialer sur toutes ces choses, toutes ces conneries, toute cette souffrance, et sur ces moments de grâce qui te sauvent la gueule et que tu peux plus oublier, condamnée à savoir que ouais, tu étais heureuse, ouais, c'était bien, ouais, un instant tu avais réussi à oublier toute la souffrance, tu avais réussi à oublier toute ta putain de solitude.
- Dégueule ta bile, les fleuves de bile, dégueule les montagnes de lassitude et de dégoût, dégueule le plus profond de ta merde, de ta haine et de ta colère. Dégueule camarade, soeur, amie, ton silence, tes batailles, tes ras-le-bol désabusés, dégueule le récit de ton incompréhension.
Coralie avait un grand sourire, un rire sonore et l'énergie d'envoyer chier tout ce qui l'emmerdait. Assis tous deux dans la cour devant la maison, elle racontait au nouveau venu la vie d'en Bas ; ils fumaient, regardant au dessus d'eux à travers le nuage de nuit les faible lueurs qui allaient et venaient doucement, composant sans cesse de nouvelles constellations.
- Ici, certains appellent ça l'enfer, parfois, car c'est bien là qu'arrive toutes les âmes trop lourdes. Regarde-les, toutes ces âmes, qui viennent d'en Haut, de ton monde comme de tous les autres. Elles descendent dans notre ciel et elle brûlent, elles brûlent, les plus légères se consument entièrement, rapidement, et se libèrent, les plus lourdes tombent au sol et accouchent d'un damné. Et pour chaque damné qui est ou qui sera, il y a un démon qui le cherche, qui l'attend sans répit, pour briser son âme malade, pour la libérer, condamné à devoir tourmenter cet être qui n'a pas su s'élever lui-même.
- Et ça arrive souvent qu'un démon trouve son damné ? Comment le sait-il d'ailleurs ?
- Il le sait. Je crois. D'une façon ou d'une autre. Et ouais, ça arrive, et ça arrivera dans tous les cas, car un jour la dernière âme sera dissoute, un jour le dernier démon aura libéré sa dernière victime, alors l'univers sera de nouveau en ordre, les démons seront relevés de leur fardeau, et ils pourront à leur tour goûter au repos immortel.
- L'univers n'est pas en ordre ?
- Il fut projeté dans le temps et la matière par le Démiurge, se divisant et créant les mondes où nous fûmes projetés, en Haut les mortels ignorants nés de la séparation des choses, en Bas les démons esclaves de leur mission.
- C'est quoi ce Démiurge ?
- C'est le mal, c'est ce ou celui qui a brisé la création, l'équilibre, pour créer cet univers d'illusions, de formes, cette mascarade absurde où nous évoluons sans trop comprendre ce qu'il se passe.
- Euh, ok, ça me parait un peu... abscons. Ou du moins difficile à croire, je suis pas très porté sur ce genre de croyances tu sais.
- Demande à un démon, il t'expliquera ça mieux que moi. Mais il sera sans doute d'accord.

La cosmogonie en resta là, ils profitèrent encore un peu de l'air calme, au silence à peine coupés des cris et des rires venant de la maison. Du jardin aux fleurs que l'absence de saisons faisait fleurir n'importe quand et aux aromates qui avaient pris un discret arrière goût de sang venaient de douces senteurs qui lui rappelait ses soirées d'en Haut, et seules les étoiles qui mourraient - et certains cris lointains - le ramenaient dans cet endroit infini où, depuis le début des temps, les démons attendaient.

- Et comment vont les affaires ? Vous allez les chercher où maintenant vos gens ?
- En Haut, répondit-elle. On les choppe au hasard, on les ramène ici, où personne ne vient nous chercher. C'est bien, on est plus tranquille qu'en Haut, et les démons sont sympa, ils nous filent des tuyaux ou du matos. Et ils appellent pas les flics à chaque fois qu'un connard disparaît.
- Tu m'étonnes.
- Et toi d'ailleurs, tu continues un peu ?
- J'ai repris récemment ouais, mais j'ai perdu la main, c'est naze. J'ai attrapé une fille qui passait dans une ruelle
- Dans la mauvaise ruelle, la pauvre.
- Mais non, elle était parfaite cette ruelle. Bref, je la ramène peinard, je la tabasse un coup, je la viole, et après je sais pas, j'ai essayé de la maintenir en vie le plus longtemps possible pendant que je lui tranchais le cou.
- Bonne idée ça.
- Tu parles, elle a clamsé en vingt minutes. Tu te sens con après, tu commençais à t'amuser et voila, il te reste plus qu'a devoir virer le corps et tout nettoyer.
Coralie se marra.
- Elle aura eu de la chance finalement la fille.
- Mouais, j'ai pas trop les idées claires ces derniers temps. Plein de merdes qui me sont tombées dessus en quelques semaines. J'ai du mal à être un bon taré quand j'ai le moral par terre. Et cette histoire m'a replombé un coup, tu sais que j'aime pas gaspiller les gens comme ça.
- T'inquiète pas, ça arrive. Je vais te raconter un truc. Après le déménagement, pour fêter ça je suis allé cueillir une nana, je voulais faire une surprise à Victor. Mais avec tout le boulot, j'étais claqué, j'ai passé trois heures à tourner en bagnole pour en chopper une, finalement paf, je l'évanouis péniblement, elle a fait du bruit et tout, je la drogue, je la fous dans le coffre et hop, je m'en repars bien contente. Deux heures de route, RAS, et là j'arrive, j'ouvre le coffre, et elle était morte. Toujours pas compris.
- A croire qu'ils font exprès parfois. Et vas-y que je meure d'une coupure, et vas-y que je me blesse tout seul. Ils pourraient au moins nous laisser faire notre boulot quoi.
- Ouais, les bâtards !

Ils rirent bien, et rentrèrent voir ce qui se passait à l'intérieur. C'était en train de taper la coinche sur la table basse, qui malgré ses sursauts ne renversait ni le jeu, ni les verres, ni la cafetière brûlante. Les démons faisaient du bon boulot. Ils terminèrent leur partie en s'insultant bruyamment, puisque tout le monde avait triché, donnèrent un bon coup de pied dans le dos de la table, se resservirent un somacafé, relancèrent une manche. Comme ils avaient autre chose a foutre que d'observer trois démons et un mortel s'engueuler, les deux humains allèrent dans la grange.

C'était une grande bâtisse en longueur accolée contre la maison. Y étaient entreposés du menu matériel, des vivres et quelques chèvres ruminant ou endormies, ou léchant les cadavres de leur semblables, dépecées ou non, pendant doucement du haut plafond ; de derrière elles parvenaient parfois de faibles bruits. Ils traversèrent les groupes de caprins, au fond de la pièce, dans le coin d'abattage, se tenait une forme recroquevillée ; la fille au corps seulement couvert d'hématomes semblait malgré ses liens réussi à trouver quelque sommeil. Ils la regardèrent en silence, sa respiration plutôt régulière était parfois entrecoupée de spasmes et de grimaces. Puis Coralie attrapa un bâton, le leva haut et l'écrasa sur les côtes de la prisonnière. Elle se réveilla en un sursaut hurlant et essaya de s'asseoir avant d'être renvoyée à terre d'un nouveau coup sur le côté de la tête. Ils la relevèrent sans un mot, elle essaya de d'articuler quelque chose mais fut coupée d'un poing dans le bas-ventre. Il la redressa d'une main sur la gorge tandis que Coralie sortait un couteau.

Il se passa quelques heures, le nuage de nuit n'avait pas été très grand et s'en allait déjà.

La petite ferme se réveilla dans l'horreur. Là où tout n'était que joie, chèvres et sadisme, un meurtre avait eu lieu. Oui ! Car dans les ténèbres relatives du petit matin, alors que chacun comatait plus ou moins confortablement d'un sommeil plus ou moins juste, la fille attachée dans la grange avait été égorgée. C'est Victor qui s'en aperçu en revenant de mettre les bêtes au parc. Il apprit la nouvelle à ses compagnons lors d'un bien triste petit déjeuner, tous présents sauf Coralie qui semblait faire la grasse mâtinée. Chacun était chagriné de l'impolitesse du meurtrier qui venait de tuer un humain en bon état, pouvant encore servir, pour son petit plaisir personnel sans croire bon de prévenir les autres. Et comme personne ne voulait se dénoncer, on fit venir un voisin, Scc, sympathique démon menuisier qui recueillit les témoignages de chacun pour essayer de démêler l'histoire.

Témoignage de [rédigé], humain, de passage en Bas.
Oui, il s'est passé pas mal de choses cette nuit là, enfin, je l'ai passée presque entièrement avec cette fille. Il faisait bon dans la grange, c'était agréable, motivant. Tu sais, j'avais vraiment envie de me défouler, de me lâcher par moment, sur la fille. Là surtout je sors d'une longue relation, on s'est séparé avec ma copine il y a quelques jours, et faire du mal à cette pauvrette m'a fait plutôt du bien. Ca m'a soulagé de lui balancer toute cette violence qui me prenait la tête, Du coup parfois j'y suis allé un peu fort. Au début, Coralie était là aussi, on essayait chacun notre tour de la faire hurler le plus possible, ou de lui insérer les objets les plus improbables dans l'anus. C'est Coralie qui a gagné, elle lui a coupé quelques orteils et lui les a foutu dans le cul. Pas mal, non ? Elle m'impressionne cette femme parfois. Après elle est rentrée et m'a laissé seul avec l'autre. Je me souviens bien.
Je m'approchai de la fille dans le coin de la pièce. Elle me regarda à peine, elle tremblait toujours, mais elle ne saignait plus. Son visage humide avait le beau ton violet de celles qui ont trop souffert, elle respirait encore un peu vite en faisant de petits reniflements. Plus j'avançais, et plus elle détournait la tête, regard bas, essayant de s'écraser contre le mur dans le tintement de métal des menottes contre la tuyauterie. Elle renifla encore, eut un hoquet, haletait. N'ayant guère d'empathie, je me contentai de trouver ça un peu grotesque. Je lui demandai son nom mais elle ne répondit rien, elle avait surtout l'air en état de choc. Je me suis approché jusqu'à me coller à elle, une main sur son ventre, cherchant, pressant, l'autre tâtant son cou. Elle avait un beau cou, long, fier, j'y collai ma tête et me laissai bercé par le rythme chaud de son sang, le souffle rauque de sa trachée. Je suis resté là, sentant ses larmes couler sur mon front, caressant mes joues. Un cou vraiment exceptionnel. J'étais bien. Enfin. Ensuite je suis resté seul avec elle, sans croiser personne, je l'ai finalement pénétrée plusieurs fois, parfois en l'étranglant, parfois en lui donnant de petits coups de couteau. Il fallait voir comme ça la faisait bouger, un plaisir. On s'est encore un peu amusé - surtout moi je pense, en fait, honnêtement - mais je commençais à fatiguer et à devenir un peu maladroit, je suis donc parti me pieuter comme il se doit. J'ai très bien dormi, pour une fois.

Témoignage de Krh, démon, marin.
Une soirée vraiment agréable. Bonne ambiance. Et quelle belle partie de belote. De la tension, un bon équipier, un peu d'action, parfait. Et quelques beaux retournements de situation. Ce capot contré, je me souviendrai toujours du regard de Victor quand j'ai gueulé "contré" sur le capot trèfle de Isnn. Il avait la peur dans les yeux, mais je savais qu'avec son as et ma coupe franche ça allait passer nickel. Et on a gagné, sans grosses difficultés mais ça fait toujours plaisir. Quel beau sport pour psychorigides que la belote, quel plaisir de les voir s'énerver. On a bien mangé aussi, ce fromage de chèvre est une merveille, accompagné avec ce petit rouge local, j'étais sur un petit nuage, loin de l'immortalité et de ma haine. Après j'ai rejoint Coralie, on s'est baladé et caressé sous la nuit. J'ai vu ce sympathique fêlé de Lb nous observant caché derrière un buisson, ça m'a fait marrer. On a finit au pieu, puis on a discuté pas mal, l'humaine parlait sans cesse d'une fille dans la grange, elle avait l'air de vraiment vouloir la tuer, je lui ai dit que c'était une bonne idée, que je voulais bien voir ça aussi. Elle a finit par s'endormir, je suis descendu, croisé Victor à la cuisine, ça sentait bon les herbes et la viande, il découpait de beaux morceaux de bidoche. Il était couvert de fluides sombres, un grand sourire à la gueule, couteaux en mains il désossait je ne sais trop quoi, avant de le mettre à mariner. Je l'ai aidé à couper des oignons et des carottes en racontant des conneries, on a bien rigolé. Il y avait Lb qui zonait autour de la grange en parlant tout seul, les autres devaient dormir. On a fini la cuisine, et suis monté me coucher à mon tour. C'est tout, je crois. Quelle belle soirée.

Témoignage de Victor, humain, chevrier.
Il ne s'est rien passé de particulièrement marquant ce soir là, je veux dire qu'on a reçu du monde, improvisé une petite soirée mais c'est tout. Avec trois démons j'ai coinché assez longtemps en descendant pas mal de soma au café, on était chaud, mais un moment ce fut l'heure d'aller sortir les chèvres, avec tout le soma que j'avais descendu je me sentais particulièrement d'attaque. Je veux dire, j'avais conçu un plan parfait pour en trois gestes ouvrir leur enclos, les emmener au parc, puis en chopper une et la tuer pour le repas du lendemain. En trois gestes. Mais le terrain m'a résisté en refusant de se conformer à mon schéma mental, ce qui m'a peiné et m'a fait passer pas mal de temps à essayer d'ouvrir la porte de la grange, surtout qu'elle semblait hurler lorsque je la touchais. C'était la première fois que j'entendais des hurlements de grange, ça ressemblait un peu à des hurlements humains, ça m'a dérouté, je me suis demandé si la grange était un mammifère, mais finalement j'ai réussi à ouvrir la porte à coups de pieds. Ca m'a motivé, et j'ai emmené les chèvres dans un des parcs à coups de pieds dans leurs gros culs sautillants, mais je me suis souvenu que je voulais en cuisiner une. En moins d'une demi-heure je suis parvenu à en chopper une, Klaxon elle s'appelait, la fille de Cymbale, une petite à poils long que j'ai taclée dans le fumier de chair. Aucune chance de m'échapper. Je l'ai tirée par une patte ou une corne vers le fond de la grange, dans le coin d'abattage, elle voulait pas, alors je lui ai expliqué que c'était juste pour la tuer pour la manger, et elle a changé d'avis. Il faisait noir dans la grange, si noir, elle a eu peur, la pauvrette, elle ne voulait plus rentrer, et j'ai du la trainer en chantant sa chanson préférée, une sur la mort d'une chevrette qui va être mangée, mais elle avait toujours peur. Je tapais sur les murs de la grange pour que la lumière apparaisse mais ça n'a pas marché, on est arrivé à tâtons au fond de la pièce longue, je lui ai demandé de rester tranquille pendant que je cherchais mon couteau. Elle s'est calmée, puis a trébuché sur un truc mou allongé au fond et elle a paniqué, mais avant quelle ne puisse fuir, je lui suis tombé dessus. On a lutté, au début, puis nos corps chauds et poilus se sont mêlés, ses poils longs et doux, la proximité de la mort, nous étions si bien, ses sabots contre mon torse, mon sexe entre ses cornes. Nous étions sur une sorte de matelas vaguement anatomique, et alors que nous jouissions de concert, je lui ai tranché la gorge, mais ça a raté, je sais pas où j'ai coupé, mais j'ai dû m'y reprendre à plusieurs fois parmi ses bêlements d'orgasmes. J'ai fini par la coucher, en trois gestes comme prévu, et je l'ai découpée sur place en lui chantant sa chanson, j'ai galéré, dans le noir je ne voyais que dalle, mais finalement à la fin du troisième geste j'ai émergé, victorieux, avec la chevrette découpée. Elle mijote, actuellement.

Témoignage de Coralie, humaine, paysanne.
Tu sais, je me demande ce qui se passe si un humain meurt ici-Bas. Si il meurt en Haut, il débarque généralement en Bas, mais si il calanche en Bas ? Ca m'intrigue, ça fait quelques temps que je me pose la question et aucune piste. Bref, après avoir laissé notre invité seul avec notre invitée, je suis allé m'occuper de ma douve cosmogonique. Je lui ai allumé son feu sacré et ai récité les hymnes du sacrifice, je lui ai raconté l'unité des choses et les illusions qui nous piègent et séparent nos sensations, les mensonges du Démiurge et l'immortalité à laquelle nous reviendrons tous. Alors le soma fit son effet et je vis, je nous vis, et j'allais savoir, la vérité, ce soir, je tuerais quelqu'un, la fille de la grange, elle y passerait, et je verrai alors où va son âme. Cette pauvre fille. Comme ses yeux sont tristes parfois, parfois ça m'émeut, l'autre jour elle m'a fait pleurer. Je te jure. Je la travaillais, et dans un spasme de douleur elle m'a lancé un regard qui qui... qui m'a transpercé. Ca m'a touché net, on s'est regardé et là... Je sais pas. Les barrières ont lâché, ont enfin lâché, les larmes, ça faisait si longtemps, j'ai pleuré. J'ai pleuré avec elle, on était ensemble, je la tenais dans mes bras et je la serrais, je la serrais. C'était beau, ça nous a fait du bien à toutes les deux je pense. Ca m'a soulagé, vraiment, et elle j'avais l'impression qu'après elle avait meilleure mine. C'était bien. J'ai essuyé mon visage, lui ai caressé sa tête sale et triste. Et après, je lui ai vraiment fait mal. Ouais. Bref. J'avais prévu ce soir de retourner la voir, plus tard, et de la sacrifier. J'en ai parlé avec Krh, il est curieux lui aussi, il veut la voir morte. On en a parlé hier, on se baladait dans la nuit, on a vu Victor se battre contre la grange, puis on a croisé Isnn qui embrouillait Lb. On est monté se coucher, on a pas mal parlé d'ici Bas et des passages entre les univers. Il m'a parlé des gens qui fusionnent avec la roche et qui ouvrent les mondes, et de l'Ennemi, qui attend. C'est intéressant tout ça. On a beaucoup dormi, et on raté l'heure prévue du sacrifice, mais on va s'en occuper. Elle va y passer. Dès que j'ai fini de te raconter tout ça, je vais lui ouvrir grand sa gorge, et alors je saurai.

Témoignage de Isnn, démon, sorcière.
Hier, ce jour là, toute la journée j'étais énervée, vraiment. Ca a commencé quand un damné errant a traversé mon jardin de plantes sacrées, et qu'avec tout le bordel qu'il faisait il a attiré un blaireau géant, qui a tout ravagé. J'ai voulu me calmer en buttant ce connard, mais il s'était fait mordre et était déjà crevé, commençait même à fondre en terre. Je suis rentrée maison, ma réserve de camomille était vide. Tu vois l'idée. Déjà à ce moment je me serais bien défoulée sur n'importe quoi ou qui, mais, évidemment j'étais seule à la maison, avec plusieurs mois de boulot à recommencer à cause de ce blaireau. Du coup je me suis dis merde, je me casse, je prends mon âne et je monte voir Victor me changer les idées. Évidemment ce con d'âne était pas d'accord, aujourd'hui il voulait juste rester bouffer son foin avec son ânesse, on a fini par s'engueuler, je lui ai dit qu'un jour si il continuait à rester faire son connard dans l'étable je finirai par les bouffer lui et son ânesse de merde, il m'a répondu que j'en serai jamais capable, que j'étais un démon pourri même pas capable de tuer un humain. Là je commençais vraiment à être sur les nerfs, je suis partie à pieds en passant chez Ohd chercher quelques kilo de café. Il ne lui en restait que trois pauvres paquets, mais bon c'était déjà ça. Je suis arrivée chez Vic, finalement, quand même, où on a fini par jouer à la belote. Évidemment, il a fallu que je tombe à jouer avec ce boulet de Lb incapable de se souvenir de quelle carte il est en train de jouer, du coup on a perdu toutes les manches ou presque mais putain quel con, bon bricolo hein mais rien dans la tête avec tout le café qu'il descend en permanence, bref on a bu plein de café et on a perdu et après il m'a collé lourdement en me parlant de table basse et de fluides, j'ai voulu lui coller un pain mais il a esquivé et il s'est cassé en se foutant de ma gueule. Il ne restait plus de café, j'avais la haine, vraiment envie de taper sur un truc, de me défouler, je tremblais toute seule, puis j'ai trébuché sur le putain de chat qui m'a gueulé un miaulement de bâtard. Là je sais pas trop ce qui s'est passé, mais j'ai perdu le contrôle je pense quelques minutes, puisque je me souviens juste me retrouver confortablement allongée dans la grange. J'y suis restée un peu avant de rentrer dormir sur un bon plancher. Puis Krh m'a réveillé, m'a raconté l'histoire de la fille morte, et voila. Quel mystère.

Témoignage de Lb, démon, artisan.
C'est une belle table basse, hein ? Ma fierté. Deux vis par os, ni plus, ni moins. Elle ne bouge plus. Plus maintenant. C'était un homme, c'est une table. La différence ? Des vis, des vis, dans ses os, des petites vis d'acier. Acier et os. Très solide. Elle peut remuer, et soupirer, mais elle ne se renversera pas, non, car ma science le lui interdit. La science, le savoir, hein ? Le savoir cultivé. Qui jouait hier soir ? Aux cartes, au couteau ou à la chevrette ? Ils ne voient rien mais on les voit. Ils ont joué aux cartes avec moi et ils disent qu'ils ont gagnés car leurs cartes étaient dans le bon ordre. Des suites de symboles, ils y croient, les symboles ne bougent pas, ils ne vivent que dans leurs têtes. La table est vivante mais ils ne la voient plus. Ils croient en leur esprit et ils ne croient pas en l'énergie qui les porte. Cet homme ne m'a pas vu car il ne voyait que cette fille et son beau corps blessé, il n'a vu que ses fantasmes et il n'a pas vu la fille qui pleurait sous ses mains. Il bandait tant de vivre en son esprit qu'il n'a pas vu mon regard. La fille l'a vu. Ma semblable a passé la soirée seule avec sa colère, et elle pensait être avec les autres, ses yeux et ses mains n'ont rien saisis. Elle a cru me voir mais elle n'a vu que sa colère toute contre elle.
Le chevrier ne m'a pas vu dans le noir où il ne pouvait sentir, mais sa chèvre bientôt-morte m'a salué, et le bientôt-ragoût qui embaume la cuisine sent encore de ma présence. L'homme ne savais rien et n'a rien cherché, après les cartes où étaient les autres ? Celle-là collée contre le corps de l'autre, sans même quitter ses pensées. Qui tournent, qui l'enferment, et elle ne se débat pas. Elle en veut plus, elle croit savoir, elle erre et elle est seule, avec ses idées, prisonnière aveugle dans ses passions. L'autre m'a vu, lui, il a ri. Lui, le démon qui étreignait la femme en riant, l'hypnotisant de paroles, la maîtrisant de ses mots. Il navigue, il voit plus loin, il sait ! Où est sa haine ? Cachée, enfouie, un temps assouvie. Pur et droit dans son horreur. Oui ! Car c'est lui ! C'est lui qui a tué. Pas moi. Lui !

Témoignage de Pinpin, chat, anthropologue.
MWAAHARAWWAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAHNHYAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAARAAAA
WMAAAHHHAA
MWRAO MIAAAAAW
MROW
MWAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAÄÄAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAÄÄÄÄAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAHHHA AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAHHAHHAAAAHAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAHAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAHHHHMRÖW


Chacun convint que tout ça ne faisait pas beaucoup avancer l'enquête. Alors on décida d'employer une méthode plus radicale.

= commentaires =

Lapinchien

tw
Pute : 8
à mort
    le 11/08/2016 à 01:04:36
tout aussi fendard que le premier volet. Un autre texte est en cours d'écriture. Prions pour que ce ne soit pas le dernier que nous nous refile la douve cosmogonique incognito. Du grand Soma.
Clacker... T-t-t-ts.
    le 16/08/2016 à 23:32:42
Les "putain" à répétition me gavent, parce que c'est putain d'américain, et que ces putains de connards me gavent putain de franchement.
L'introduction est dispensable. J'aime bien la scienti-comparaison du deuxième paragraphe, pour ce qui est des étoiles qui brûlent plus vite que d'autres, tout ça métaphorisé avec nos petits êtres humains. Avec un renversement, c'est-à-dire que généralement on compare les rock stars avec les étoiles bleus, qui consomment en relativement très peu de temps toute leur énergie (comme une flamme intense et donc bleue), on les compare donc aux autres étoiles qui sont rouges, et qui économisent leurs ressources. Là, c'est l'inverse, et je trouve ça cool.
Il y a des passages foutrement abscons, genre "La cosmogonie en resta là, ils profitèrent encore un peu de l'air calme, au silence à peine coupés des cris et des rires venant de la maison. Du jardin aux fleurs que l'absence de saisons faisait fleurir n'importe quand et aux aromates qui avaient pris un discret arrière goût de sang venaient de douces senteurs qui lui rappelait ses soirées d'en Haut, et seules les étoiles qui mourraient - et certains cris lointains - le ramenaient dans cet endroit infini où, depuis le début des temps, les démons attendaient."
Je suis désolé, ça, ce n'est pas compréhensible au premier coup d'oeil. Il faut interpréter salement avant d'avoir un avant goût de ce que ça peut signifier. Et c'est salé.
Les dialogues sont dénués d'intérêt, avec des noms et des situations qui sortent du chapeau de mon cul.
La suite de témoignages est chiante, simplement. Les démons ne sont pas droles, ils sont très humains et l'humour ne prend pas (pour moi, du moins).

A part ça, j'ai bien aimé, mais y a des détails qui m'ont donné de l'urticaire.
La fin est pourrave de chez pourrave, mais je vais pas chipoter parce que moi non plus je sais jamais comment terminer convenablement un récit.
Lapinchien

tw
Pute : 8
à mort
    le 17/08/2016 à 00:16:06
j'ai l'impression que tu n'as pas lu la première partie sinon tout ce qui semble 'sorti du chapeau' ferait sens.
Clacker... T-t-t-ts.
    le 17/08/2016 à 20:43:56
Effectivement, j'ai déconné là...
En plus le texte est vraiment bon. J'avais envie de détruire quelque chose, 'faut croire.
Muscadet

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Pute : 0
    le 01/09/2016 à 23:53:33
Je suis très déçu. Et je n'attendrai pas le troisième volet, même s'il n'est pas exclu que je le lise.
Et je rejoins en partie en Clacker.

Autant la première partie m'avait charmé par sa cohérence et sa précision, son voyage, autant ici on retombe dans une subversion pseudo-humoristique, la private joke d'une autre époque, comme le laissait présager la table basse.
Alors je modère un peu : l'univers est toujours là, la cosmogonie, même si c'est amené de manière improbable, à la limite pourquoi pas.

Mais les dialogues et les témoignages... Cette nonchalance risible, ces scènes sales mais complètement gratuites, ces démons et ces humains poseurs qui an(nihil)ent tout le travail d'immersion, aux personnalités sans profondeur et qui ridiculisent finalement le texte jusqu'à le rendre pénible : tout cela est criminel.

Heureusement qu'il sait écrire, cet anonyme. C'est la seule chose qui le sauve ici.

J'ai la nette sensation d'avoir été appâté par la première partie pour me faire violer par la seconde. Scandaleux.

1/5 TripAdvisor
Piège à touristes.
Muscadet

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Pute : 0
    le 02/09/2016 à 04:50:39
J'ajoute à ce commentaire de révolte que c'est précisément sur ce type de textes que l'on voit resurgir la mauvaise foi clientéliste de notre gardien de phare national LC.

Vous ne me ferez pas croire, ni à Clacker apparemment, qu'il est possible d'un point de vue cérébral d'apprécier de manière équitable la première et la seconde partie de ce texte.
C'est le jour et la nuit.
Lapinchien

tw
Pute : 8
à mort
    le 02/09/2016 à 09:27:39
étonnamment, d'un point de vue cérébral voire émotionnel, j'apprécie de manière équitable le jour et la nuit, chacun pour ses raisons qui lui sont propres. L’hétérogénéité narrative des deux textes n'est pas qualitative et sert à créer des ruptures dans le continuum storytellique probablement au service de la troisième partie que j'attends avec impatience. Cet univers est intrigant et envoûtant, de nombreuses questions ont été soulevées subtilement égrainées sur les deux premières parties et j'espère qu'il y aura des réponses dans la conclusion ou tout du moins une claque dans la gueule puisque les twists c'est de la daube à ce qu'il parait. En outre, le seul phare dont je suis gardien, et l'UNESCO est en train de mener une grande étude comparative pour déclasser celui d'Alexandrie, c'est ma bite.
Muscadet

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Pute : 0
    le 02/09/2016 à 09:55:46
Inutile de te débattre, je t'ai pris sur le fait l'ampoule à la main.

http://www.ac-grenoble.fr/ecole/74/pontchy-dessy.bonneville/IMG/jpg/CIMG2043.jpg

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