Elle est secouée d'un toussotement étouffé et humide, comme le son d'un ballon plein d'eau tout niqué par un chien. L'appartement est en train de se fissurer de plus belle et les moisissures mangent les insectes. Cependant, l'acoustique est optimale, et chaque fois qu'un abruti de musicien se pointe chez elle pour lui jouer un requiem, on jurerait l'ensemble Matheus au complet. Elle rêvasse un moment en titillant sa pneumonie, frotte son sexe contre une buche de bois, se tape des bouffées de chaleur à tuer un nourrisson, et tente de capter le signal télépathique de J.J., en vain.
Elle finit par se lever et active le nichon du percolateur et le téton se met à verser du café jaune. Elle y colle ses lèvres ourlées et violettes de tuberculeuse et se gave du précieux liquide excitant. Puis elle déjeune de deux quartiers de pomme de terre, en regardant avec ses jumelles par la fenêtre.
Elle voit les même blattes du crétacé qu'hier chez le voisin, qui n'a pas bougé de son lit et qui a bien dégonflé depuis vingt-quatre heures. Sa femme se masturbe toujours avec le même sabre d'abati et se confectionne des césariennes.
Cassandre pose les jumelles et décide de se colorier les ongles de pieds avec un stylo à bille noir quand un abruti de musicien frappe à la porte. Elle prend le temps d'allumer une cigarette, d'aller vomir dans son bac à linge sale et elle ouvre la porte. L'abruti de musicien s'installe avec son thérémine et commence à lui chanter la complainte de Cassandre :
"Pourquoi donc suis-je nègre ? Oh ! pourquoi suis-je noir ?
Lorsque Dieu m'eut jeté dans le sein de ma mère,
Pourquoi la mort jalouse et si prompte au devoir
N'accourut-elle pas l'enlever de la terre ?", mais il est rapidement éconduit par une quinte de toux étouffée et humide de Cassandre qui ne lui laisse chanter aucun mot de plus. Il s'en va, la bite et le thérémine sous le bras.
Des orages thermoacoustiques emplissent l'air de Mandeville, et la luminosité vire au vert glauque, ce qui crée une agitation certaine chez les populations d'insectes humanoïdes des sous-couches, les nécrovores, et les poussent à remonter vers les quartiers de la ville haute. Cassandre sait qu'il ne sera pas évident de se procurer du Séminal, les nécrovores en raffolent. Alors elle fouille dans sa garde-robe et en extrait une longue veste en cuir bleu trois quart, elle l'enfile et se frotte contre les murs mousseux de moisissures, puis elle tente une nouvelle fois de capter le signal télépathique de J.J., un doigt dans le sexe. Son clitoris se met à vibrer, elle est en communication.
"-Rejoins-moi à l'intersection de la 11e et du four crématoire de Colfax.
-...mmmmmhouiii...
-Porte quelque chose de discret. Veste bleue, talons aiguilles, maquillage outrageux.
-...ouuui... ouuuui..!
-Et laisse pas l'un de ces putains de nécrovores te courir au cul.
-Oh naaan..!
Il a raccroché, elle est toute mouillée. Elle va donc à la salle de bain se dessiner des yeux de pandas et enfile en vitesse des talons aiguilles qui lui donnent une démarche de jument défoncée à la kétamine. Elle s'apprête à boucler la porte quand elle décide finalement de rentrer et de fouiller dans le foutoir de son appartement. Elle finit par trouver un petit flacon contenant un reste de Séminal qu'elle planque dans une poche intérieure de sa veste, tout contre son sein nu.
Mandeville est en pleine ébullition à cette heure, un épais brouillard crée des taches de couleurs épatées à chaque néon, la pluie chaude n'épargne rien ni personne mais les groupes de Jazz post-parallaxe continuent à se démener sur les trottoirs alors que leurs instruments en bois blanc gonflent et craquent sous l'humidité. Le regard passe d'un bâtiment à un autre, glisse sur les murs comme sur une peau morte et chaque lieu porte sa singularité en lui, comme un organe posé là qui n'a rien à voir avec le corps entier.
Cassandre marche aussi vite que le permettent ses talons, mains dans les poches de sa veste douloureusement serrée sur les hanches, et l'humidité ambiante lui donne l'impression de se liquéfier à chaque pas, en plus du regard insistant et lubrique de chaque passant qu'elle croise, homme, femme ou enfant. Après avoir manqué quatre fois de se fouler une cheville et de déchirer sa veste, elle débouche sur une ruelle particulièrement sombre qu'elle doit traverser si elle veut arriver à temps à son rendez-vous avec J.J. Elle hésite un instant, son instinct essaie de lui dire quelque chose, alors elle défait un bouton de sa veste et se colle un doigt dans le sexe tout en avançant lentement, aux aguets. Voilà qu'une ombre se met à bouger, et bientôt apparaissent deux petites fentes scintillantes et acérées. Cassandre se fige, toute serrée dans sa veste. La créature s'approche, doucement, une patte après l'autre, et laisse entrevoir sa face grise, poilue et visqueuse. Elle ouvre la gueule et du fond de sa gorge se déploie lentement un bâton de cinquante centimètres, tout frémissant et tout fumant avec au bout un petit capuchon rouge taillé en pointe : un beau sexe adulte de nécrovore.
La panique assaille Cassandre, ses jambes nues ne la soutiennent plus, elle tombe à genoux et son maquillage de panda coule et lui dessine des peintures de guerre. Le nécrovore approche sa colossale érection de la jeune fille et s'apprête à lui faire un sérieux deep throat, en toute sincérité sous la pluie chaude et battante de cette nuit Louisiannaise. Sans doute Cassandre pleure-t-elle, difficile à dire, le maquillage, la pluie, la ruelle sombre ne permettent pas de recueillir suffisamment d'informations visuelles sur son état d'esprit. Toujours est-il qu'elle se retrouve à manger trente bons centimètres de queue de nécrovore, et qu'elle gémit parce que l'oesophage humain n'est pas prévu à cet effet.
Ca dure longtemps, sans doute une éternité en ce qui la concerne, lorsque lui vient une idée. Elle déboutonne sa veste, laissant apparaître un ventre laiteux et deux seins qui pointent et fouille dans sa porche intérieure, lentement. Elle en sort le petit flacon, le débouche avec précaution, et le nécrovore sursaute soudainement. Cassandre jette le flacon le plus loin possible et la créature se jette à sa suite, retirant sans précaution aucune son épée de cinquante centimètres de la gorge de la jeune fille. Cassandre est prise d'un sursaut gastrique et prend une profonde respiration. Encore quelques minutes et elle s'effondrait, asphyxiée. Elle trouve la force de se lever et de courir à se casser les chevilles dans la ruelle. Elle débouche sur une intersection éclairée et apperçoit J.J. au coin de la 11e et du four créamatoire de Colfax, et fonce dans ses bras.
"-Qu'est-ce que tu fous ? Ca fait un quart d'heure que je t'attends.
-Un nécro... un nécro..."
J.J. ne met pas longtemps à comprendre, il relève un peu Cassandre en prenant soin de lui peloter les seins et ils entrent rapidement dans un bâtiment crasseux.
J.J. est en train de préparer le Séminal sur un réchaud de camping. Il a installé Cassandre dans une couverture trop petite qui, au choix, lui couvre soit les seins soit le sexe. Elle frissonne, toute recroquevillée, et son aspect la rend franchement pathétique. On jurerait un renardeau tout juste abandonné et grossièrement maquillé qui a pris l'eau.
J.J. prend le bras du renardeau et lui noue une sangle médicale juste au dessus du coude, puis il se saisit d'une seringue et, à l'aide d'un coton, y fait entrer tout le Séminal par effet de succion. Puis il l'injecte dans le bras de Cassandre, directement dans une veine.
La petite se laisse tomber à la renverse, et J.J. lui monte dessus et balance la serviette à l'autre coin de la pièce. Il serpente jusqu'à son oreille et lui glisse, tout en retirant sa ceinture :
"-Hé, tu sais que le Séminal... Ben c'est de l'ocytocine... Mais pas chez les humains... C'est de l'ocytocine de nécrovore... Autrement dit... C'est des putains de saloperies de phéromones d'insecte."
C'est alors que J.J. sort de son pantalon son sexe noir de cinquante centimètres, tout rutilant et fumant avec au bout un bonbon rouge taillé en pointe.
Ce mollusque de chien-lézard colle son museau gluant et téléscopique sur sa cuisse blanche. Il l'a poursuivie toute la nuit, et voilà qu'il la rattrape enfin, alors qu'elle trébuche sur un chanteur de blues à demi avalé par un marais de Louisiane.
"My feet ar' so 'eavy
So is my 'ead
I wis' I was a baby
I wis' I was dead", s'échappe de son orifice dépourvu de dents, et il lui tient la cheville et se met à lui lécher ses pâles orteils sans s'arrêter de chanter tandis que le mollusque de chien-lézard plante tout doucement ses dents molles dans la chair de sa jambe. Ca dure comme ça longtemps, et elle finit par s'endormir.
"My feet ar' so 'eavy
So is my 'ead
I wis' I was a baby
I wis' I was dead", s'échappe de son orifice dépourvu de dents, et il lui tient la cheville et se met à lui lécher ses pâles orteils sans s'arrêter de chanter tandis que le mollusque de chien-lézard plante tout doucement ses dents molles dans la chair de sa jambe. Ca dure comme ça longtemps, et elle finit par s'endormir.
= ajouter un commentaire =
Les commentaires sont réservés aux utilisateurs connectés.
= commentaires =
Clacker se réclame être le premier à avoir introduit, jusqu'au trognon, Burroughs sur la Zone. Il s'en mordait les doigts il y encore quelques jours. Quand soudain, tout bascula.
Dieu me garde d'introduire qui que ce soit à part ma cousine.
Je ne porte pas plus d'intérêt que ça à ce texte, mais je tiens quand même à dire que je ne désirais pas du tout faire de la "trollitérature". Je voulais l'écrire ainsi, et nous ne nous sommes pas concertés. Désolé, je ne veux pas briser ce mythe pathétiquement génial, je trouve ça juste un peu dommage que tout ça s'assimile à un pseudo-mouvement qui n'a pris naissance que dans la tête d'un administrateur du site. Je suis conscient de mon absence certaine de talent, mais je déteste me faire assimiler, liquéfier, malotruiser sans mon consentement. Mais la chose s'est ainsi faite, je ne peux plus faire marche arrière.
Etant conscient bien sûr que toute chose est reliée à toute autre par pure intrication absurdement quantique, je ne peux que me plier à la force de l'onde, comme je pourrais m'écraser face à une vague de 10 mètres, parce que je ne sais pas surfer. Entendez mes sincères désespérances envers tout ce qui existe et tout ce qui est probable, selon la loi des probabilités qui régit peut-être le monde, à combien de pourcent ? Je sais que je ne sais pas.
Ce sont mes paroles avant assimilation finale et insémination terminale.
c'est pourtant l'unique intention éditoriale qui me pousse à publier des textes liés de près ou de loin au cut up de Burroughs sur la Zone qui finissent la plus part du temps dans la catégorie "Pangolin et Licornes".
"Et pourtant, je n'ai pas utilisé de cut up !"
Galilée
la vérité n'existe pas, il n'y a que des storytellings en compétition Darwinienne.
Je ne sais pas si dès le début tu avais l'idée de faire une "série" ou une suite à l'histoire, mais j'ai trouvé ce texte moins bon que les précédents. J'ai eu un peu de mal avec le bouton dans le clito et Cassandre me parait un peu moins charismatique. On a l'impression que le coup du nichon qui coule et les passages sexuellement maladroits :"Toujours est-il qu'elle se retrouve à manger trente bons centimètres de queue de nécrovore" ne sont là que pour illustrer le passage et ne me provoque qu'un "bof" pour ce texte.
Effectivement, j'ai écrit ce texte sans réfléchir à une suite. Sans réfléchir du tout même. Ca se rapprochait plus de l'écriture automatique qu'autre chose.
D'ailleurs, si j'avais la possibilité de le remanier ainsi que le deuxième, je m'en priverais pas.
Je suis là.
Bien, l'intro.
Sabre d'abattis, je ne connaissais pas.
Thérémine non plus. Steam-punk, très bien.
Je comprends maintenant que l'action se déroule pendant Katrina, une contextualisation éclairante.
Il y a des descriptions de travelling comme dans la suite de la série, je suspecte une adaptation sur grand écran à venir.
Apparition d'un renardeau.
Commencer par le deuxième texte ne m'a pas trop perturbé. Enfin, considérant le sujet.
Je me remets donc en ordre de marche.
Je lis que l'auteur ne porte pas d'intérêt à son texte. Je continue.
Régénéré et concentré, ça va aller beaucoup mieux qu'hier.
Je me masturbe et j'enchaîne.