Quelque part dans le Nouvel Ordre Mondial :
Les gens qu’il croisait étaient interchangeables, priaient le même Dieu.
Il était seul, avait développé un proto-langage pour communiquer avec les siens. Il bravait la loi en s’autorisant plus de quinze minutes d’introspection par jour.
Quand il était petit, il portait un genre de chandail atroce, entretemps devenu à la mode et qui avait fini par flotter fièrement au dessus des bâtiments publics. Un chaton qui fait coucou, c’était désormais le drapeau du monde entier.
On leur conseillait quotidiennement d’éviter de penser à eux-même, ou d’analyser le monde qui les entourait.
Je vais t’enculer tellement fort que même tes petits-enfants en auront mal au fesses.
- «Je vais t’enculer tellement fort que même tes petits-enfants en auront mal au fesses.»
- «Pardon citoyen ?» lui répondit la caisse automatique en prenant un accent différent à chaque lettre. Encore un vieux logiciel anti-discrimination.
- «Rien...bonne soirée» répondit-il gêné, tout en récupérant ses courses. Des fruits globaux, des légumes globaux, et de la viande synthétique «gout vintage», qui coutait un bras. Il avait entendu parler de cette très ancienne tribu dans les régions tempérées qui cultivait et élevait encore sa nourriture. De la «viande naturelle». Tarés. J’espère qu’ils les attraperont, les gars de la brigade d’assainissement. Putain de tarés... Il est où déjà ce putain de métro de merde ? Ah oui, voilà l’entrée...
Une fois dans la rame automatisée de déplacement intra-urbain, il activa dans son cerveau central la vidéo de stimulation érotiquo-ludiquo-anachronique qu’il avait «emprunté» à son neveu. «Le choix dans la date, permaculture et décroissance». Il jouit déçu, c’était la release officielle. Il aurait préféré la version contaminée, celle où le réalisateur avait synchronisé par inadvertance Encarta 2006 avec les codecs du film, permettant ainsi de voir...9 janvier : le tribunal de Lomas de Zamora, au sud de Buenos Aires condamne à des peines de prison à perpétuité les deux policiers qui tuèrent par balles Maxi... Mais ta bonne race, putain ! J’ai oublié de couper le lecteur vidéo.
Il avait omis d’interrompre la projection-intra-crânienne.
Arrivé à destination, il croisa Doris. Elle lui sourit. «Interaction insincère» lui indiqua l’harmoniseur social. Il se rappela une vieille contrepèterie, mais son AdMentalBlock fut plus rapide. «Désirez-vous une pensée constructive à la place ?» lui demanda le logiciel. Il déféqua sur un paillasson. «Choix n°1 : la récession a pris fin. Découvrez tout ce que votre compte multi-bancaire peut vous permettre de...» Il roula ensuite l’objet usuel afin d’obtenir une sarbacane de taille conséquente «Choix n°2 : la récession reprend ! Que d’économies vous allez pouvoir...» Il souffla dans son arme improvisée «Choix n°3 : OOOOOOh le petit chatin, qu’il est mignon le pe...» L’étron vint s’écraser sur le mur blanc de la résidence. Il l'étala, dessinant la carte d’un monde incertain. «Un monde qui m’appartient...» Un monde qu’il n’aurait jamais pu imaginer seul.
Une fois dans son cube de repos personnel, il entreprit de cuisiner ses quelques rations.
Avant sa session de sommeil revivifiant (option Activité professionnelle productive), Sensitiv Cortex© lui proposa 10 minutes de propagande libertaire «car être anti-système au sein du système et ce, sans même vouloir le renverser, c’est aussi le valider !» lui chantonna joyeusement le logiciel interne. Il refusa et enfonça son index à l’arrière de son crâne. Cela ne servait à rien mais il aimait se croire encore maître de quelque chose. Le compte à rebours s’enclencha et arrivé à zéro, il s’endormit.
«Si le burger domac et le boeuf de kobé ressortent dans le même état en bout de chaine, c’est bien qu’il y a une raison, et ça en dit beaucoup sur ce qu’on doit penser du raffinement.» Ben Affleck
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Feuilleton à lire de préférence à la plage. à la version papier antiécologique, à la version numérique Epub sur Kindle affront à l'intelligence humaine, préférez la version intraveineuse en seringues 125mg/cl.
Bien plaisant ce petit texte.
J'espère que c'est un vrai feuilleton et qu'il y aura une suite. Je n'avais pas envisagé qu'il s'agissait en effet d'un seul texte (j'ai même créé un logo pour la série et une rubrique)
Il est vrai que ce symbole est ambigu (I) J'avais pensé que c'était un 1 en chiffres latins entre parenthèses mais il se peut aussi qu'il s'agisse d'ASCII art et dans ce cas c'est peut être une raie au milieu de deux énormes fesses. J'avoue cependant être troublé car d'ordinaire au I on préfère souvent le Y.
bullshits mis à part, vivement la suite, parce qu'un univers dans la lignée de P.K.Dick et en plus complètement déjanté, remis au goût du jour, c'est rare et on a tellement besoin qu'il soit développé et exploré dans tous ses recoins, qu'on ne le sait pas encore.
Ah ben voilà de la zone zonarde littérature, je reste un peu : "elle est où la têtête, il est où le culcul ?" mais c'est presque une contrainte aussi ancrée que la largeur des marges ou la place du titre. C'est peut-être même un logiciel zonard qui enlève le début et la fin des textes si ça se trouve...
Je poursuis.
Maintenant que j'ai terminé, je trouve que l'apport des épisodes III et IV est dispensable au fond. Ils rendent l'ensemble trop consensuel alors que l'oeuvre ne le mérite pas. Les deux premiers volets font le travail, la suite relève de la gourmandise scénaristique.
Et ce n'est pas joli-joli, de faire ça.