Un gars un peu relou qui pestait contre soit disant la bande de facho-spécistes qui entretenait fallacieusement la confusion des clients de la cantine, faisait la queue pour être servi avant eux et il s'agissait d'Aymeric Caron qui voulait bien s'assurer que toute la bouffe qui lui était offerte, pour les 5 centimes qu'il avait bien voulu en payer, ne contenait pas des produits issus de l'élevage d'animaux n'ayant pas donné leur accord préalable pour être exploités en tant que ressources ou producteurs esclaves de ressources alimentaires puisque d'ailleurs il insista pour analyser la bouffe au spectromètre de masse, exigea qu'on lui montre tous les labels et certificats de traçabilité de la moindre nanomolécule faisant officiellement ou non partie des ingrédients de la bouillie du buffet à volonté. Un jeune nigaud un peu ivre le poussa de l'épaule, il arrivait, son assiette en main et la doléance au bec, car il venait, à l'instant, de trouver un œil dans le pot-au-feu vegan. "C'est l’œil de Pétunia", se félicita le cuistot, "on l'a cherché partout… mais… il est tout mâchouillé !"
En apprenant cette nouvelle, Aymeric Caron eut un haut le cœur, puis il se retourna à droite et aperçu un logo Spanghero, un fer à cheval et un sigle biohazard sur un gros sac où il y avait l'inscription "trucs bouffables en vrac", ce qui lui provoqua un second haut le cœur, mais ce glorieux journaliste de guerre qui avait couvert de nombreux conflits en avait vu d'autres, des vertes, des pas mûres, des humains tellement affamés lors du siège de Malaya en Syrie où il faisait un photoreportage sur la thématique "les selfies et l'état islamique sont-ils compatibles ?", qu'ils avaient mangé tous les animaux domestiques, et avaient choppé d'immondes intoxications en ingurgitant toutes les feuilles des arbres, où il avait vu des Hommes affamés manger leurs enfants alors qu'ils n'étaient même pas morts et qu'il souffraient d'horribles intoxications après avoir ingéré de grandes doses d'amiante, et il se remémorait bien la trace des petites dents des tous petits gamins sur toutes les grosses dalles des bâtiments en ruines, éventrés par les bombes chimiques de Bashar Al Assad, alors il se reteint de vomir en hommage à leur mémoire. Puis Aymeric Caron se tourna à droite et se retrouva face à face avec Eric Zemmour, et cette vision insupportable, choquante, brutale, de près puisque probablement ils avaient respiré le même air, ce petit regard vicieux qui s'insinua par ses nerfs optiques circulant le long de ses axones fibreux et atrophiés par 20 ans de veganisme militant jusqu’au-boutiste et les carences protéiniques associées, jusqu'au plus profond de sa vésicule biliaire sécrétant de la chlorophylle à présent, déclenchèrent quelques spasmes puis très vite Aymeric Carron déversa le contenu de son estomac dans le col de celui qui comme lui était un ex présentateur de l'émission "On n'est pas couché" présentée par Laurent Ruquier. Puis cet incommensurable effort métabolique effectué, essoufflé, il bascula automatiquement en mode photosynthèse.
Jack, qui ne se séparait pour ainsi dire jamais de son nécessaire de petit chimiste, dégaina alors un bistouri à cran d'arrêt et un microscope de poche, ainsi que quelques lamelles transparentes afin de procéder à la vivisection de l'impétueux chroniqueur à cheveux longs. Finkielkraut et Zemmour usèrent d'armes non-létales capables d'éborgner un rhinocéros ou un syndicaliste à plus de vingt mètres pour dégager un espace suffisant et Jack en profita pour déplier une chaise de camping récupérée sur le tournage de Walking Dead. Sur l'envers du dossier en toile blanche, on pouvait lire Norman Reedus, ce qui lui valut des cris béats d'admiration chez les plus jeunes des manifestants. N'écoutant que son professionnalisme et son goût immodéré pour la science, il s'empressa de retirer un par un les organes d'Aymeric Caron, avant de les disposer par ordre de taille décroissante sur une écharpe bolivienne dérobée à Manu Chao. Lorsqu'il atteignit le coeur, Véronique Genest tourna de l’œil. Lorsqu'il déroula les huit mètres d'intestins, l'odeur puissante et ambrée ne tarda pas à la réveiller dans un carnaval de vomissements, arrachant ainsi de vilaines paroles misogynes à Eric Zemmour qui, dans l'euphorie des éclaboussures, tweeta frénétiquement des photos de l'actrice barbouillée de gerbe. Finkielkraut observait la scène de son regard le plus critique.
"Bigre", hurla-t-il à la face du monde qui ne s'en est toujours pas remis, " n'avons-nous pas mieux à faire que de désosser un végétarien ?"
- "Techniquement, on peut pas parler de désosser", dit Zemmour, de sa petite voix de serpent enroué.
- "Ben non", dit Jack. "J'ai pas encore touché aux os."
- "Beurp", répéta Genest.
- "Et si on mangeait ?"
- "Ah oui, tiens, au bout d'un moment, ça creuse."
- "Beurp."
Ce fut le plus copieux repas à l’œil auquel nos compères n'avaient été invités, et tout en continuant de galvaniser les foules de leurs slogans fédérateurs, plusieurs cohortes se mirent en marche vers les appartements de Manuel Valls.
Sans vraiment s'en apercevoir Jack, Véronique Genest, Alain Finkielkraut et Eric Zemmour cassaient des gueules sans rencontrer de résistance particulière et se dirigeaient tranquilou vers le stand cantine à prix libre. A les observer ainsi par en-dessous, Jack se dit qu'ils lui rappelaient les Bee Gees en 1975, à la sortie de leur premier tube disco, "You should be dancing", récemment recyclé en générique de fin pour Moi, moche et méchant, film de prédilection de Jack qui se prit alors à rêver d'un autographe des frères Gibb.
= ajouter un commentaire =
Les commentaires sont réservés aux utilisateurs connectés.
= commentaires =
https://www.youtube.com/watch?v=pdz8bRtwXuc