LA ZONE -

Lieu commun n°18 : Chuis pas dispo

Le 26/03/2016
par Mill
[illustration] Haussement d'épaules, sourcils qui froncent, nez qui retrousse et lèvres qui pincent - et le refus qui pointe à la lisière du mouais-peut-être, n'insiste pas, laisse-moi le temps, je reprends mon souffle et j'arrive.
    « Comprends-moi », se reprend-il ou elle, esquissant l'ombre d'un sourire pâle, « je me ressource, j'étais perdu(e), j'avais paumé mon planisphère, mon agenda, ma boussole, égaré le plan du tram, du bus et du métro, effacé les souvenirs qui marquaient mon ancrage dans ce récit inachevé dont je singe les personnages - tous sans exception - en m'efforçant d'ignorer la voix intérieure qui narre sans discontinuer. Elle ne se tait jamais, cette pute. Elle chemine entre les virgules et pérore, bavasse quand elle croit raconter. Elle ne m'accompagne pas - elle me dévore ».
    J'entends, je pige, je veux bien valider. J'objecte pourtant. Mes yeux guignent vers l'avenir et je marche en avant, les semelles défoncées, sans doute, mais j'ai l'allure lente et assurée.
    Il ou elle grimace une parodie paresseuse de quelque chose d'immonde qui se voudrait sourire. J'y vois de la haine de soi et un crachat pour ma gueule. Un jet de bile acide pour dissoudre mes traits. J'éponge - encore une fois, j'éponge.
    « Et si au moins je suivais, si je me rattachais au wagon, si mes roues défilaient sur ces rails amovibles. »
    Je barre « amovibles » et je propose « statiques ». Il ou elle réfléchit trois secondes, secoue la tête, s'insurge en silence, je rétablis sa version à l'encre sympathique. J'y reviendrai plus tard, si le temps l'autorise et si l'impulsion subsiste.
    « Je dois m'agenouiller quelque part, pencher le corps en avant, ouvrir ma gorge en grand, étirer les coins de ma bouche et vomir les bons moments. Plus que les mauvais, ils s'agrippent à mes membres, les lestent de rancoeur, les enduisent d'une mélasse qui ralentit mes gestes, le débit de ma voix, le train de banlieue de mes réflexions intimes. Je dois m'asseoir ensuite, éviter de bouger. Pas un muscle, un soupir, un tressautement. Je me veux minéral(e), figé(e) dans cette salle d'attente où les revues se ressemblent toutes et où le médecin de famille ne vient jamais me chercher. »
    Je ne dis rien d'intéressant, je ne rebondis pas, ne relance rien. L'histoire du spectateur qui veut voir la fin du film a cessé de m'intéresser depuis trop de temps pour que j'y revienne une fois de plus.
    Il ou elle se fout de mes tympans. Ses paroles se fondront quelque part, dans un mur, dans la terre, dans un voile de vapeur dont il ou elle s'entoure en guise de paravent.
    « Je ne suis là pour personne. Ma vie me dépasse et me piège à chaque instant. Je ne désire plus rien et mes rêves ressemblent à des caveaux peuplés de fichiers à détruire. Je dois lire et trier, et ta seule présence m'enlise. »
    Que la mort te croque en silence. J'ai d'autres vies à explorer.
    
    

= commentaires =

Curare-

Pute : 0
    le 26/03/2016 à 19:09:59
Non sans (non-sens) aucun doute ?
J'ai toujours douté d'Allis
C'était 1 homme 1 femme ?
Avec le recul
J'en ai rencontré des humains disjonctés
Qui se faufilaient sur la toile
avec leur esprit
en délaissant leur corps
Mais 1 femme ne dit pas 'pute'
elle dirait plutôt putain
1 homme c'est pudique -
Encore 1 histoire de coloscopie . .

Commentaire édité par Curare- le 2016-03-26 19:10:32.
Mill

lien fb
Pute : 2
    le 26/03/2016 à 20:15:44
Au-delà du fait que je ne capte pas un traître mot de ce que tu racontes, c'est quoi ce délire comme quoi les femmes ne disent pas "pute" ?
Dourak Smerdiakov

site yt
Pute : 0
ma non troppo
    le 26/03/2016 à 22:34:33
Tu ne connais pas encore Curare-, notre nouveau générateur de commentaires et d'articles semi-aléatoires ?
David

Pute : -1
Potzdam free tour    le 27/03/2016 à 19:31:00
En visitant le miroir nietzschéen de Jurassic Park où "quant tu t'aperçois que tu regardes dans l'abime, c'est qu'il y en deux qui t'arrivent dans le dos" La hauteur redevient à part égale tel un hédonisme du bon sens commun où "un tien vaut mieux que deux tu l'auras pas forcement" mais ça serait conter sans la méchante sorcière qui te rappelle que tu es chacun des sept nains, simultanément. C'est ce qu'on découvre à la fin de ce récit, juste après s'être aperçu qu'il n'était définitivement pas épique, ni trèfle, il est toutes les couleurs des fumées d'usine que la suie transfigure aux moindres lunettes des appartements en multi-propriété des âmes révolues d'un ampérage désinvolte, résolues aussi à clignoter comme le dernier clignotant de la dernière voiture sur le dernier parking du dernier supermarché.

Commentaire édité par David le 2016-03-27 19:31:41.
Curare-

Pute : 0
    le 28/03/2016 à 12:14:03
Mill
'j'essuie donc je panse '

Je suis la belle zébute
perchée sur la butte
du mont Zonard -

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