— Y’avait toute une chaîne de glaciers ici, avant ! Allez quoi, vous foutez pas de ma gueule. Je sais bien qu’ils étaient là…
— Mais Michel, ça va pas non ?
— Celui qui les a pris, il les remet tout de suite. Je vais sortir deux minutes et quand je reviens…
— Michel, tu te calmes ! Personne ne vole les glaciers dans cette boite. Ils sont surement tombés derrière ton bureau.
— Ah oui… Au temps pour moi, ils sont là.
— De toute façon, c’est à cause des usines. Ils mettent des usines partout et puis voilà.
— Voilà quoi ?
— Ben le réchauffement, là... Les hivers de suceurs de pines. Daesh. La cigarette électronique.
— Les usines ?
— Bingo.
— Mais de quoi tu parles, putain de ta race ? Depuis quand t’as pas vu une nouvelle usine sortir du sol ? Tu connais l’état actuel du secteur industriel ? Tu veux que je t’emmène à Merlebach, avec moi ?
— Tu as grandi en Lorraine ?
— Oui…
— Mon Dieu. Je suis désolé, je n’aurais jamais du… SI j’avais su…
— Ce n’est rien. Mais à l’oreille, je peux te dire que tu ne sais pas placer les accents circonflexes et ça me fout en l’air car je pensais que tu étais un ami…
— Mais c’est bientöt fini tout ça, au cul la ponctuation !
— Comme les glaciers…
— Michel ! Va te tuer quelque part, je t’en prie.
— Non mais tout ce que je dis, c’est que…
— Regardez, il pleut.
— Mais pourtant… Je ne comprends pas. Ils ont dit hier soir que les mouvements anticycloniques laissaient présager un temps ensoleillé en dessous d’une diagonale Brest/Lyon…
— Pour ou contre les essuie-glaces automatiques ? Allez, soyez francs…
— Contre.
— Contre.
— Contre.
— Pour.
— Equinoxe.
— Je voudrais mourir.
— Pour, si ta bagnole est allemande. Sinon, contre.
— Non mais quand même, vous vous souvenez de ce petit bruit que ça fait ? Comme un crissement ? Quand on marche avec des bottes sur la neige fraîche ? Vous voyez pas ?
— Sylviane, écoute moi bien... Tu places tes accents circonflexes à la perfection mais je vais devoir te demander de prendre un taxi, te rendre au centre hospitalier le plus proche et demander le professeur Jacquemine afin qu’il suture sans aucune forme d’anesthésie ces deux grosses lèvres de connasse nostalgique que tu persistes à agiter devant nous alors que c’est pas la question, le bruit de la neige, sale pute !
Troublant, assurément. Les enjeux climatiques ne cessent d’alimenter la névrose et, parallèlement, d’encourager une certaine forme de lien social. Cet état des lieux n’est pas seulement parisien car en effet, nos régions ont du talent et il semblerait que la montagne, ça vous gagne. Pour autant, si l’homme blanc commande beaucoup de bois de chauffage, l’indien saura-t-il en tirer les conclusions qui s’imposent ? Lorsqu’elle chantait « Comme un ouragan », Stéphanie de Monaco essayait-elle de nous dire autre chose ? Les essuie-glaces automatiques sont-ils responsables de la paresse intellectuelle qui semble avoir frappé le vieux continent ? Les frères Kouachi ont-ils agi seuls ? Vraiment ? Et pourquoi n’a-t-il pas plu, ce jour-là ?
LA ZONE -
Observation du ciel, anticipation des données climatologiques, invention toute récente du concept de températures "ressenties"… Ces valeurs républicaines constituent aujourd’hui un vecteur très fort de lien social. Immersion au sein d’un bureau parisien climatisé :
— Je ne supporte plus la chaleur depuis ma troisième grossesse. Dès qu’on passe légèrement au-dessus des valeurs saisonnières, je me mets déjà à suer du fion comme une truie.
— Moi quand il pleut, j’ai envie de me tuer. J’ai l’impression que c’est un affront personnel. J’ai vraiment l’impression qu’on fait ça pour me pourrir la vie. Alors, oui, dans ces conditions, je préfèrerais encore mourir, je crois…
— Ok, mais les agriculteurs attendaient ça depuis longtemps, tout de même, François.
— Moi, je connais un agriculteur.
— Moi, je me souviens, les hivers quand j’étais petit, c’était pas des hivers de suceurs de pines comme maintenant. On les sentait passer.
— Oh oui, il a raison ! J’adorais le bruit que ça faisait, moi, quand on marchait dans la neige avec nos bottes en plastique.
— Sylviane, c’est pas de ça qu’on parle. Merde ! Tu fermes ta gueule tout de suite. On t’a pas sonnée, pétasse de mes couilles. Moi, j’ai grandi au bord de la mer et je peux vous dire une chose : équinoxe….
— Vous savez que si ça continue comme ça, j’ai peur que ça ne s’arrête jamais.
— Un battement d’aile de papillon à Damas peut provoquer la mort par noyade de milliers de personnes.
— Oui mais on s’en fout, putain ! Ce qui compte, ce sont les anticyclones des Açores ! ça c’est vraiment du lourd, les mecs. J’veux dire… OK : une dépression anticyclonique de plus, et on est tous bons pour la casse, ok ? Mais on va où, là ?
— On ne sait plus comment s’habiller, quoi…
— Une veste en Gore-Tex, ça passe partout, je pense.
— Non, je me suis mal exprimée : on ne sait littéralement plus s’habiller. On ne sait plus enfiler ses chaussettes ni à quoi sert un chapeau. Moi-même, je m’habille très péniblement. Je suis devenue très maladroite. Je me lève à quatre heures du matin, c’est éreintant.
— Excusez-moi mais… Y’avait des glaciers, ici, avant…
— Quoi ?
— Je ne supporte plus la chaleur depuis ma troisième grossesse. Dès qu’on passe légèrement au-dessus des valeurs saisonnières, je me mets déjà à suer du fion comme une truie.
— Moi quand il pleut, j’ai envie de me tuer. J’ai l’impression que c’est un affront personnel. J’ai vraiment l’impression qu’on fait ça pour me pourrir la vie. Alors, oui, dans ces conditions, je préfèrerais encore mourir, je crois…
— Ok, mais les agriculteurs attendaient ça depuis longtemps, tout de même, François.
— Moi, je connais un agriculteur.
— Moi, je me souviens, les hivers quand j’étais petit, c’était pas des hivers de suceurs de pines comme maintenant. On les sentait passer.
— Oh oui, il a raison ! J’adorais le bruit que ça faisait, moi, quand on marchait dans la neige avec nos bottes en plastique.
— Sylviane, c’est pas de ça qu’on parle. Merde ! Tu fermes ta gueule tout de suite. On t’a pas sonnée, pétasse de mes couilles. Moi, j’ai grandi au bord de la mer et je peux vous dire une chose : équinoxe….
— Vous savez que si ça continue comme ça, j’ai peur que ça ne s’arrête jamais.
— Un battement d’aile de papillon à Damas peut provoquer la mort par noyade de milliers de personnes.
— Oui mais on s’en fout, putain ! Ce qui compte, ce sont les anticyclones des Açores ! ça c’est vraiment du lourd, les mecs. J’veux dire… OK : une dépression anticyclonique de plus, et on est tous bons pour la casse, ok ? Mais on va où, là ?
— On ne sait plus comment s’habiller, quoi…
— Une veste en Gore-Tex, ça passe partout, je pense.
— Non, je me suis mal exprimée : on ne sait littéralement plus s’habiller. On ne sait plus enfiler ses chaussettes ni à quoi sert un chapeau. Moi-même, je m’habille très péniblement. Je suis devenue très maladroite. Je me lève à quatre heures du matin, c’est éreintant.
— Excusez-moi mais… Y’avait des glaciers, ici, avant…
— Quoi ?
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ça me donne surtout envie de relire "Passer la trentaine", excellentissime texte de CTRL X ici http://www.lazone.org/vignette/2617/
Ravi de susciter des vocations. J'avais déjà un numéro deux de prévu et va falloir que je change le titre.
VA FALLOIR QUE JE CHANGE LE TITRE !
(part en reniflant de dégoût)
Après, bon, c'est rigolo, ce côté frénétique, absurde, qui part dans tous les sens. Ca rentre pas trop dans le cadre de mon cahier des charges personnel pour la série mais on s'en tape carrément.
t'as qu'a faire 2bis ça t'évitera de renommer tous les autres
Ce qui heurte immédiatement mon âme de fragile, c'est le fascisme décomplexé et de saison de l'intro dans laquelle on moque les températures ressenties.
Alors que ce n'est rien de moins que le futur de la météorologie à visage humain. Les frileux ont parfaitement droit à leur bulletin spécifique, au même titre que les immigrés comoriens ou les fumeurs d'herbe.
La Température pour Tous, c'est donc ça le grand projet de ce CTRL-X ? Le culte taubiraste du nivellement par le mercure, un chiffre unique pour les asservir tous et dans les ténèbres les lier ?
Honte à vous, Monsieur, nous sommes en France ici, le pays où il fait le temps qu'on veut, allez donc exporter votre totalitarisme goguenard chez les babouins de Micronésie.
Putain mais quand allez vous comprendre que cette histoire de températures "ressenties" constitue un symbole parfait de ce qui plombe la société occidentale aujourd'hui ?
On ne peut plus se fier à rien, merde !
T'as un thermomètre. Bon, ça vaut ce que ça vaut, esthétiquement, mais putain c'est fiable non ? Hé bien non, connasse. Non. Maintenant, t'as toujours un toquard pour te lâcher un truc du genre "Non, mais attention, là je viens de dehors, je veux dire, je sais de quoi je parle et les 8 degrés qu'on nous a vendus, ils peuvent se les foutre au cul parce qu'avec le vent, il fait facile 2 degrés de moins, et je te parle même pas du taux d'humidité, je le sais, je viens de "dehors" alors on me la fait pas, à moi. En terme de ressenti, je dirais qu'il fait entre 7 et 15 degrés, peut-être davantage si tu votes Alain Madelin"...
Ça m'agace, à la fin ! (oui, ça m'agace)
Moi, maintenant, ce que je fais, je demande l'heure à des types dans la rue et une fois qu'ils ont bien galéré à se sortir leur portable du fion pour m'annoncer "15h36 Monsieur", je leur balance "Mouais.... Franchement, je suis un peu surpris. Ce n'est pas du tout ce que je ressentais, vous savez. Et j'ai toute confiance en mon horloge interne. Donc, allez au Diable et bonne soirée"
Juste pour faire chier ces connards avec leurs températures ressenties, leur droit de vote, leur liberté de penser, leurs allergies alimentaires, le dosage subtil (et numérique) de leur cigarette électronique, mais putain, Dieu sait que je m’énerve pour rien en ce moment...
j'ai oublié de signer : ctrlx (j'aimerais pas qu'on me confonde avec le défenseur du libéralisme thempératoire qui s'exprimait deux posts plus tôt)
A ma montre il est 16h, et vous êtes un esclavagiste, je n'ai pas peur des mots.
Sachez que ces 16h ressemblent en tout point aux 17h que j'ai vécues hier.
Mais vous et les vôtres, du parti du pragmatisme tristounet, vous voulez nuire à ma qualité de vie en m'imposant votre heure et votre température de petit bras.
Eh bien laissez-moi vous dire que les français ne veulent pas de votre idéologie mortifère et ne se rangeront jamais aux côtés des staliniens de votre engeance.
Je ne vous salue pas et je retourne me caresser le gosier.
C'était mieux avant. Il y avait des voitures sans électronique, on pouvait se plonger le doigt dans le nez au feu rouge sans avoir peur de finir sur le net, les jeunes étaient propres, les femmes étaient propres, j'avais des érections, on vous prenait pour un génie dès que vous saviez écrire un jeu du pendu en pascal, les calculatrices japonaises pouvaient tomber du deuxième étage et continuer de fonctionner, les gens savaient que la planète pouvaient être détruites en quelques minutes et que c'était une mauvaise idée d'agresser les autres grandes puissances dans leurs intérêts vitaux, on pouvait être moustachu sans se faire aborder par des hommes, on mangeait de la viande sans avoir envie de se flageller, et certes il y avait des glaciers, mais ils ne réveillaient pas les enfants en passant dans la rue musique à fond à dix heures du soir. Il y avait aussi moins de choix au rayon alcool, mais c'était moins cher.
Seulement voilà, c'est inéluctable, c'est thermodynamique, et il ne sert à rien de s'y opposer : le progrès n'est possible que localement et temporairement, au prix d'une dégradation globale, d'un accroissement du chaos. Autant dire que le lieu commun affirmant qu'on n'arrête pas le progrès est une grosse connerie : il suffit de laisser les choses aller, et le progrès disparaît de lui-même, Le disco, les blogs, le rap, l'autofiction et Twitter étaient inéluctables. Alors, contre ça, les thermomètres et Alain Finkelkraut...
On ne connaissait pas notre chance, on voulait des voitures volantes.