C'est là qu'il s'est pointé, le vieux copain - c'est toujours un vieux copain qui s'autorise, t'as dû t'en apercevoir. Il ramène sa fraise encore vive, son regard allumé, me cueille au milieu d'une toux de tubard et me lâche sa petite phrase de sa voix de singe hilare :
« Fume, fume, avant que la vie te fume. »
J’avais beau avoir entendu ça plus de quatre cents fois auparavant, j’ai senti mes pupilles brûler d’un feu incandescent. Mes poils se sont hérissés sur ma nuque, puis tout le long de ma moelle épinière, et j’ai tiré sur le pét’ comme si la vie de mon gosse en dépendait.
C’est qu’il avait la manière, le Bob. Voix grave, intonations de circonstance, une certaine légèreté dans l’expression. Tout en lui contribuait à me convaincre qu’il n’existait en ce monde rien d’aussi important que ce foutu joint roulé à l’arrache sur un trottoir mal éclairé. On nous rabâche les oreilles sur le fond qu’il faut chercher par delà la forme, le sens profond des choses qui éclaire les ténèbres, démolit les frontières, brouille les repères et nous met dedans, mais prenez n’importe quel lieu commun et revisitez-le avec talent : vous collectionnerez les adeptes. D’aucuns appellent ça le style - prononcé « staïle », c'est encore mieux - l’attitude, la touche personnelle, « mon truc à moi ». En fin de compte, il ne s’agit que d’esthétique.
N’empêche. Le joint, je l’ai fumé jusqu’à la lie, à en consumer le carton. Aujourd’hui encore, j’en recrache les cendres.
LA ZONE -
Je l'avais cherché, je veux bien l'admettre. Défoncé comme rarement, plus déchiré qu'un sous-vêtement de danseuse exotique après une orgie de gingembre et de bois bandé, plus fracassé qu'un live des Pistols enregistré sur un magnétophone de pigiste, plus stoned qu'un chanteur mort, lapidé comme à Kaboul, assommé par les joints, les bangs, les pipes à eau, écervelé pour plusieurs siècles parce que c'est le but recherché. Le reste, on s'en fout. Le reste, c'est du papier peint sur les murs de ta vie, ta geôle, dernier boudoir avant le couperet, l'ultime décharge et l'asticot.
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La rubrique se prête bien à un grand lâché de lieux communs dans les commentaires. Pour ma part donc : de belles longues phrases ciselées qui portent la lecture de bout en bout.
Anticommunisme primaire. C'est scandaleux.
Et le narrateur me tutoie. C'est scandaleux.
Avec en plus de ça une vignette de 60x31 au lieu de 150x75 pixels. C'est scandaleux.
Sinon, je ne sais pas, ce n'est ni passionnant ni révoltant, ça casse rien, pourquoi pas. Ça sera quand même vite oublié.
Moi, je dis que les lieux communs, hé bien on en dit beaucoup de mal à tort, parce que sans ça on devrait tout le temps rentrer chez soi pour se soulager, et puis beaucoup de pères et de mères ne se seraient pas rencontrés, et c'est un peu de la discrimination contre les fils de putes tout ça.
N'ayant jamais entendu cette expression auparavant, suis-je en capacité de commenter ce texte ?
Faut-il remettre en question mon milieu social dans son ensemble ou continuer à vivre malgré tout, avec dignité ?
"Fume avant que la vie te fume"... Pour moi, ça mérite une castration chimique, au mieux (voix de singe hilare ou non).
C'est un truc de rocker à franges.
J'ai donc un problème avec le sérieux qui transpire (un peu) de ce texte. Comment fonder une analyse comportementale sur une série de mots pareille ?
Et puis l'intro m'a plombé. Trop d’esbroufe.
Tant va la cruche à l'eau, globalement.
Tu dis ça parce que t'es jaloux.
Bah, moi non plus, je n'avais jamais entendu quelqu'un prononcer cette phrase, en fait. En tout cas, pas en situation réelle de vraie vie non littéraire ou virtuelle.
Et donc c'est vrai que c'est peut-être un truc de rocker à franges, vu que je suis plutôt fan d'Elsa ou de Barbara ou de Kalinka (mais pas de Dalida).
Pour la petite histoire, j'ai entendu cette expression peu souvent, certes, mais de façon très répétée pendant un court laps de temps. C'en était pénible et c'était effectivement dans un contexte particulier entretenant un rapport direct avec le monde du rock amateur. Les rockers en question n'avaient de frange qu'allégorique mais vous avez bien pigé le concept.