LA ZONE -

Rhâââ Lovely !

Le 24/01/2016
par HaiKulysse
[illustration] Après SAUTEZ DANS L’URINOIR, demandez la névrose, mon chef d’œuvre écrit un soir de biture montoise, une pure fiction autobiographique rêvée depuis des lustres. En réalité une bonne partie a été écrite dans un train, un TGV ou un TER, poulpe ferroviaire qui m’emportait loin de ma triste réalité, vers le Saint Sépulcre.
Intérimaire chômeur je pouvais d’un moment à l’autre me retrouver avec une mission dans les pattes. Cette situation m’obsédait, un soir j’en ai eu marre, j’ai pété un câble, j’ai fait mes bagages, j’ai attendu jusqu’au petit matin en me gavant de café, j’ai pris mon train direction Mons et je ne suis plus jamais revenu.
Je commence mon récit : c’est l’histoire d’un jeune homme idéaliste, un dandy androgyne un peu cynique un peu romantique, séparé de sa tendre âme sœur un soir de requiem, il n’était qu’un vulgaire manutentionnaire dans une multinationale et pensait toujours à elle quand il nettoyait entre deux palettes, il prenait le Frioul express tous les dimanches, il rencontrait dans le train des personnalités du très regretté troisième Reich, il prévoyait de faire un voyage à Amiens rencontrer le fantôme du Défunt, se saoulait dans des bars montois, une ville où l’on faisait toujours la fête, où la bières coulaient à flot dans des flûtes à champagne.


Réchappé dernièrement d’un BTS COM, où j’ai appris qu’un préservatif c’est un objet de consommation courante, je fuis ou tente de m’éloigner de mon pathétique destin mais je sais qu’il finira par me rattraper : alors je vis claquemuré derrière mes remparts, sous ce terrier minable qui me sert d’appartement.
Comme le lycée était mon seul lien social, d'après l'addictologue qui me suit désormais intensivement, j’essaie de voir des gens partout dans la France et aussi à l’étranger : à Marseille j’ai vu un père noël cancéreux ; à Montpellier je me souviens d’un alcool chinois extrêmement puissant ; à Paris coma éthylique en criant avant la phase légume RHAAA LOVELY-LOVE DEBOUT LES MORTS ; à Grenoble j’ai connu une cuite terrible avec un ex-libraire et un type totalement nihiliste. On aurait pu jouer de la guitare, écrire comme Gotlib dessinait pour Fluide glacial, ou raconter notre prochain voyage où l’on verra des rennes ou des éléphants roses aux commandes d'un poulpe ferroviaire.


LE FENWICK ! LE PEN VITE !
Stop look my eyes!
Avait-elle dit avec ses yeux de chatte concupiscente.
LAVAGE DES YEUX !
C’est écrit sur la pancarte comme
BALAYAGE avec trois points d’exclamation ou
FUME TONTON FUME
I LOVE LA BITE

Je pourrais dire : j’ai écrit mon roman sur de vieux cartons qui traînaient, sur du papier chiotte dans les toilettes d’un TGV en m’inspirant des graffitis écrits sur la lunette. Aucun point d’exclamation, aucune adresse, pas de numéro de téléphone : comment vais-je retrouver la gothique post-moderne ?

L'écrivain des Savanes avoue plus loin qu’il a écrit ce texte uniquement pour « leurrer » sa copine gothe, il dit qu’elle ne lit pas souvent, à part des romans genre Lestat le vampire et donc qu’elle ne se doutera jamais de ses motivations sexuelles.
Il se compare à Brad Pitt version néo-poète-maudit néo-damné néo-romantique, ça doit être l’influence du Fight Club et de Gérard de Nerval qui l’incitent à persévérer dans ce personnage. Recevoir des coups de poing dans la gueule et écrire ses petits chagrins d’amour de grand damné vont de pair. Il décide alors d’appeler sa prochaine nouvelle Fight club nervalien.

A son retour, il met la télé, allume l’ordinateur et la radio. Il analyse sa vie sentimentale. Il parle avec un copain sur MSN. Puis il se met à pleurer tout seul dans sa chambre fin de la nouvelle.

...

Au fait savez-vous qu’un préservatif c’est un objet de consommation courante ; très important lors de votre prochain entretien d’embauche.

Par exemple si vous voulez devenir manutentionnaire chez DHL France, lisez cette histoire savoureuse : on dirait un roman ou une fiction autobiographique et pourtant c’est en droite ligne avec le néo-réalisme d’outre tombe (ou d’ici bas je sais plus).


A l’agence d’intérim Adéquat.

Je tiens à vous signaler que je mets fin volontairement à ma mission, celle-ci s’achevant ce vendredi 25 mai, après une longue lutte pour résister aux brimades.
Ce jour là, alors que je travaille avec acharnement depuis le 19 mars et sans jamais me plaindre ou me révolter contre mes conditions de travail déplorables, alors que j’étais plein de bonne volonté pour faire des heures supplémentaires et conserver à tout prix mon emploi, alors que je voulais rentrer chez moi me reposer enfin et prendre mon week end, j’ai dû me battre (au sens figuré bien sûr) pour arriver à signer une feuille de pointage.

Comprenez bien ma situation : il est plus de sept heures et demi du soir, on m’attend sur le parking, je suis un jeune manutentionnaire qu’on marche constamment dessus et qui ne dit rien, je suis totalement dévoué à mon travail malgré un salaire absurde, je passe tout mon temps libre à faire des heures supplémentaires, je dois endurer chaque jour le cynisme, le mépris et les pseudos blagues de mes supérieurs, j’ai le malheur de vouloir rentrer chez moi (faut-il se mettre à genoux, s’excuser, supplier quand on a fini son travail ?)
je cherche une feuille de pointage pour pouvoir marquer mes horaires et signer : graal improbable, il faut que je mène l’enquête auprès de dizaines de personnes pour savoir où elle est passé : résultat personne ne sait, tout le monde s’en contrefout, je suis seul à errer dans cette entreprise dite moderne et efficace à la recherche d’un vague renseignement : apparemment une journée de travail juste pour le fun c’est monnaie courante ici, malgré ma fatigue j’insiste (mais peut être que j’aurais dû rentrer chez moi sans faire d’histoire mais vraiment pardonnez moi : c’est juste que ça me chiffonne un peu d’être un travailleur gratuit, je trouve finalement de tendres âmes : les dénommés K et V, grands pontifes de la boîte, je leur informe de l’absence de feuille de pointage MOQUERIE ! K me rétorque avec son air narquois, méprisant et cynique comme à son habitude que je n’ai qu’à faire du bénévolat !
Il s’agissait selon lui d’une blague très drôle, très drôle en effet c’est à se tordre de rire ; d’ailleurs je me demande pourquoi à ce moment je ne me suis pas mis à hurler de rire, c’est vrai que maintenant quand j’y pense je me pisse dessus, mais au moment où il m’a dit ça je n’avais pas trop envie de rire donc je lui réponds courtoisement que je ne fais pas de bénévolat pour une grande société multinationale qui chiffre en milliards de dollars ses bénéfices (mais je dois sûrement pas comprendre la logique des choses encore moins l’Humour, ce bel humour si tendre et si humaniste ! D’ailleurs dorénavant je propose de travailler gratuitement comme une offrande sacrée faite aux Dieux ! Quelle offense d’avoir ouvert sa gueule et d’avoir eu la folle prétention de demander cette fiche !

_Ugh, Ugh un communiste !!!!!!

J’entends en réponse à mon sacrilège. Et toute de suite les rires moqueurs et bêtes se mettent à fuser : visiblement dans le bureau on se paye une franche et saine rigolade !
Alors que faut-il répondre à cette réponse unique, originale, subliminale et d’une intelligence rare ?
Donc on est communiste quand on ne travaille pas gratuitement ?
Drôle de raisonnement… Ou alors j’ai rien compris depuis le début : ici tout le monde travaille gratuitement dans cette association humanitaire caritative qui s’occupe de la veuve et de l’orphelin, qui achemine des palettes entières de coca lemon, bières, jus de fruit, lait et sirop aux petits somaliens mourants : suis-je bête !
Et moi le sale communiste qui a un couteau entre les dents j’exige de l’argent en échange de mon travail : quelle absurdité !
C’est affolant comme je peux être mesquin parfois : c’est démodé de travailler pour de l’argent, vive le bénévolat chez Carrefour !!!!!

Donc je vous prie de bien vouloir accepter mes excuses, aucune ironie pathétique dans mes propos je le pense vraiment et bien sûr vous aussi ; je suis sincèrement navré de quitter cette association humanitaire que j’aimais tant !
Mes amitiés les plus sincères

FRIZON VALENTIN, néo-communiste à DHLand, royaume de la générosité, du partage et des valeurs humanistes.

= commentaires =

LePouiIleux
    le 24/01/2016 à 22:26:24
C'est dommage je trouve que ça laisse un peu sur sa faim, comme l'impression que l'auteur est effectivement un branleur et qu'il a pas mérité sa fiche horaire/de paye. M'enfin bon si ça été écrit sur un bout de pq dans un TER sordide en rentrant de cuitasse, pourquoi pas ?


ps : ça fonctionne pas le log avec le pseudo, j'ai vérifié et revérifié mon mdp pourtant.
Fabrici Luchini
    le 24/01/2016 à 23:31:38
On a affaire à une vision très idéalisée de la Belgique.
Schmitt
    le 25/01/2016 à 02:17:34
De l'idéal sur la Zone ? On s'est encore fait avoir ?
Au soleil
    le 25/01/2016 à 07:05:31
Nous sommes effectivement lundi, peut-être un des seuls miracles de l'existence sur lequel on peut compter régulièrement, alors je serai magnanime : c'est un TDM qui chouine et qui espérons-le conclut la dramatique série textuelle d'un auteur en chute libre.

Souhaitons lui de retrouver ses esprits au plus vite, et il n'y a pas meilleur moment que tout de suite, puisqu'on sait à présent que la Zone passera l'hiver.
Auteur, aujourd'hui est le premier jour du reste de tes textes à venir, lève-toi et marche vers les pâturages bucoliques de l'inspiration.
Lapinchien

tw
Pute : 6
à mort
    le 25/01/2016 à 16:06:19
les ruptures narratives et de style sont très agréables dans la lecture de ce texte. on se dit qu'il y a beaucoup de superflu mais c'est comme l'emballage d'un bonbon. Même si c'est pas ce qu'on bouffe, sans lui, ce serait dégueulasse.
Mill

lien fb
Pute : 0
    le 25/01/2016 à 21:22:21
A la lecture de ce drôle d'objet littéraire, plusieurs remarques que je livre ici comme elles me viennent, sans ordre ni hiérarchie.

1/ C'est fou ce que certains auteurs ont besoin de se raconter. L'histoire proprement dite ne démarre qu'au 11e paragraphe (si j'ai bien compté, ce dont je doute). Avant ça, il faut se fader diverses élucubrations qui semblent prendre racine dans le nombril de l'auteur.

2/ La remarque ci-dessus provoquera moult ricanements chez les anciens de la Zone qui considèrent peut-être encore l'auteur de ce commentaire comme un égotiste patenté, surtout lorsque l'on sait qu'il a passé plus d'un an à rédiger un volume intitulé "Confessions d'un blaireau", récit que l'on qualifiera pudiquement d'autofiction, lui-même non exempt de digressions de toutes sortes, de métaconneries et autres enjolivures plus ou moins maîtrisées. Alors d'accord, ok, c'est l'hôpital en short qui se fout de la charité en bermuda, si vous y tenez, n'empêche que bon: le texte ci-présent gagnerait en efficacité s'il démarrait effectivement au 11e paragraphe: "A l'agence d'intérim Adéquat, etc."

3/ La partie auto-machin-truc n'en demeure pas moins distrayante, voire captivante par instants, avec quelques coups de mou dus aux ruptures de ton, de style, de rythme. En d'autres termes, il y a là matière à quelque chose d'autres après ré-écriture en vue d'un assainissement de la langue et d'une simplification des propos. On se perd un peu trop et c'est dommage.

4/ L'ensemble manque d'humour, notamment la deuxième partie, qui reste, à mon sens, la partie la plus importante du texte. C'est peut-être fait exprès, je sais pas, mais puisque tout est subjectif, je donne mon avis, ne vous plaignez pas, c'est cadeau.

5/ J'ai largement apprécié la vision du monde du travail offerte en pâture à me yeux de sale gauchiste. Bravo et merci.

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