Il peut aussi être raisonnable d'affirmer que ce soit l'Homme qui le fit venir jusqu'à lui, au travers d'un quelconque moyen. Quoi qu'il en soit il se trouve ici, dans nos poches, nos maisons, il se trouve en dessous et au dessus de nous, et du moins, pour ce que l'on en sait, depuis suffisamment longtemps pour qu'on le considère comme nécessaire mais tout à fait dangereux.
On commença par l’appeler Aayouueuuuhaaaaaargg, pour une question de simplification de langage, et parce que, sensément, c'était bien là la seule chose qu'il évoquait aux premiers Hommes. Les artifices du langage arrivèrent, on lui attribua dès lors le nom de Feu.
Pendant encore des siècles, on préserva l'origine de son être, le feu primaire, celui que l'on su faire durer pour pouvoir mieux le reproduire, le transportant à travers les jungles, les désert, les grottes, les temples, au dessus des tours ou même encore sur des bûchers. On mourrait pour lui, parfois par lui. Il eut des fils, auxquels il attribua des pays continents entiers afin de mieux asseoir sa suprématie sur le monde des Hommes. Ses fils prirent des formes différentes afin de mieux se mêler à la population et, davantage, pouvoir se distinguer de leur père, autant par respect que par défiance.
Ainsi Agni partit en Inde sous la forme d'un Homme pourvu de deux-têtes et d'un bélier qu'il chevauchait; Vulcain, lui, pareil à son jumeau Héphaïstos, ressemblait tout à fait à un Homme; il choisit pour sa part de s'installer au cœur du monde latin, logeant de temps à autres au Mont Vésuve. En somme, Feu était déjà plusieurs fois père, mais on lui découvrit régulièrement des fils et des filles cachés dans des villes parfois séparées d'à peine quelques kilomètres de distance.
Des civilisations entières disparurent à son contact. Des règnes s'y brisaient, des divinités du paganisme y disparurent à jamais, des écrits essentiels s'y perdirent; nul ne pouvait résolument contrôler ses flammes. Les dynasties Pharaoniennes le firent amener en Egypte, convaincues qu'il serait plus utile au sein du peuple le plus puissant de tout les temps qu'en compagnie de stupides barbares qui ne faisaient bien que de se détruire avec. On le fit un jour se renverser et se répandre dans une célèbre bibliothèque Alexandrie, vers la fin du neuvième mois du calendrier d'alors - mois dit de "Pachon" -, jour funeste qui se situe probablement vers le 10ème jour de notre mois d'Avril Chrétien, tandis qu'on l'utilisait pour lire quelques ouvrages - cependant l'Histoire ne s'est jamais décidée à ce sujet, et l'on dit qu'il pourrait s'agir d'un acte de vengeance d'un quelconque descendant d'un quelconque Philologue qui, banni, jura destruction et misère sur la plus formidable base de donnée littéraire du monde connu.
Le roi de l'époque, qui ne savait supporter d'éclats plus vifs aux yeux du peuple que le sien propre, décida sensément d'isoler le Feu du reste de l'humanité. En somme le peuple pensa qu'il n'y avait bien qu'un Dieu qui puisse en chasser en autre; le pouvoir du Roi se renforça tandis que celui de Feu perdit de sa superbe, devenu criminel, son expulsion résonna comme un soulagement à travers toute la ville. Il l'envoya, ainsi que quelques présumés traitres et autres qui continuaient de vouer un culte aux braises, en exil sur une île éloignée de quelques kilomètres, et qui n'en faisait pas plus en superficie. Ce fut bien pratique pendant un temps; il pouvait continuer de bannir quelques quidams en les faisant rejoindre Feu et ses derniers adorateurs.
Chacun savait de toute manière comment recréer chez soi et sans prendre de risque la flamme autrefois tant louée pour son unicité, et des siècles passèrent sans que l'on n'entende plus parler du premier Feu apparu sur Terre. Ses fils faisaient toutefois parler d'eux de temps à autre à travers les âges, par rancune ou bien nostalgie d'un temps où ils régnaient sans partage aux côtés de leur père, lorsqu'il n'y avait bien que les caprices du ciel et l'invincible Océan pour leur tenir tête. Presque tout le monde aujourd'hui savait comment les maitriser et les repousser, cependant que l'on ne put jamais tout à fait les capturer et les contraindre comme le fit le roi à l'exil définitif. A ceux qui se risquaient à éteindre les incendies, on leur créa un métier ; chose amusante, si l'on considère qu'on avait fait la même chose quelques siècles auparavant de ce qu'il fallait protéger l'intégrité de Feu. On remplaça la peur qu'il avait pu inspirer au monde par d'autres bien plus terribles encore.
Cependant qu'il n'y avait guerre plus que les bois qui tremblaient encore à l'évocation des noms de Feu et de ses enfants.
La croisière "Verbrannt" allait sur les eaux méditerranéennes, transportant à son bord une faune diversifiée venue d'Europe essentiellement, et laissée entre les mains expérimentée du Capitaine Grumeaux et de son assistant dont il préférait pour quelques raisons que l'on le considère plutôt comme un second capitaine, quand bien même n'était-il pas rompu aux principes de la navigation maritime, se rêvant plus à voyager à bord d'un de ces appareils instables qui sillonnent le ciel de façon horizontale quand c'est possible. Un bien étrange second cependant; il s'agissait en effet d'un prototype d'automate constitué de l'assemblage informatisée d'expériences cumulées de quelques personnels d'avions venant pour la plupart d'Allemagne. Kopilot380 était le nom de projet qu'il arborait sur une plaque de métal à l'emplacement de son "torse".
- Combien reste-il de temps capitaine bzzzz car là ça serait bien de mourir, fit la voix digitalisée.
Grumeaux se grattait la barbe, avant de s'apercevoir qu'il n'en possédait décidément pas et que tout ceci devait sembler ridicule. Heureusement que les robots ne connaissent pas cette notion.
- On sera bientôt arrivés; tu vois ce banc de sable, là-bas ? Et bien, dans une heure, nous devrons y être accostés; je te laisserais le soin de nous y déposer, ce sera un bon entrainement pour les prochaines fois, pour ma part j'aurais encore deux-trois choses à vérifier avant qu'on ne débarque. Oh, et, je ne pense pas avoir besoin de vous le dire, mais faites gaffe à ce gigantesque monstrueux potentiellement meurtrier récif montagneux qui s'érige à quelques kilomètres de nous.
- Oh, comme j'ai hâte alors, tout comme j'ai hâte de mourir. Mou. Rir. RRRRR. Mourirvitemourir.
- Ahaha, oui, tu as raison mon brave petit pote en conserve, moi aussi j'ai hâte de pouvoir fouler la terre ferme.
- Quelle journée idéale. Pour Creverputaincrever.
A travers toutes les cabines de la croisière, la voix du capitaine désormais résonnait :
- A tout les passagers, notre arrivée est prévue pour dans une heure. Afin de tous nous recompter et d'être prêts pour le grand final, je vous prierais de tous bien vouloir me rejoindre sur le pont d'ici un quart-d'heure au mieux; un buffet avec des boissons doit y être déjà installé. Merci à vous tous, et à tout de suite !
Le pont s'était rempli en quelques minutes. L'on y piaillait, l'on y riait, l'on y échangeait des certitudes sur le monde et autres petites phrases préconçues et irritantes, l'on y voyait à peu près ce que l'Occident avait produit, en somme, en ces quelques décennies dernières. Il s'agissait de rejoindre "un évènement unique en son genre que l'on ne pourrait voir qu'une seule fois dans sa vie" sur l'île méconnue et pourtant charmante de Kräam Laggeulh. Comme on ne savait précisément pas de quoi il en retournait, on pouvait voir sur le bateau un peu de tout : des journalistes de BFM tv en quête d'un quelconque titre à falsifier ou d'une quelconque personnalité du FN à interviewer pour la 72ème heure de la semaine, d'autres journalistes qui eux, qualifiés d'experts vidéoludiques, étaient ravis de pouvoir voyager gratuitement pour par la suite dire du bien d'un quelconque FPS random codé avec les aisselles mais on s'en moque, c'est la passion; un philosophe français qui restait recroquevillé, dans un coin, l'air effrayé et perdu, les yeux exorbités; un petit groupe de jeunes hommes aux pulls bleus clairs noués sur des épaules remplissant à grand peine des chemises Pierre Cardin blanches immaculées se consultait avec un grand sérieux au sujet du dernier film de ce cinéaste indépendant d'ex-Yougoslavie; trois autres personnes d'âges variables, arborant des t-shirts à la gloire de la Geek-culture, s'échangeaient des Tweets via leurs téléphones, et cela les satisfaisait tout à fait. "Nous sommes des influents", répétaient-ils à intervalles régulières, ne levant leurs têtes de leurs appareils que brièvement pour s'entr-observer d'un air malicieux. Un des passager les rejoignait se présentant comme suit :
- Bonjour, je suis Community Manager.
- Ahahah, mais qui ne l'est pas, #newbie ? Ironisa le premier, avant de prendre une gorgée de ses propres sucs avec détachement. Mais bienvenue. Et félicitation.
- Et moi, je peux venir ?
- Vous êtes ?
- Je fait des panos sur fasbook pasque jai 40an et deux divorses mai je suis enkor jeune dan ma tète lol et jème colushe et les sitassions de lamour et des chose.
La petite assemblée se recroquevilla sur elle-même, devenant lors impénétrable jusqu'au débarquement. La bête immonde se sentie tout de suite à son aise et vint se placer avec de grandes difficultés et en poussant un peu tout le monde au milieu du groupe.
Chacun se dispersa finalement aux quatre coins du pont afin de fuir pour de bon l'ignoble créature venue des tréfonds de l'Enfer, créée par Lucifer en personne dans le but d'asservir tout les quarantenaires occidentaux de l'univers et d'en faire des machines à citations tronquées ne vivant que pour la gloire infinie de réussir chaque jour nouveau à "télécharger l'Internet" à grands coups de discussions interminables et unidirectionnelles avec leurs enfants ennuyés à en mourir.
Le capitaine installa un petit tabouret au milieu du pont et prit place, debout, dessus, décidé et discernable, assurément.
- Très bien, je vais faire un appel de rigueur afin de vérifier que personne ne se soit jeté à la flotte depuis notre départ, ahah, ohoh.
- J'aimerais pourtant tellement que cela arrive gzzzzz, fit Kopilot380, provoquant l'hilarité générale à son plus grand désarroi.
- Kopilot, je te charge d'aller préparer notre arrivée; je te laisse en quelque sorte faire le créneau.
- Mais taisez vous... taisez-vous !
- Pardon ? Pouvez-vous répéter ? Demanda Grumeaux en fronçant les sourcils du mieux qu'il le put
La voix se fit plus forte.
- MAIS TAISEZ VOUS ! TAISEZ VOUS !
- Oh, oui, bien sûr monsieur Finkelkraut, que vous pouvez vous servir. Le buffet est là pour tout le monde.
- Taisez-vous.
- Il n'y a vraiment pas de quoi.
- Bien. Commençons je vous prie; Madame Genest ?
- Ah ! Les bougnoules ! Ah ! Ah ! Sus ! Aux armes ! Ah ! Le jambon, j'aime le jambon; la pénitence par le porc ! Sacrebleu, bleu d'Auvergne ! Ah, l'Auvergne ! Ah ! Les bougnats ! les bougnoules ! Ah, invasion, taïaut !
- Peut-on m'expliquer ?
- Véronique ne pouvait pas venir, elle avait trop de notifications sur son compte Twitter. On a heureusement pu avoir le temps de créer cet hologramme, que vous voyez là, à son effigie. Elle vous entends parfaitement et est comme la vraie, répondit au capitaine l'un des journalistes BFMtv, en cherchant quelques scoops dans ses narines à essuyer sur son jean.
- Mais cet hologramme n'a rien de madame Genest; c'est juste une morue qui tourne dans un bocal !
- Précisément. Mais c'est ce qu'on a pu trouver de plus proche, son image officielle étant propriété partagée et exclusive de TF1 et de Monique Ranou. On ne sait d'ailleurs même pas si elle existe dans la vie réelle.
- On aimerait en effet croire qu'elle n'existe pas; bien que ce genre de personnes semble du moins vivre plus fort que nous autres, pauvres et malades que nous sommes, aux yeux du Monde; que nous aurions aimé aimer, s'exclama le corps inerte d'un pauvre migrant, qui, en contrebas, flottait sur la mer dans une tristesse infinie, avant de définitivement couler pour de bon.
L'appel général reprit; des chanteurs sur le retour ou sur la fin, des voisins emmerdants - ce qui est presque en soi un pléonasme - des bloggueurs, des podcasters, des gens ayant un avis sur la religion, ainsi que des gens ayant un avis sur tout un tas de chose qu'ils ne maitrisent pas étant donné qu'ils ont déjà de belles difficultés à écrire leurs propres noms sans faire de fautes, des fans de séries en version originale, un mauvais sosie de Tony Montana, mes compétences d'écriture, des livres dont l'existence ne se vaut que parce qu'ils ne servent qu'à être adaptés en film, des bots et des trolls, et des mecs qui se font passer pour des trolls parce que c'est assurément trop drôle d'être pris pour un imbécile par tout le monde, et des trolls qui ne font pas exprès et qui se rattrapent en affirmant qu'ils en sont en fait, et que ils nous ont bien eu, et tout un tas de déclinaisons de la chose, dont la liste serait plus interminable qu'elle ne semble déjà l'être. Karl Lagerfeld était là, lui aussi, l'air encore plus mort que d'habitude; un homme affirmant être l'incarnation terrestre de l'humour moyen de ce côté de la planète se tenait sur la rembarre et faisant des bulles de bave avec sa bouche; il y avait, oui, décidément, du beau monde sur ce bateau-là.
- Capitaine ? Demanda un mousse avec quelques inquiétudes ponctuées dans la voix.
- Je n'ai pas encore fini de compter tout le monde, et nous serons bientôt arrivés, reviens me parler un peu plus tard, je te prie.
- Mais, c'est à dire que, vous êtes vraiment sûr que tout va bien avec Kopilot380 ? Je veux dire, il ne cesse de finir ses phrases par "jeveuxcreverjeveuxcreveravecvoustous". Je viens de sortir de la salle des machines et l'ai trouvé en train de se rouler par terre en émettant de drôles de bruits. J'ai vraiment flippé, capitaine.
- Ne t'en fais pas, jeune. C'est de la programmation Allemande, ça. Le nec plus ultra. Il est normal que tu ne comprennes pas toutes les subtilités de la chose. Retourne nettoyer les dernières chambres à s'être vidées, plutôt que de me faire perdre mon temps.
Les passagers, dont aucun ne manquait à l'appel, se préparaient à débarquer. L'on entendit le représentant légal de Jean-Luc Lahaie chanter avec de grandes difficultés le fameux hit "débarquez-moi" de son client en guise de grand final. A bâbord flottaient silencieusement d'autres corps inertes de ceux s'étant risqués à quitter leur pays pour rejoindre la si grande et si belle et si glorieuse et si sophistiquée Europe.
Les terres émergées n'étaient plus qu'à quelques poignées de minutes; Copilote380 pensait qu'il était enfin l'heure d'en finir; Grumeaux pensait à un moyen légal et peu couteux de changer de nom de famille; mais taisez-vous; tandis que les CM et autres twittos influents s'échangeaient leurs glaires avec délectation; Ah, les sales bougnoules ! pensait l'hologramorue de Véronique Genest; Bloub, caqueta le Kraken, qui, sorti de son sommeil millénaire - ce dont ils ne se doutaient, c'est que les chansons de Jean-Luc Lahaie ont ça de particulier qu'elles ont le pouvoir de réveiller les bêtes du fond de leurs ténèbres - émergea des eaux et fit se balancer à travers les airs des dizaines de tentacules immenses et gluantes.
Il empoigna l'incarnation de l'humour moyen qui continuait de faire des bizarreries bulleuses au bord de la rembarre à bâbord et entreprit de pénétrer son fondement par sa tentacule la plus volumineuse.
-AAAAH ! YAMETE KUDASAI !!! Hurla l'humour-moyen, pris au piège par la plus terrible locomotive à fists que l'univers n'ait jamais enfanté.
Mais personne ne se souciait de lui; les Terres étaient désormais plus proches que jamais et il fallait terminer ses valises .
Quelques cinq minutes plus tard, lorsqu'il en eut fini, ou assez, le kraken reposa délicatement sur le pont l'Humour qui tomba sur le ventre, laissant à la vue de tous son derrière qui ressemblait désormais davantage au canon d'un lance-patate usé qu'à la partie inférieure d'un être humain normal.
Kopilot380, seul à la barre décidait que, vraiment, il fallait absolument mourir tout de suite et mit les pleins gaz en direction de ce qu'il y avait de plus solide et volumineux à portée de vue. Etant donné qu'il ne voyait pas plus de constructions dignes de ce nom que de port - ce qui lui sembla par ailleurs anormal - il fit s'échouer, s'écraser, se compacter la croisière dans son entièreté contre le massif rocheux qui s'érigeait, accroché à la côte, semblable à une excroissance charbonneuse, juste devant lui.
Le choc de l'appareil contre le mystérieux massif produisit une étincelle formidable qui fit s'embraser tout ce qui pouvait provenir de la main de l'Homme, ainsi que les hommes et les femmes eux-mêmes.
Les rescapés, au nombre de deux, se réveillèrent à plusieurs mètres de la scène; mal en point, déchiquetés, noircis mais vivants.
- Eun, boh, 'e 'ais 'aire 'appel 'a'ors
- Ca ne servirait à rien Capitaine Grumeaux, il n'y a plus que vous et moi, ici, tout les autres ont du périr, ou ne sont pas loin de l'être.
- Et merde, tiens, fit le capitaine qui retrouvait ses esprits, voilà que je rate pour la première fois de ma vie ce trajet. Bien, suivez-moi, qui que vous soyez
- Moi c'est Loliver Tweet, j'ai 20 000 abonnés et à peu près autant d'avis et de contradictions liées. #Kohlantaenvrai. Mais, ça n'a pas l'air de trop vous ennuyer ce qu'il vient de se passer, je me trompe ?
- Ca m'ennui pour des raisons que vous connaitrez plus tard, d'abord il faut que je con
- Mais... tai... Vous...
- Z'avez entendu ça, hashtag ilsepassequoicharlespasqua ?
- Mais c'est !?
- Maiiiiis... Taisez-vouuuus.
- Alain ! S'exclama Loliver.
- Ah, l'autre. Ne s'exclama pas tant que ça Grumeaux.
La nature hostile et complexe se dressait devant eux; et en tout sens des bruits en parvenaient : cris et rires déments,sifflements, chants, craquements, bruissements, serpentations longues, fatiguées, craquettements, claquements de mâchoires, éructations gloutonnes, des hou-hou et des ha-ha partout.
Alain s'était tout emmêlé dans des lianes facétieuses. Voici que sa longue chevelure argentée faisait corps avec la faune locale, si bien que des singes s'attroupèrent autour de son crane pour y chercher puces et poux; ce qu'ils trouvèrent décidément.
- Ne t'inquiètes pas, on va te sortir de là !
C'est à ce même moment qu'une lance plus longue qu'un javelot transperça le philosophe présumé de part en part et le fit tomber aux pieds de Loliver qui lui même tomba à la renverse d'effroi.
Il se releva pour faire face à un géant au visage entièrement tatoué dans un très seyant costume Yves Saint Laurent. Il attrapa le javelot traversant Alain Finkelkraut tel un morceau de poivron et le porta à son épaule, à la manière d'un baluchon.
- Eh bien, eh bien. Vous êtes à la bourre, Grumeaux. A la bourre, ça, oui ! A la bourre et vous avez gâché toutes les offrandes.
- Je suis désolé, Ô grand gardien du noble Feu; c'est à dire que j'avais ce robot Allemand, là, et que, bien, je crois qu'il était dépressif, au fond, le mousse avait peut-être vu juste.
- Puisque c'est ainsi et que nous sommes le 10 Avril très exactement, je vous laisse encore 14 jours pour me ramener d'autres présents à jeter aux flammes.
- Oui, bien, je, euh, oui. C'est entendu et très clair.
- Mais putain qu'est-ce qu'il se passe #Whatthefuck2015 ?
- Au moins nous avons celui-là. Il servira à peine d'apéritif, mais nous n'avons pas le choix. Suivez-moi, Grumeaux, vous et ce jeune importun.
Le trio arriva dans une grande arène au centre de laquelle Feu, majestueux et impérial, trônait sur un autel de bois mort.
- QUE ME RAMENEZ VOUS, FILS D'EGYPTE ?
- C'est, euh, un jeune twittos influent et...
- EST IL DONC SI DODU QUE JE N AIES BESOIN DE PLUS DE VIANDE ? QU'EST CE QUE CELA SIGNIFIE ? PARLEZ FILS D'EGYPTE !
- Il y a eu un problème vraisemblablement; j'en suis désolé, le capitaine Grumeaux que vous voyez là va revenir sous 14 jours avec de nouvelles victuailles de choix, je vous en donne ma parole, au nom du pacte qui nous lie vous, moi, ainsi que tout mes ancêtres.
- TRÈS BIEN. MAIS 14 JOURS ET PAS UN DE PLUS. ALLEZ Y. DÉPÊCHEZ VOUS CAR J'AI FAIM;
Le capitaine Grumeaux et le descendant des gardiens du Feu jetèrent Loliver qui ne se débattu pas. Feu lui lécha les entrailles des heures durant et se repu de ses chairs avec une grande satisfaction. Si il lui fallait cette fois-ci attendre 14 jours de plus, il savait que, chaque 10 Avril depuis l'incendie de la grande Bibliothèque d'Alexandrie, il pouvait compter sur les descendants successifs de ses gardiens pour lui ramener de quoi étancher sa soif et sa rancœur à l'égard de ceux qui voudraient briller plus que lui.
Peut-être était-il là bien avant que l'Homme ne se décide à se déplacer sur deux jambes. Pour ce que la mémoire de l'Humanité est infime à l'échelle de celle de la Terre, on ne saurait le dire précisément.
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C'est bien putassier, mais tellement lucide. Mon préféré du cru 2015 par son coté épique.
Je ne sais plus qui pleurnichait que la St-Con 2015 était lymphatique, mais il peut désormais aller s'asseoir sur un tréteau ce zouave.
Salut,
Foutre, il y aurait comme une intention dans l'écriture, je croyais ressentir comme un lien entre les parties du texte, une ambition dans la brochette de cons même, le texte croiserait plus ou moins le crash de l'a320 de la lufthansa, avec son pilote suicidaire, et le naufrage du costa concordia, avec son capitaine le plus détesté d'italie, mais ça tisse par dessus un espèce de récit homérique à base de divinités du feu, père, fils, gardiens...
Quand même, l'écriture ne plante pas des pics à glace pour coller au récit comme un mauvais payeurs aux surins de la camora, les dialogues ont un goût de sauce barbecue à la fin et l'épopée oecuménique du début rame, enfin, pagaille.
Mais y'a un bon fond, comme aurait pu dire la tentacule du kraken en sortant de ch'ai plus trop qui.
Ce n'est pas vraiment la grande flambée, mais pas grave. C'est assez inégal au niveau de l'écriture, il y a des couacs par moments, à d'autre c'est agréable. En revanche c'est le plus distrayant que j'ai lu jusqu'ici, j'hésite à dire le plus marrant parce qu'en même temps je ne me suis pas non plus vraiment esclaffé même si je l'ai envisagé quand ça gueule un truc en japonais pendant un entubage d'humoriste par un tentacule de kraken et puis peut-être qu'à un autre moment et dans une autre humeur ça m'aurait franchement fait marrer.
J'aime bien aussi l'idée de base mais avec cette impression qu'elle a dévié et basculé dans le n'importe quoi par manque de temps.