Bitengranit au huitième jour transgressa l’interdiction formelle de son créateur de toucher au media défendu, la télévision.
Comme toute interdiction, celle de Blanquettestein de Vaux rendait la chose encore plus tentante. Bitengranit était avide de savoir et il montra des prédispositions tout à fait étonnantes vis-à-vis du PAF, s’installant dans l’affreux fauteuil crapaud hérité du grand oncle de Blanquettestein, se grattant les couilles en roche en ouvrant une boite de cacahuètes. Il s’était par ailleurs muni d’une canette de 8/6, vestige de l’adolescence rebelle punkoïde et alcoolique de son créateur.
Son doigt de granit trouva le bouton « on » et un foisonnement d’images parvint à ses pupilles de quartz.
Tout semblait merveilleux et coloré, joyeux, vivant et délicieusement décadent. Les publicités pour les nuggets, les histoires de braquage avec fusil d’assaut, les putes en bikini, la cocaïne inspirée à plein naseau.
Mais cela n’était rien, cela était broutille. Lorsqu’il appuya sur le bouton « 5 » s’offrit à ses yeux un panorama de savane où festoyaient gaiement des éléphants d’Afrique. Bitengranit se sentit étrangement ému. Etrangement ému et d’une étrange façon. L’image suivante montrait un éléphant tastant la chatte éléphantesque d’une congénère via sa trompe phalloïde. Fasciné, Bitengranit ne lâchait pas l’écran des yeux ni sa bite de sa main droite. Enfin, l’éléphant, muni d’un vit long comme sa trompe, monta en remuant ses grandes oreilles sa compagne en poussant un barrissement fort viril et enthousiaste.
Cela excita fortement Bitengranit qui se surprit à avoir une turgescence, une montée pulsionnelle : une stalagbite.
Il s’astiqua frénétiquement en se demandant par ailleurs où trouver toutes ces délicieuses choses : éléphants et par extension nuggets, putes en string, cocaïne, guns et voiture de sport. Dans un râle, devant la rediffusion de la sex tape de Paris Hilton aux grandes lèvres évoquant les délicates oreilles de l’éléphante, il gicla en râlant un éjaculat de lave en fusion, qui carbonisa le pied de l’affreux fauteuil crapaud.
Alors il vit qu’il était nu et ressenti t la honte.
Un pagne en feuilles de bananier provenant de la serre de Blanquettestein de veau lui permit de camoufler sa bite en granit, qui s’était, sous l’effet de la période réfractaire, muée en stalactite.
Il eut rougi s’il l’eut pu mais la perspective de toutes les débauches et les luxures du monde environnant le chevillait au vice, frappait par saccades son cerveau rocailleux et il décida de fuguer plutôt que de se foutre en l’air, opération qui semblait délicate et chiante à mettre en œuvre.
De plus, il comptait trouver une femelle de son espèce ; malgré un zapping intensif sur les 48 chaines que proposaient la TNT, il n’avait vu que des femelles humaines, mamelues, chevelues et à la cuisse légère, des opossums aux mœurs dissolues, des dauphins partouzant dans les océans, un tas de robots ménagers, ustensiles de domotique et coupés cabriolet, ainsi qu’un reportage sur les Gorges du Verdon. Cette dernière image lui avait laissé penser que s’il avait une génitrice, ces gorges en étaient la matrice. Il s’évoqua à nouveau les images de la pulpeuse éléphante et décidé que s’il existait une créature telle que lui, elle devait appartenir à l’espèce des Elephantidae.
Il lui suffit pour se faufiler au-dehors de trouver la clé de la porte d’entrée, fort opportunément cachée dans le pot du feu bananier.
Furtivement, d’autant plus aisément que Blanquettestein de Veau s’était absenté pour un congrès concernant la vaginoplastie (avec TP), il s’éclipsa et alla parcourir les rues. Son premier forfait lui vint d’une trique violente face à ce qu’il identifia comme une Jaguar type E, rouge. Il attendit en se caressant discrètement les boules à travers le pagne, impatient de s’enfourner dans le véhicule.
Quand le propriétaire, aux alentours de 22h, vint récupérer son bien, il lui donna un fort coup de poing de pierre sur le crane, faisant éclater son scalp et sa boite crânienne.
De ses doigts épais et maladroits il récupéra la clé et pu enfin se livrer aux plaisirs de la conduite sportive. Qu’il avait apprise en regardant quatre épisodes de Diabolo et Satanas.
Il erra en vain en quête d’un zoo puis décida de se payer une vieille prostituée à la peau grise et ridée comme une éléphante.
Il parcourut les rues en quête de pute, s’en trouva une pour lui tailler une pipe en aire autoroutière, elle avait par ailleurs accepté moyennant 10€ supplémentaires et convaincue par l’argument du poing massif de Bitengranit, de porter de fausses défenses et de barrir. Elle eut un peu de mal à le pomper au vu des défenses, mais y parvint et décéda céans du fait d’une coulée de lave dans la trachée. Bitengranit jeta son corps et se dirigea vers le Mac Donald’s le plus proche, parce que ça creuse.
Là, attablé devant le triple cheese double bacon spirit americana, les nuggets de poulet, la grande portion de frites et le demi litre de Coke il se prit à repenser à ses dernières actions.
Il sut qu’il avait fait le mal et ressentit la culpabilité. Le hamburger passait mal dans sa gorge serrée, sous ses paupières défilait le film de la soirée et il savait maintenant, maintenant qu’il avait étudié le media défendu, il savait que son âme était en péril et que son créateur risquait de se détourner de lui, de l’enculer ou de le finir un soir d’orage.
Sanglotant, il abandonna son plateau semi consommé et retourna rapidement et honteusement dans ses pénates.
Pr Blanquettestein de Veau était à la maison, en proie à la plus folle inquiétude. Voyant arriver Bitengranit vêtu d’un pagne, du sang sur les moustaches en paille de fer et empestant le graillon il se jeta de manière assez mélodramatique à genoux (ses études avaient comporté un semestre de cours d’expression corporelle), se prit la tête entre les mains et cria « WHYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYYY ????§§§§§ »
Bitengranit regardait ses pieds, le rouge au front et la serviette à la main et il déclara d’une toute petite voix « j’ai regardé la télé »
« NOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOON §§§§§ » s’époumona Blanquettestein de Veau, soupçonnant de manière décidément sagace le pire.
Il se servit deux shots de vodka et indiqua à Bitengranit un fauteuil à bascule où s’asseoir.
« Créature, tu sais que tu as fait le mal
-Je le sais, ô créateur, mais jouir de sa chair ou de sa pierre, voilà qui est bandant. Je ne peux m’empêcher de commettre le pire, j’en conçois une excitation qui pourrait me faire tringler un régiment d’artilleurs sénégalais. Après avoir parcouru les bas fonds de la ville, je me suis aperçu que nulle créature de mon espèce ne vivait ici. Et je n’ai pas trouvé les Gorges du Verdon sur le GPS. C’était mal, ô père, mais c’était si bon. Moi aussi, qui suis en vie par votre volonté, j’ai le droit de tirer un coup de temps en temps et de me détendre. Je ne suis qu’une créature de granit, après tout. Et VOUS m’avez accordé le libre arbitre. Fuck.
-D’autres voies s’offrent à toi pour jouir de la vie, de cette vie que je t’ai offerte. Oui, moi, Blanquettestein, je t’ai créé et donné vie. A moi tout seul. Ouais.
-Lesquelles, professeur, lesquelles ? Dois-je trouver un emploi de bureau et épouser une gentille fille ?
-Ne raconte pas n’importe quoi, jamais tu ne trouveras d’emploi ou de femme au vu de ta gueule de cratère. Et en effet il n’existe pas de femelle pour toi sur cette terre. Actuellement. Ce congrès sur la vaginoplastie était très instructif, garde foi en moi. Je voudrais t’exhorter à des aspirations plus nobles, des nourritures spirituelles et intellectuelles qui feraient de toi une créature non humaine accomplie, qui te donneraient une âme, tu m’entends, une ÂME !
-Que dois je faire pour cela, que dois je faire, je m’égare, je suis perdu, j’ai si froid…
-Va donc dans ma bibliothèque et choisis-toi un ouvrage. Histoire, philosophie, poésie, roman, choisis ce que tu veux et tente d’élever ton esprit et de t’extraire du bourbier de purin où tu t’es engoncé en regardant la télévision, machine d’oppression du peuple et tourbillon hypnotique de stupre.
Bitengranit sembla réfléchir un long moment.
Quand il parla ce fut pour dire
« -Il y a Les Fourmis dans votre bibliothèque ? »
Et Blanquettestein su que ce n’était pas gagné.
Résumé : Découverte par Bitengranit, via un documentaire animalier, de l'existence du mal. Bitengranit se découvre seul de son espèce, tristesse de Bitengranit, qui incline au mal. Blanquettestein tente de l'extraire de sa condition matérielle et de l'exhorter à de plus intellectuelles aspirations.
= chemin =
= résumé =
[ Découverte par Bitengranit, via un documentaire animalier, de l'existence du mal. Bitengranit se découvre seul de son espèce, tristesse de Bitengranit, qui incline au mal. Blanquettestein tente de l'extraire de sa condition matérielle et de l'exhorter à de plus intellectuelles aspirations. ]
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Offensive hivernale de la grande saga de l'été 2010. Ce n'est sûrement pas l'épisode le mieux écrit, mais il est sans doute dans l'esprit de départ et il fait le travail (je parle comme un commentateur sportif, maintenant).
Ma foi , j'ai préféré la première partie du texte à la deuxième, mais l'ambiance générale dégage un parfum de débilité cartoonesque pas désagréable.
Ce texte est, pour ma part, le meilleur de la saga jusqu'à présent. Plus contemporain, plus humain, plus accessible, moins pompeux, moins ambitieux mais plus drôle que les précédents. Je rougis d'avance quand viendra mon texte car il est nullissime et je n'ambitionnais pas un prix Goncourt aussitôt dans ma carrière d'écrivain. Sinon c'est quand même un peu soft niveau cul, on voit que l'auteure a du kilométrage au compteur en bpm, et c'est bien dommage que la donzelle ne se pointe plus dans le secteur pour encanailler tous les puceaux de loufteaux qui trainent dans le coin en ce moment.
Bien, bien !
Un peu longuet sur la fin.
Mais très bon démarrage, et surtout :
Stalagbite.
Avec un calembour comme ça, parfaitement placé, l'auteureusesse touche à la beauté comme modalité d'expression du divin et en profite pour racheter tous les péchés des mammifères.