Je me faufilai quelques blocs plus loin entre deux bâtisses abandonnées avant de m'engouffrer dans un petit tunnel noir qui menait vers mon quartier. Après l'avoir traversé, je continuai ma route, ne rencontrant personne en chemin hormis quelques gosses en vélo qui me dépassèrent pour retourner dans leurs foyers. Au bout d'un moment, je constatais quelque chose de bizarre. Les ruelles étaient devenues subitement obscures. Je vis que les lampadaires de ce côté de la ville ne fonctionnaient plus malgré le fait que certains d'entre eux émettaient encore une lueur mourante. Je me mis à frissonner sans raison. Peinant à distinguer le trottoir noyé dans les ténèbres de la nuit naissante, je hâtai le pas. Je ne croisai qu'une seule voiture tout au long de mon chemin qui vint vers moi avant de disparaître rapidement, avalée par l'orifice béant du tunnel.
L'endroit était désert, et pourtant j'avais la désagréable impression que quelqu'un marchait sur mes talons, juste derrière moi. À chaque fois que je me retournai, je ne vis personne. L'allée était vide et j'étais seul. En reprenant ma marche, je sentais néanmoins à nouveau la même présence invisible, très proche.
J'arrivai enfin chez moi. Je dus m'y prendre à deux fois afin de tourner ma clé dans la serrure de la porte tellement j'étais nerveux. Debout dans l'embrasure de la porte, je me retournais vers la rue. J'apercevais plusieurs silhouettes humaines qui se détachaient sur un fond gris dans les dernières lueurs vespérales du jour. Elles étaient tournées vers la maison et avaient l'air de me regarder depuis l'autre côté de la rue. Effrayé, je fermai la porte derrière moi. En allumant les lumières du couloir, je me sentis plus rassuré. Je vivais dans une vieille demeure construite par mes grands-parents qui commençait aujourd'hui à se délabrer. Ma grand-mère malade habitait seule ici. À l'étage, je la trouvai assise sur une chaise, fixant comme à son habitude le mur blanc du salon comme si elle y lisait quelque chose. Elle ne parvenait plus à parler depuis son cancer, ni même à comprendre ce que je lui disais. Son regard était pourtant satisfait. Elle avait le visage épanoui malgré le fait qu'elle mourait chaque jour davantage. Il y avait quelque chose qui me glaçait depuis que j’étais rentré, l'impression qu'un étranger s'était introduit ici, nous épiant, caché dans l'ombre des recoins de la pièce, sous la table, derrière le canapé, les pots de fleurs et les meubles.
Par la suite, j'ai commencé à m'affoler à cause de ce que j'observais par la fenêtre alors que je fermais les volets. En réalité, je ne voyais rien car la nuit d'encre avait enveloppé l’extérieur, absorbant dans sa noirceur ce qui entourait la maison. Je me résolus de quitter les lieux afin de me rassurer, de vérifier si cette impression de vide était due à un effet de lumière ou non. Je dévalai l'escalier et ouvris la porte d'entrée. Je voulus faire un pas vers l'extérieur mais mon pied de ne rencontra pas le sol. Je fis un bond en arrière. Je n'ai pas immédiatement compris ce qui était en train d'arriver. Ce que je vis alors me pétrifia sur place et je me tins immobile quelques instants, debout dans l'embrasure de la porte. Dehors, un immense gouffre noir s'étendait à mes pieds. Les marches de ma maison, la rue, la ville et le ciel avaient totalement disparu. L'univers entier semblait s'être désagrégé, laissant place à un chaos infini. C'était comme si un dessinateur avait gommé l'ensemble de son ouvrage, rendant ainsi sa feuille vierge. Ma maison avait l'air de flotter telle une tache dans cet incommensurable vide. Il y régnait un silence de mort. Apeuré, je décidai de jeter l'un des stylos de ma poche vers l'endroit où devait se trouver normalement la pelouse du jardin. Il est tombé bien en dessous du niveau normal du sol, et j'ai suivis sa chute du regard jusqu'à ce qu'il disparaisse dans l'abîme après avoir progressivement rétrécis dans le vide. J'éprouvais une sensation atroce de vertige. Je n'arrivais pas à comprendre comment un tel néant avait pu engloutir le monde. Je croyais voir un millier d'ombres noires qui étaient là, m'observant depuis l'extérieur.
J'ai fermé ma porte à double tour, puis je suis remonté en titubant à l'étage. Ma grand-mère n'était plus là. Le fauteuil où elle était assise était vide. Il ne portait même plus l'empreinte de son corps alors qu'elle s'était assise dessus toute la journée. Je l'appelai par son nom pendant quelques minutes dans toutes les pièces de la maison. Les murs renvoyaient l'écho de ma voix. La demeure était désespérément trop calme. Au bout d'un instant, l'éclairage des lampes commença, puis s'est définitivement éteint. Je m'orientai en longeant les murs. Je pressentais des présences très proches de moi qui s'évanouissaient une fois que je les palpais. J'allai pousser un dernier appel, lorsqu'un profond soupir retentit derrière mon épaule. Je pensais alors que ce bruit avait été émis par ma grand-mère. En faisant volte-face, je n'aperçus que les formes floues du buffet et de la table qui émergeaient dans la pénombre. Mes cris devinrent des gémissements d'angoisses, et à chacun de mes hurlements répondait le même soupir désenchanté.
Mes yeux se sont peu à peu adaptés aux ténèbres et j'ai pu alors apercevoir de grandes silhouettes humaines qui se tenaient prostrées aux coins des murs, immobiles. Elles me regardaient comme des animaux qui dévisagent une proie. Elles se sont alors progressivement avancées en cercle vers moi. Je me suis accroupi, rampant pour leur échapper mais d'autres ombres approchaient vers moi depuis l'escalier. Elles m'ont attrapé, puis m'ont enveloppé dans leur corps d'ébène. Je me sens mieux à présent.
C'était le soir. Je rentrai d'une journée de travail comme les autres, c'est à dire monotone, vide, et triste. La vie avait perdu de son sens depuis bien longtemps déjà. Depuis plus de quatre ans, la dépression rongeait mon âme tel un fluide corrosif circulant dans mes veines. J'avais tout le temps envie de mourir. Le bus me déposa dans une rue située à quelques kilomètres de la maison de banlieue où j'habitais. Les passagers qui descendirent avec moi se dispersèrent, puis disparurent aux coins de la rue. Le soleil, déjà très bas dans le ciel, faisait faiblement briller les façades des maisons d'une lueur vermeille. L'avenue, plongée dans l'ombre portée par les grands immeubles, semblait s'étendre à l'infini derrière l'arrêt de bus.
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First attempt, huhu.
Ouais, tu t'es pa gourré dans le résumé. En tous cas c'est monis névrosé qu'Holocaust qui était plus mauvais et trop délirant.
Au fait, y'a un moyen de se choper un mot de passe pour que je publie mes textes sous un seul et même compte?
oui ne pas en parler avec moi car j'ai rien entravé à ce que Dourak m'a expliqué en binaire. Sinon j'aimerais bien que les deux versions de ton texte restent publiés. Ce serait un concept, un auto serial edit correctif one shot en quelque sorte.
Ah non, mais j'avais fait la même connerie pour Holocaust aussi. En gros, il y avait un tas de fautes de frappes et de syntaxes (encore là maintenant) que j'ai pas réussi à corriger. D'ailleurs, il y a des mots qui manquent dans cette version là aussi, et une erreur imparfait/passé simple que je ne remarque que maintenant.
Le prochain, je le publierai 1 semaine après l'avoir achevé, ça me laissera le temps de nettoyer mes conneries. Publier le second attempt ne servirait strictement à rien, vu qu'il y a que 2-3 erreurs de syntaxes de corrigées.
non on va dire que c'est conceptuel comme ça on garde mes deux commentaires RIGOLOS que je me suis cassé le cul pour tout relire et trouver les erreurs.