Lss gens me vouvoyaient. Mon regard n’était pas celui d’un enfant, il refletait une expression sombre et intériorisée.
J’avançais à pas lents et mes gestes aussi étaient effectués avec lenteur. Ils étaient précis. Je n’étais pas maladroit. J’étais capable de subtilité et de douceur mais je ne le montrais pas. J’aimais faire peur, j’aimais voir dans le regard des autres l’incertitude, la méfiance, la crainte, j’aimais qu’il n’osent pas me dire ce qu’ils pensent, qu’ils gardent leur mépris. Il ne me respectaient pas. Je les effrayais. Comme un ours. Ou un loup.
Ma voix a mué très tôt, j’ai pris ma voix d’adulte vers quatorze ans, une voix profonde. Je parlais lentement, je pesais bien mes mots, ce qui avec mon physique donnait une impression de stupidité. Je m’en foutais. Ca ne m’intéressait pas de leur montrer mon intelligence, je préférais qu’ils me voient comme un crétin dangereux, c’était beaucoup mieux comme ça, comme une brute idiote et violente. Ils ne sauraient jamais qui je suis réellement. J’étais un prédateur, je me dissimulais dans l’ombre.
68 : 32
Dans le dernier rêve dont je me souvienne avant que tout finisse, avant que les démons ne soient vraiment là, je chiais. J’étais devant la maison de mes parents et je chiais, je chiais, je n’en pouvais plus, c’était un long boudin marron, sans fin, qui sortait de mon corps continuellement et s’enroulait sur le sol, je n’en terminais pas avec cette merde, j’étais accroupi, et je chiais, il faisait soleil et ça se passait devant la maison de mes parents. D’un coup je me suis rendu compte que ça n’était pas le bon endroit pour ça et que je devrais aller aux chiottes alors je me suis relevé et je chiais toujours, je me suis relevé en chiant, il y avait déjà au sol au moins deux mètres de merde enroulée comme une chipolata et toujours était reliée à mon cul. Je chiais sans discontinuer, même debout, j’ai alors pris l’énorme boudin enroulé entre mes mains pour le porter aux chiottes. J’étais dans le couloir d’entrée. Je cherchais les chiottes. Je n’avais pas pu tout prendre, j’avais du sectionner le chapelet et en abandonner une partie. Je chiais toujours. Je déposais une partie de la merde au fond des chiottes et puis je revenais chercher ce que j’avais laissé de côté, et ce faisant je chiais encore et j’étais contraint d’en laisser encore une partie dans un coin en attendant, et ça n’en finissait plus. Au bout d’un moment j’ai vu mon frère et ma sœur se tenir devant moi et me demander ce que je faisais. J’étais incapable de leur répondre. Je continuais à charrier ma merde et à en remplir les chiottes et mon cul en produisait toujours.
Voilà. C’était mon dernier rêve. En tout cas c’était le dernier dont je me souvienne.
A la fin les démons sont venus, pareils à mes visions. Il est temps que je les décrive. Leur nom collectif, c’était Anteros. J’ignore ce que ça voulait dire. C’est comme ça qu’ils s’appelaient. Anteros étaient onze.
69 : 31
Le premier c’était Makout, le royaume. Il prenait les traits d’une vieillarde habillée en pute. Sa peau était ridée et flasque, avec un goître sous le cou. Les grandes lèvres et le clitoris de sa chatte fripée et épilée pendaient. Elle portait une perruque platine avec une frange qui lui tombait sur le front, une guépière noire, des porte-jarretelles et des talons-aiguilles noirs. Elle avait des faux ongles longs comme ceux des pornstars. Beaucoup de maquillage. Pas de dent. Sa langue pouvait s’allonger et durcir à volonté, selon qu’elle me suçait ou qu’elle me pénétrait. Malkout était le maître du sexe. Il me violait et j’adorais ça. Il buvait mon sperme.
Le deuxième c’était Yézod, la fondation. Il prenait les traits d’un vieux. Une infirmité des os déformait son squelette et lui donnait une silhouette de bossu. Ses bras était courts et maigres, et ses jambes longues et maigres. Il portait des vêtements dégueulasses qui dissimulaient une peau malade affligée de cicatrices, de croutes et de lacérations. Il jouissait de la douleur. Celle qu’il infligeait, celle qu’il recevait, c’était le maître de la soumission. Il m’apprenait à prendre mon plaisir dans la torture. Il me donnait des idées. Il me faisait mal tandis que Malkout me baisait avec sa langue brûlante et acérée. Il léchait ma douleur. Son regard devenait le mien.
Le troisième c’était Od, l’impuissance. Il prenait les traits de deux frères siamois reliés par les hanches. deux têtes, deux bras, quatre jambes. Deux nombrils. Ils avaient une maladie de peau. Des fistules partout, des croûtes jaunâtres, du pus qui suintait, des crevasses sanglantes à force d’être grattées, les gencives pourries qui saignaient en permanence, les dents cariées, des abcès, des kystes infectés. Ils me sont apparus la première fois qu’on m’a enlevé à ma mère. Ils sont les maîtres des prisons, des asiles, des lieux clos, des endroits où l’on entre pour ne jamais en ressortir, ils sont les maîtres des neuroleptiques et ils sont la psychose et la mort.
70 : 30
Le quatrième c’était Netzak, la défaite. Encore une vieille femme, une clocharde, qui se camait. Elle se shootait avec un mélange de sperme et de sang que Malkout me prélevait avec sa langue et lui injectait ensuite. Quelquefois Netzak usait directement de ma queue ou avec mes artères, qu’elle arrachait comme des tuyaux et se plantait comme des seringues dans ses pores dilatés. Netzak jouissait de voir les êtres sans défense souffrir et jouissait de voir humiliés les faibles. Elle était aux côté de Yézod pour m’apprendre la torture. Son regard et sa voix me faisaient horreur. Elle me transformait en objet et elle m’enseignait la manière d’infliger cela aux autres.
Le cinquième c’était Tiferet, la laideur. Il prenait l’apparence d’un fœtus avorté pour raison médicale, qui présentait des signes évidents de mongolisme. Il ne bougeait pas, il ne parlait pas, il restait là et ses pensées informes se mélangeaient aux miennes. Il n’était ni mort ni vivant mais dans un constante agonie, baigné d’un liquide poisseux et clair. Tiferet était le maître de la répulsion et des lieux effrayants, des geoles et des phobies. A travers ses pensées j’ai pu construire mon sanctuaire. Je ne l’ai jamais touché, je ne plongeais pas mes yeux dans les siens. Il haïssait les animaux et les insectes, il haïssait mes victimes aussi, il m’aimait.
Le sixième c’était Gueboura, la violence. C’était un homme mal habillé de l’âge de mon père. Ses mains ruisselaient de sang et il avait un regard fou. Il bandait en permanence. Il aimait me frapper, me sodomiser, me voir à quatre pattes, il aimait que je l’implore de me tuer. Il aimait qu’ensuite je fasse ça aux prisonnières du sanctuaire. Il était le maître des viols et de la violence infligée par les parents aux enfants. Il m’inspirait beaucoup. Quand je violais Florence ou maman il me branlait. Il astiquait ma bite et malaxait mes couilles. Quelquefois il me violait. Sa bite épaisse m’éclatait le cul. Alors je criais de plaisir.
71 : 29
Le septième c’était Essed, la vindicte. Il prenait les traits d’un adolescent victime de la lèpre. Il lui manquait des doigts à une main, le nez et la plupart des dents. Sa peau était brune, crevée en de nombreux endroits où elle suppurait un mélange de sang et de pourriture, elle ne cicatrisait pas. Il était aveugle. Ses yeux étaient deux plaies jaunâtres. Il était le maître de la vengeance. Il m’assistait dans mes traques, il était à mes côtés quand je pensais à Florence ou à maman. Nous étions amoureux. Il était émasculé. A la place de sa queue, un trou purulent que je léchais. Il avait des orgasmes puissants.
Le huitième c’était Bina, la méchanceté. Trois vieux, un homme et deux femmes, qui passaient leur temps à se doigter et se branler. Leurs voix devenaient sans prévenir des voix d’enfants. Ils me parlaient souvent mais je ne les aimais pas. Il attisaient ma méchanceté, ils se moquaient de mes souffrances. Bina était le maître de la torture mentale et de l’horreur morale. Ils sont tenus à mes côtés tout au long de mon agonie et m’ont accablé de sarcasmes et de cris de jouissance. Ils puaient le sperme et la mouille rances. A la fin, quand je n’avais plus de force, ils me violaient. La vieille me tétait les couilles.
Le neuvième c’était Okma, la folie. Il apparaissait sous la forme d’un grand brûlé. Il était nu et entièrement calciné. Ses organes génitaux avaient disparu. Ses pieds et ses mains était devenus des moignons irréguliers. Il n’avait plus de visage. Une bouche sans lèvre ni dent, un simple trou, des orifices à la place du nez, des oreilles et des yeux, plus de cheveux, plus de peau sur le crâne, l’os brûni par les flammes. Il était le maître des cauchemars et des enfers. C’était le premier à m’avoir connu. Il était l’homme noir de mes fantasmes. Quand la syphilis m’a tué il a été mon guide. J’avais peur de lui.
72 : 28
Le dixième c’était Keter, la fin de toute chose. Il prenait les traits d’un cadavre pareil à ceux que j’abandonnais dans la fosse. Mais il parlait, bougeait, pensait et ses pensées venaient jusqu’à moi comme des émanations, des ondes pestilentielles. Il déchirait un à un les voiles qui séparaient mon monde du leur, il était le maître du passage, du chaos, des deux mondes. Il assistait Okma. Lui aussi s’est tenu à mes côtés tout au long de ma maladie. A chaque étape de mon agonie il me rapprochait des enfers. Ses pensées haineuses augmentaient mes souffrances. J’avais peur de lui aussi. Il aimait me branler mais je ne bandais pas.
Le onzième c’était Anteros. Anteros était tout à la fois les onze dans leur ensemble, la synthèse de tous et le onzième : leur chef, leur maître à tous. Je sentais sa présence comme un écho, comme un pressentiment. Quelque chose qui parasitait la conscience. Je le sentais même sur ma peau, quelque chose d’électrique, d’indéfinissable, une sensation à la lisière de la douleur mais qui n’en était pas, un voile à la limite de la fièvre posé sur le regard. Je sentais le lien entre eux, je ressentais Anteros à chaque instant, même quand les autres n’étaient pas là. Il m’avait marqué. La terreur qu’il m’inspirait ne me quittait jamais.
Ils m’avaient donné le pouvoir. Ils m’avaient aimé et donné du plaisir. Ils avaient observé et protégé mon enfance. Grâce à eux j’étais parvenu à un sommet de puissance. Ils étaient avec moi en chaque chose et pour toujours. Je les sentais contre ma peau comme une enveloppe de cellophane, collée, invisible, trop fine pour être otée mais étouffante, suffoquante, qui me tuait. Anteros m’aimaient. Je l’aimais. Le sanctuaire, la traque, c’était grâce à eux, sans eux peut-être que je me serais suicidé. Dès ma naissance j’ai été à Anteros. Pour toute ma vie. A la fin, avant que la maladie ne me tue, je crachais du feu par mes doigts.
LA ZONE -
67 : 33
J’ai toujours eu l’apparence d’une brute. A l’école primaire j’étais plus grand et plus costaud que tous les autres enfants. En quatrième je pesais soixante kilos pour un mètre cinquante-cinq. Je commençais à avoir du duvet au menton. Au lycée je mesurais un mètre quatre-vingt-sept et pesais plus de cent kilos. J’avais une barbe épaisse et noire, des cheveux noirs que je coupais courts, des yeux noirs. J’avais la peau mate. Je transpirais beaucoup. Je sentais la transpiration. Je m’habillais toujours pareil, un blue-jean, des pulls épais, un blouson de cuir. Je portais une paire des chaussures solides, des chaussures de marche. Je n’avais pas de bonnes dents, beaucoup de caries, je ne me lavais presque jamais les dents et j’avais une haleine chargée.J’avais des grosses mains souvent égratignées ou écorchées et une démarche pesante. Je faisais penser à un bucheron, je pense, et en tout cas, pas à un lycéen. Je faisais peur à tout le monde.
J’ai toujours eu l’apparence d’une brute. A l’école primaire j’étais plus grand et plus costaud que tous les autres enfants. En quatrième je pesais soixante kilos pour un mètre cinquante-cinq. Je commençais à avoir du duvet au menton. Au lycée je mesurais un mètre quatre-vingt-sept et pesais plus de cent kilos. J’avais une barbe épaisse et noire, des cheveux noirs que je coupais courts, des yeux noirs. J’avais la peau mate. Je transpirais beaucoup. Je sentais la transpiration. Je m’habillais toujours pareil, un blue-jean, des pulls épais, un blouson de cuir. Je portais une paire des chaussures solides, des chaussures de marche. Je n’avais pas de bonnes dents, beaucoup de caries, je ne me lavais presque jamais les dents et j’avais une haleine chargée.J’avais des grosses mains souvent égratignées ou écorchées et une démarche pesante. Je faisais penser à un bucheron, je pense, et en tout cas, pas à un lycéen. Je faisais peur à tout le monde.
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J'ai pas lu la cabbale mais ça donne envie.
Ca se lit bien, quoiqu'un peu froid, mais la question, c'est POURQUOI? POURQUOI UN TEL TEXTE BORDEL DE PUTE§§
Bon du coup je vais lire les autres. Merde.
C'est sur que sans le reste de la rubrique ça doit valoir un glaçon sans la vodka qui va avec.
Sinon je regrette la fin des gravures du pote de Konsstrukt, ça déclinait un peu sur la fin, mais ça donnait une bonne homogénéité à l'ensemble. Et ça m'évitait de me casser le cul.
Du coup j'ai lu les cinq premiers puis ça m'a lourdé. Les deux premiers sont bons, mais ça se paume un peu après, à mon goût.
J'y reviendrai plus tard. Et je commenterai sur celui ci.
Très gros bof, franchement, par rapport au potentiel de ce genre de sujet pour faire un texte halluciné.
On se heurte à deux limites Konstruktiennes. D'abords, le morcellement des textes, qui finit par lasser le lecteur après quelques épisodes. Ensuite, le style. C'est très plat.
Plat comme ton EEG?
Tu fais partie du collectif ?
Je sais qu'on est tous loggés, mais à ce point-là...