On s’est rencontré à vingt ans, l’âge animal après l’âge bête, et avant la péremption. Notre première entrevue avait été hormonale, expérience non philatélique au possible. On ne savait même pas nos prénoms qu’on était déjà en train de se frotti-frotter. Magnétisme absolu de deux corps devenus des machines à baiser. On était tous deux à une réception de campagne chez un ambassadeur du mauvais goût. La soirée avait une tête de requiem, qu’on avait tous les deux envie de transformer en orgie satanique. Bref, après frotti-frotta, tralala, turlutte, tête bêche, levrette, tagada tsoin tsoin dans un tas de foin qu’était pas loin. C’est la paille dans le nez, le visage collé à sa fesse, que j’ai appris qu’elle s’appelait Hélène. « Hélène ? Mais c’est un prénom de bouchère de village, ça ? » Vlan, une baffe dans la tronche, la tronche dans la paille, début de nos trips sado-maso du dimanche, jour du Seigneur, alléluia.
De ce moment-là, on n’avait pas décidé de ne plus s’arrêter. Mère Nature, Mère Maquerelle, Reine du Bordel, nous forçait une cadence tambour battant, tympans battus par un rythme cardiaque suicidaire. Nous avons réalisé une vie entière de rapports sexuels en l’espace d’un mois ou deux. On a baisé en ville, à la campagne, dehors et dedans, dans tous les trous (on en aurait bien inventé en plus des trous), dans tous les sens. On a baisé sur l’autel de l’église, dans la bouse fraîche et sur l’étal du boucher. On faisait nos courses engodés de partout en gémissant comme des veaux, avant de se percuter dans la voiture aux vitres non teintées, se dégodant, se regodant de conserve, etc.
Au bout de quelques mois, je ne connaissais toujours rien d’elle, hormis son point G, qu’elle préférait le martinet au ceinturon, qu’elle s’activait toujours de la langue quand elle suçait, qu’elle aimait par-dessus tout la double pénétration, et que, sensible des poignets, les menottes la laissaient de marbre. Elle savourait toujours les petits plaisirs postliminaires du nettoyage buccoanal réciproque, l’échange des baisers devenus forts en gueule, et la remise conséquente du couvert. Remettre le couvert. On ne débarrassait même plus la table, plus le temps, plus l’énergie, plus l’espoir de faire autre chose de sa vie.
Quand, par la force des choses, on a ralenti la cadence, parce que fallait quand même trouver pitance entre deux pénétrations complexes, alors on s’est mariés, vite fait, vite fait l’abbé, abrège monsieur le maire, magne tes fesses, il y a urgence. En ce temps-là, on jouait encore aux rois de la baise. Ni sa belle robe, ni mon costume n’étaient sortis indemnes de cette mémorable noce à goût de stupre. Pourtant, on avait bien commencé à freiner le rythme. On a réussi à tenir au moins une heure, l’un à côté de l’autre, sans gode, sans bite au cul, sans doigt dans la chatte, sans rien. C’était pénible. Ça, c’était pénible. Mais supportable. Les hormones avaient commencé à nous lâcher, putain de sa mère.
La débandade en un temps record. On est passé, presque d’un coup, de « passe-moi le vibro » à « passe-moi le sel ». Sans vraiment de transition, ça la fout mal. On a rapidement découvert qu’on n’avait rien à partager, rien à se dire, foutrement rien à se dire. On se regardait avec des yeux confits dans le saindoux. Parfois, j’avais un sursaut de bandaison, quand je la voyais traîner une cuisse dénudée en descendant l’escalier… qui se transformait en gelée anglaise dès que nos regards se croisaient, échange à vide de rien du tout. Nos gadgets prenaient la poussière. Et ça colle, la poussière, sur un sex toy. Avant le mariage, on ne s’était jamais vraiment, regardés, les yeux dans les yeux, cherchant un contact d’humain à humain. Après, et bien, c’était après. On sait qu’on va vieillir, que la verge se ramollit en même temps que le cuissot, que ça va commencer à devenir pénible, de sortir l’artillerie et de tirer sa grenaille. Peau douce contre peau douce devient râpe à fromage contre jonc de mer. Alors s’il n’y a pas de compensation, du genre discuter ficus ou cinéma asiatique, on sait qu’on est foutu, à terme. On ne va pas au casse-pipe avec le sourire aux lèvres, ça non.
Avec Hélène, on commençait à se douter qu’il n’y aurait plus RIEN entre nous. Que le vide à se mettre sous la dent. Et après les muqueuses pleines de jus, il y a de quoi flipper. Alors, Hélène a commencé à faire du gras et moi à picoler comme un cochon, cochon frustré que j’étais. On baisait encore un peu, de temps en temps, pour faire illusion ou pour faire passer le dimanche. Mais, au bout d’un moment, il faut avoir beaucoup d’imagination, pour avoir la gaulle. Quand on ne sait plus ce qu’on a dans la main, un sein ? Un repli de graisse abdominale ? Un goitre ? alors, on n’y arrive plus. Toute cette chair molle, ce début d’odeur de naphtaline, l’apathie manifeste de la grosse vache qu’on tringle. Trop c’est trop.
Au bout de quelques années, j’ai réussi à me foutre le foie en compote de coing. J’avais le blaze qu’avait doublé de volume, et pas harmonieusement, l’œil rouge et humide et les pruneaux desséchés. Elle ! Elle n’en finissait plus de s’alourdir, de se recouvrir partout de cellulite, des pieds au menton. L’œil s’affadissait, lui aussi, à mesure qu’il disparaissait sous des paupières devenues tombantes. Elle n’avait, pas plus que moi, le regard vif ni intelligent, ce qui est bien utile, quand on devient laid, désespérément hideux. On a fini par se séparer, sans même se gueuler dessus, tellement on était lessivés. Je sentais que mon foie devenait énorme et pourri. J’étais cuit, je le sentais bien. Alors, j’en ai remis une couche pour accélérer la décadence. Je voulais crever ferme avant l’âge du Christ, rien que pour baiser la gueule à Dieu. Et là, j’ai vu…
J’ai vu Hélène retrouver sa beauté. Au début c’était par bribes. Elle avait un peu minci, son triple menton qui devenait double. Je la croisais de temps en temps, et chaque fois, le changement se faisait plus spectaculaire. Sans être aussi fraîche, c’était bien Hélène, mon Hélène au clitoris radieux, à l’anus gourmand, à la chatte insatiable et à la gorge profonde. Le regard du branleur se tournait vers son entrejambe qu’on pouvait à nouveau deviner. Elle était belle et moi, comme un con, je m’étais suicidé à l’éthanol, incapable de bander, et même plus foutu de séduire une grenouille de bénitier. J’ai compris que tout était de ma faute. Je la traitais comme une truie, elle est devenue une truie, une vraie. C’est moi, qui lui avais foutu le lipide au cul, à force de lui lapider le con. Chacun de mes regards concupiscents avait collé une couche supplémentaire de gras sur son ventre. Une femme ça a besoin d’autre chose pour rester belle. Mais quoi, bordel ? Je n’étais qu’une bite et n’avait que mon foutre à donner. Et elle, elle trémoussait ses fesses de rechange au marché couvert, alors que moi, je n’en avais pas, de foie de rechange. Le combat était devenu inégal. Pour elle, la vie, pour moi, la mort avinée.
Pas question, Hélène, pas question que j’aille crever tout seul pendant que t’iras éreinter un autre pauvre mec. Pas une justice, ça, ma vieille. Je sais, je te parle, même si tu ne m’entends plus, Hélène, dans tes sacs poubelles, ceux de jardin, les verts, c’est du costaud, pas de problème pour les lester avec de bonnes vieilles briques. Tiennent le coup ces sacs, pas de la merde. Au fait, merci pour la perte de poids, c’est plus facile à transporter… Hélène.
LA ZONE -
Avec Hélène, tout a tourné à la haine. Le problème, avec les histoires de cul, c’est qu’elles s’affaissent en même temps que la fesse. On a niqué tant qu’on pouvait, jusqu’à s’en faire mal. La prostate enflammée, le vagin défoncé, le clitoris ressemblant à une minuscule bite, tellement il était chauffé au rouge. On n’a pas idée, de baiser à ce point là, du matin au soir, du soir au matin. Des jours, on ne bouffait même plus autre chose que nos muqueuses gonflées. Les nuits, ah ! les nuits, c’est là que ça se réveillait vraiment, mes aïeux ! On ne savait même bien plus si la bête avait deux dos. Des membres, ils y en avaient qui sortaient un peu de partout, de temps en temps. Du foutre, comme si l’en pleuvait, des fontaines de chatte, de la merde et de la pisse, quand on n’arrivait même plus à contrôler nos sphincters. On n’était jamais repu, on s’arrêtait toujours rompus, obligés de s’éloigner l’un de l’autre d’au moins vingt mètres, ne serait-ce que pour récupérer un peu. On s’en serait fait péter les artères.
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Et gna et gna, et je te retourne, et gna et touche à ton cul. Je suis plutôt d'accord avec nihil [empaillé soit son cul].
Non en fait il y a quelque chose qui m'a totalement brouté le cuir chevelu : le style jeux-de-mots-hihihi-LA REGARDE J4AI FOUTU UNE SONORITE UN TRUC TROP BIEN CA PAYTE SA MAMAN A NIVEAU DU PALAIS PRES DE LA GLOTTE. Non.
"lles s’affaissent en même temps que la fesse"
Dieu-tout-puissant empalez-le par la raie.
"tagada tsoin tsoin dans un tas de foin qu’était pas loin."
Cher Dieu,
Faites le mourir pour Noël.
"ne cadence tambour battant, tympans battus par un rythme cardiaque suicidaire"
TA GUEULE.
Voilà, 3 paragraphes et j'ai envie de lui faire manger ses jeux de mots par le sacrum. Ce qui est bien dommage parce que la suite est plus digeste, ma bonne dame. C'est pas révolutionnaire, ça casse rien du tout aux Canards, mais c'est divertissant.
La fin [j'ai écris "faim", dans un premier temps, et c'est stupéfiant parce que Freud est un crétin, mais parfois, surtout quand j'ai faim, il est perspicace] est lourde comme un UN PUTAIN DE PAVE DE RUMSTEACK AVEC UNE SAUCE AUX TROIS POIVRES ET JUSTE UN PEU ROSE A L4INTERIEUR, et j'aurais préféré une conclusion plus pathétique. Plus sobre.
Plouf.
pas possible de lire au-delà du jeu de mots initial
désolé
manque de savoir-vivre évident
c'est comme roter à table
Bis repetitae pour les jeux de mots. D'ailleurs, du fait de ces putains de tournures de phrases de merde, la fin devient fade.
Bon, je vais aller vomir.
"Nos gadgets prenaient la poussière. Et ça colle, la poussière, sur un sex toy."
Grand.
Les jeux de mots je trouve juste que ça fait chanter le texte, je vois le problème, mis à part pour affaissent/fesse, évidemment.
Mais en même temps, je trouve aussi que rôter à table fait partie des petits plaisirs de la vie.
commentaire édité par Aesahaettr le 2008-11-15 13:25:54
Le problème c'est quand les jeux de mots sont éculés au possible. Et là c'est le cas. Ca ressemble à des coups de coude graisseux dans le bide pour te dire HAHAHA QU4EST8CE QU4ON SE MARRE? HEIN? CAUPAIN.
Bah moi ça m'énerve.
Je vois pas comment ça pourrait faire "chanter" le texte. Faudrait peut-être pas confondre n'importe quel calembour ou jeu de mots avec des figures de style. C'en est plutôt une absence.
Déprimant.
J'ai relu deux fois l'intro pour trouver ces fameux jeux de mots : sans succès.
Le pb c'est que je ne les vois même pas. Du coup je suis partagé entre le texte plutot pas mal écrit et raconté, on entre dendans facilement et on se laisse coulé, et mon potentiel manque de discernement / subtilité...
Hélène / haine, affaisse / fesse, y en a quelques autres du même tonneau, notamment relevés par Strange, on va pas en faire un catalogue pour éviter de foutre la honte à notre ami MC Solaar.
Bah, si le calembour n'est pas une figure de style, alors je sais pas, la synecdoque non plus, tiens, allez, disons cela, voila.
Et si tu prends ça comme des vannes, c'est sûr que c'est horripilant, c'est comme vouloir se forcer à rire en regardant Public Sénat et en s'offusquant que c'est pas drôle et en balançant des quérons dans la télé.
J'ai vu ça comme des rimes en plein milieu des phrases, j'ai trouvé ça très plaisant.
Vous n'avez aucun sens de l'art.
Je m'en vais écouter mon album de Grand Corps Malade.
Là faut reconnaître que ça manque totalement de subtilité. Putain les calembours au bulldozer qu'on te balance à la gueule en te hurlant avec un mégaphone "HEIN OUAIS C4EST TROP KOOL QUAND 9A RIME HEIN , HEIN OUAIS J4AI TROP UN FLOW DE SA RACE ENCUL2 §".
Faut vraiment s'appeler Lemon A pour pas trouver ça encombrant.
"se regodant de conserve"
J'ai pensé à des légumes.
Et jusqu'à la fin du texte, j'ai pensé à des légumes. Plein de légumes. Dans des paniers. Avec des couleurs ternes.
Ce texte est terrifiant.
@nihil : pas de honte à avoir, j'ai passé l'âge d'être fier de mon caca. Donc, j'assume ce texte gras comme un cochon, sans aucune once de subtilité, juste pour le plaisir d'être gras, et de roter à table. Ce texte ne revendique rien d'autre que ce qu'il est : une tâche de gras sur le tablier du boucher.
J'espère que t'assumes aussi ton commentaire... finalement plus consternant que le texte...
"La soirée avait une tête de requiem, qu’on avait tous les deux envie de transformer en orgie satanique."
Y'avait de l'intention, là.
"Bref, après frotti-frotta, tralala, turlutte, tête bêche, levrette, tagada tsoin tsoin dans un tas de foin qu’était pas loin."
Terminé, tout le monde descend. Pas zonard, et pas suffisamment bon pour que ça vaille le coup.
Les jeux de sonorité ont déjà été assez commentés, passons. La fin du texte rehausse le niveau : empreinte d'amertume, elle est gâchée pourtant par un dernier jeu de sonorités inutile (lapider le con/lipide au cul). La chute est caricaturale ; il pourrait pas se contenter d'être une merde ?
Ah, et le coup de la baleine qui se transforme en mannequin, ça sort de nulle part et pourtant c'est censé justifier le texte.
"Quand on ne sait plus ce qu’on a dans la main, un sein ? Un repli de graisse abdominale ? Un goitre ? alors, on n’y arrive plus. Toute cette chair molle, ce début d’odeur de naphtaline, l’apathie manifeste de la grosse vache qu’on tringle. Trop c’est trop"
Moi c'est ce que je préfère, merde !
Du bon et du moins bon mais c'est généreux. Efficace comme un hard discounteur allemand.
Après six semaines sans en avoir rien à foutre de ce texte, force m'est d'avouer qu'il est entêtant ; y'en a encore des bouts qui flottent dans mon crâne.
Et le fait d'en avoir gardé des morceaux entre les dents me force à reconnaître que c'est plus qu'un amuse-gueule, ce machin - une fois virés les bouts de collagène.
Cela dit, sans le relire, c'est forcément meilleur...