J’ai lu hier soir le message d’un type sur internet. C’était un débat, une discussion et ce monsieur défendait son point de vue.
J’ai lu, et j’ai senti un arrière goût de gerbe dans la gorge. Un truc qui me rappelait toi. Un truc qui était tout à fait lié à toi. Si l’auteur du message dont il est question n’écrivait pas aussi bien, et si le contenu de son message avait été bancal, je crois qu’il aurait été difficile de me convaincre qu’il ne s’agissait pas de toi. J’ai eu envie de cogner. Sur toi, de préférence, copain.
Les méthodes utilisées par ce mec pour défendre son opinion étaient comparables à celles que tu employais invariablement, quelque soit l’objet de la discussion (économie, lessive, capitalisme, poubelles, Georges Bataille, couple, le communisme qui renaîtra de ses cendres par l’ultralibéralisme, les courses). Je parle du mépris, de la condescendance, de l’arrogance, de la mesquinerie. Vas-y que je t’écrase par tous les moyens, vas-y que je te démontre que toi qui as l’audace, que dis-je, l’ignorance, l’inconscience, la stupidité, l’insolence de prétendre une seule seconde que tu peux, sombre merde, me regarder, me parler sans me lécher le cul, ou comble de tout, T’OPPOSER à ma superbe, toi, je vais te détruire, par tous les moyens les plus bas. C’est de ça que je parle.
Pour te faciliter l’appréhension de ce que je vais te dire, je vais utiliser ces mêmes procédés de Grande Rhétorique, les seuls qui conviennent à ton Auguste Personne.
Pauvre con.
Tu te masturbais. Tout était prétexte à te branler, souvent très mal, et à admirer ta prétendue verve. Tu t’adorais, tu te vouais un culte. J’avais raison, Narcisse n’est pas mort.
Ta forme, de prime abord.
Systématiquement, je te faisais remarquer la tournure agressive, insultante, vindicative que prenait ton ‘argumentaire’, tout prêt que tu étais à éjaculer de ta magnificence, et tu me rétorquais, en substance, plein de la suffisance dont tu es capable : « Pauvre conne, tu démontres ta superficialité en t’attardant sur la forme ». Tu le disais moins bien, certes, mais c’est à peu près ça.
Petite merde.
Le fond, ensuite.
Concentration, j’éliminais tous les rictus d’onanisme qui te défiguraient, et je m’y attelais. Je me revois, fraîchement débarquée chez toi, en train d’essayer de comprendre ce qu’il m’arrivait. Je te voyais devant moi, en train de gesticuler, de hurler, et moi, pauvre folle, en train de me contenir pour me concentrer sur ce que tu braillais, de rassembler mon courage pour te répondre le plus intelligemment possible, sur le fond.
La Grande Rhétorique - j’insiste - ou ta riposte sur le fond.
Incroyable. Là, invariablement, le fond avait miraculeusement disparu. Tu changeais de dimension, boum, split sidéral, tu basculais dans la connerie la plus crasse. Surprise ! Pour réponse, tu me dénigrais, tu me trainais dans ta merde, tu accouchais d’un raisonnement tortueux, tu accumulais tout ce qui pouvait m’être douloureux, et tu me les enfonçais là, bien dans les entrailles. C’est à peu près tout ce que tu arrivais à m’enfoncer correctement dans les tripes, il faut le reconnaître. Et me voilà qui retombe dans mes anciens travers… j’essaye de te trouver des excuses.
Tu m’interrompais - souvent au sujet, ô ironie, de la forme - tu ricanais avec dédain le temps de te remémorer toutes ces choses à propos desquelles je m’étais complètement, naïvement, ouverte, et tu déballais. Méthodiquement, tu prenais toutes ces choses, tu en faisais de la merde, et tu me les jetais dans la figure avec la violence que tu jugeais la plus apte à te divertir. Tu partais, tu me laissais là, sidérée, bonne nuit.
Le lendemain, il était de toute évidence mesquin de ma part de revenir dessus, après tout, ce n’était qu’une petite joute verbale, ma chérie, tu as perdu, j’utilise les grandes méthodes de la Rhétorique, je suis très fort à ce jeu, sans rancune, ta gueule s’il te plaît, maintenant.
Je m’étonne, là, face à toi et à ta gueule de consanguin, alors que toutes ces absurdités me reviennent en mémoire, du haut degré d’endurance dont j’ai fait preuve. Puis j’en ai eu marre, je t’ai demandé de changer de méthode. Tu as tenu ta promesse jusqu’au jour où je me suis à nouveau opposée à toi.
Le pire dans tout ça, c’est que je ne me rendais pas tout à fait compte de la confusion mentale qui régnait dans ton esprit. Je ne me rendais pas compte que la Grande Rhétorique que tu utilisais ne servait qu’à masquer la pauvreté de tes ‘vrais’ arguments. Aveuglée et stupide à en crever.
Je vais te dire une chose.
Ce soir où je t’ai attendu, il y a quelques mois, pour te rendre tes clés et te dire que je partais, tu m’as fait remarquer mon sourire radieux. Tu as pensé que j’étais tombée amoureuse, et je t’ai répondu que j’avais fait une belle rencontre. C’était vrai. Mais pas dans le sens où tu l’as compris. Je n’étais pas encore amoureuse, j’étais à mille lieues de là, il m’a fallu quelques semaines de plus pour l’être, et éperdument. Ce que tu as lu sur mon visage ce soir là, c’était le soulagement, la joie, l’euphorie de savoir que plus jamais je n’aurai à faire à toi, et la rémission totale de tout ce qui pouvait me lier à toi. Tu n’étais plus rien. Tu n’étais qu’une merde. Je suis descendue au café d’en bas rejoindre cette rencontre, et j’ai siroté un café avec une satisfaction des plus jouissives.
Tout ça, ça n’a plus d’importance. Comme je te l’expliquais la dernière fois que l’on s’est vus, je ne ressens plus que de l’indifférence à ton égard.
Je trouve seulement lamentables ces reproches larvés et sous entendus que tu m’adresses régulièrement depuis mon départ, ce harcèlement au téléphone.
J’ai eu assez de courtoisie pour ne rien te reprocher, depuis que nous sommes séparés ; ce n’était plus approprié, et je te savais incapable de comprendre. A quoi bon, j’ai la naïveté de croire qu’une discussion n’a pas lieu d’être lorsque la communication est inexistante. Tu n’as pas eu cette politesse, et tu as jugé pertinent de m’exprimer - avec ta « passion » habituelle - toute ta colère, d’éjaculer de ton ego. Hier soir en lisant ce type sur internet, je me suis dit que tu n’avais pas mérité mon respect, et que tu n’étais donc pas digne de ma courtoisie.
Je ne suis pas venue ici pour avoir une discussion avec toi. Tu es là, attaché et bâillonné pour crever. J’ai dis ce que j’avais à dire, je m’arrête à ce détail de ta personne, c’est bien suffisant pour justifier une crémation par le Jack Daniels.
Et plouf, et plouf, tu avais raison, il faut toujours avoir une bouteille en réserve, on ne sait jamais.
Et plouf, et plouf, tu as du feu ?
Ca crépite, ça gondole, ça frémit, ça se tord, ça brûle. Psshhhht. C’est amusant, j’ai longtemps eu le fantasme de partir d’ici en brûlant tout, avec le parquet et ta mezzanine en bois, j’imaginais ça grandiose. Pshhhht.
Et tes grands yeux vifs, et ton air supérieur, et ta grande gueule. Je pourrais t’assommer pour abréger un peu tes souffrances, nous nous sommes aimés, après tout. Mais tu disais que ta façon de te comporter avec moi reflétait la passion qui t’animait à mon égard. Voici, mon cher, le témoignage de ce que fut la mienne.
Bonne bourre.
Je vais te dire ce qui m’amène chez toi.
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Enfin un concurrent sérieux. Y a pas de vanne, mais c'est avantageusement remplacé par la haine et la violence verbale. La crémation manque de détails, mais sinon c'est tout bon.
Je tiens à préciser que :
"J’ai lu hier soir le message d’un type sur internet.
[...]Je parle du mépris, de la condescendance, de l’arrogance, de la mesquinerie. Vas-y que je t’écrase par tous les moyens, vas-y que je te démontre que toi qui as l’audace, que dis-je, l’ignorance, l’inconscience, la stupidité, l’insolence de prétendre une seule seconde que tu peux, sombre merde, me regarder, me parler sans me lécher le cul, ou comble de tout, T’OPPOSER à ma superbe, toi, je vais te détruire, par tous les moyens les plus bas."
C'est une allusion directe à un commentaire de Glaüx-le-Chouette sur la Zone, qui a donc directement inspiré ce texte. Comme quoi ce connard a encore quelque utilité. Merci donc à Glaüx de son intervention involontaire. Je le remercie d'autant plus que ce texte (la crémation en moins) a réellement été envoyé par mail à une vraie personne, et qu'à cause de Glaüx, un mec qui avait rien demandé s'est fait incendier comme jamais. Encore bravo Glaüx, j'aime beaucoup ce que vous faites.
Voilà, t'as remercié ma muse à ma place. Crois en ma reconnaissance toute sautillante et toute pleine de joie, autour d'un feu, avec des merguez et des chipolatas aux herbes, Supair Chouaitte.
enfoirée de boule à facettes
Ma première directive est de distribuer haine et violence. Ma deuxième directive est de faire distribuer haine et violence. Ma troisième directive est de niquer vos mères dans le cul.
Je suis fier que ma mission soit reconnue.
A part ça c'est très bon, j'aime bien. LA fin est évitable - la crémation, en fait - et la violence serait plus grande si elle restait verbale. Mais j'imagine que dans les faits, elle a dû le rester, ou alors Strange poste depuis la taule (causant par là tous les phantasmes de beaufs sur la prison féminine qui peuvent animer les beaufs de la Zone). Je note : ne PAS sortir avec Strange. Trop dangereux. Incompatibilité susceptible de causer la fin du monde.
C'est très honorable, mais je ne vois pas trop en quoi ce serait soudainement le bon texte de cette année. Et puis, c'est subjectif, mais les histoires de couples et de ressentiments, ça me donne envie d'aller trôner.
C'est clair que la teneur du texte en œstrogène est bien trop élevée pour aputasser mon vote, d'ailleurs d'un certain point de vue c'est à peine un texte de Saint-Con. En même temps, d'un autre point de vue sidéral, ce serait peut-être même pas un texte. Un peigne, éventuellement, et encore.
Au four les points de vue.
Bah dans le torrent de merde de cette année, y a aucun autre texte qui puisse passer pour au moins correct. On a le choix entre du sérieux mal gaulé, de la vanne pourrie ou incompréhensible, du manque d'inspiration général, et aucun panache dans les crémations. Ici au moins y a un con suffisemment con pour qu'il y ait une certaine jouissance à le voir crâmer. J'en demande pas plus. Les autres cibles de cette année sont à peu près toutes transparentes et m'ont donné envie de les oublier plus que de les voir brûler.
Texte très bien écrit. La haine du narrateur le rend fascinant, à mes yeux du moins, et je n'ai pas lâché jusqu'au bout. Sympa. Pour l'instant, mon préféré.
J'ai vraiment eu l'impression de lire une lettre qui m'était pas destinée (donc, raf), avec hop à la fin une scène ajoutée pour remplir le cahier des charges. C'est pour ça qu'ensuite j'ai bien aimé les commentaires. Pas le titre, par contre. Bien l'image, par contre. Et moins le texte, donc.
Ca déménage...
Et puis, c'est tellement crédible...
NOMINE
Bien écrit. C'est tout. Ca se lit jusqu'au bout. Apres.. l'interêt est limité quand même. Histoire commune. Sans plus.
Ya beaucoup de baratin et peu d'actions.
C'est pas forcément un mal...
Bine aimé ce texte, mais.
Bien écrit, la violence est palpable. Mais bon, le coup de la femme qui se rebelle en massacrant sauvagement son mec, toute les filles le font quoi. On pourrait inverser les rôles de temps en temps non ?..
Hors Saint Con, ça aurait été très très bon. Mais là du coup^la fin est attendue et de trop à cause du concours (je sais , Gloups l'a déjà dit). Y a ça aussi que je trouve de trop : "Comme je te l’expliquais la dernière fois que l’on s’est vus, je ne ressens plus que de l’indifférence à ton égard." Ca colle pas avec le reste.
La seule raison qui ne va pas me faire voter pour ce texte, c'est qu'il ne correspond pas à ma vision très subjective de ce qui est un bon texte de Saint Con. Mais j'ai vraiment adoré.
hou il est
dans ton cuhl
Première moitié de texte brillante, mais sans réelle profondeur. Bien que la lecture soit délectable, ça reste une exposition de clichés de tiges de pâquerettes.
La deuxième moitié - à partir de "Tu m'interrompais" - est plus riche, on décolle et on s'éclate, ça prend de la hauteur. Certes, il y a un ou deux atermoiements qui pourraient faire décalé tel le générique des Bisounours dans "Comment j'ai buté ta mère IV" ; mais ça passe, ça permet un contraste avec le final glacé et sophistiqué.
Quant à vouloir comparer ce texte avec la concurrence, c'est stupide, car en ce moment il n'y en a pas.
on te reconnais bien là Plüf