LA ZONE -

La règle du jeu

Le 11/02/2008
par Loading
[illustration] J’ai la faiblesse de croire au destin. De manière générale et sans distinction précise, tout est pour moi affaire d’enchaînements logiques et préconçus, de déterminisme massif et englobant, de résultats inéluctables et jamais pris en défaut. L’inné et l’acquis. Beaucoup de l’un et très peu de l’autre.
Une vision des choses aussi arrangeante que classique permettant aux individus pleutres de mon espèce de fuir leurs responsabilités d’hommes, diraient certains. Pour ma part et de tout temps, j’ai préféré croire que la part de vérité qui pouvait y subsister serait suffisante pour déstabiliser mes envies suicidaires intempestives sur le moyen terme, et la concrétisation salvatrice qu’elles appellent de leurs vœux. Encore maintenant, alors que je suis sur le point de les satisfaire.
Oui, je suis un perdant. Mais ce n’est qu’une observation finale amputée de tout contexte.
S’il fallait produire un condensé schématique de mon passage ou plutôt du mouvement passé inaperçu que j’ai opéré en ce monde, on pourrait probablement se contenter d’en citer les extrémités pour le moins contrastées : introduit par une éprouvante et interminable césarienne, retiré avec la complicité furtive et indolore d’un train à grande vitesse. Ce serait correct, j’imagine.
Néanmoins, je ne saurais en moi-même accepter une telle présentation quand les limax cinereoniger de ma fierté instinctive me susurrent encore avec obstination que l’inconsistante moelle de mon existence ne peut se voir évaporée sans être d’une quelconque manière retracée. A l’attention de mes doubles, éternellement générés par la matrice de l’échec.

Ca partait pas trop mal pourtant, dans l’ensemble, faut pas croire. Une chambre et une Game Boy nominatives, ce n’est pas négligeable. On s’ouvre facilement de sérieuses perspectives d’avenir en pratiquant le Monopoly en individuel, la gestion du vide chez l’alter ego s’acquiert de la sorte avec fulgurance. On prépare le terrain pour la suite, sans le savoir bien sûr, c’est tellement plus sournois mais il faut bien avouer que sans ça, l’intérêt de la chose aurait tôt fait de décliner.
Une vie sociale foisonnante, bon, invisible certes, mais ça n’empêche pas les débats enflammés, les polémiques sans concessions et les contre-argumentaires virulents. L’art de la rhétorique intégré au papier peint, c’est tout un programme, difficile de prétendre le contraire. De temps en temps, il arrive que les motifs imprimés répondent vraiment, oui, sans qu’on ait mentalisé la réplique ni rien. Alors là, on vit de grands moments. Il faut arracher quelques bandes sur plusieurs mètres carrés pour vérifier la présence en question et poursuivre l’échange plus confortablement mais sinon, ce sont toujours des instants marquants.
Effectivement, il y avait l’autre aussi. Les multiplications à quatre chiffres, même avec l’aide des retenues, c’est pas le plus évident quand on passe ses soirées à relire « Le mystère de la chambre jaune » au lieu de faire ses gentils devoirs pour mathématiciens amateurs. D’un autre côté, il était pas obligé de frapper à chaque proposition incorrecte ; surtout que les exercices sont longs, nécessitent plusieurs lignes de calcul à chaque fois, multipliant par autant les chances pour un scientifique de neuf ans à l’inspiration cartésienne légère de prendre des crochets que même Carpentier, au mieux de sa forme, ne balançait pas à Dempsey.
Même avec la carrure et la pigmentation d’une crevette grise rabougrie, on a la rage à portée de main à cet âge-là et on trouve parfois le courage de notifier à l’intrus touriste en vagin maternel qu’il commence à nous pomper sérieusement, que sa présence, tout bien réfléchi, est dispensable. Essai non transformé, la démarche nous fera voir de très près le vélo d’intérieur du salon, le tout sans prise d’appui au sol. C’était l’intention qui comptait.
Scolairement, on fait dans le moyen plus. Il paraît qu’on a du potentiel, qu’on n’en fait rien, que c’est désolant. S’il n’y avait que ça. Si on n’égrenait pas les minutes à chaque cours. Si on avait une idée de quoi faire de ses dix doigts. Si on était foutu de pas se faire arnaquer dans les échanges de cartes de basket sous le préau. Si on regardait pas les matches de foot assis sur un banc. Si on n’avait pas déjà plus rien à perdre au point d’aller chercher les ballons coincés sur le toit en escaladant la façade de l’école. Si au moins ça nous offrait la reconnaissance des Zidanes de poche au mépris affiché mais pas assez fous pour s’y risquer. L’époque des utopies, plus pour longtemps.
On introspecte à grandes eaux là où il n’y a rien à analyser tout en se flétrissant par le biais de préoccupations aussi aberrantes que symptomatiques de ceux qui vivront peu, seulement mal dans le meilleur des cas. Pour illustrer, on envisage dans la confusion et la cruauté panoramiques : soit d’embrasser une carrière de dictateur dans un micro-état, de gourou d’une secte hostile au genre humain et prônant le retour d’êtres illuminés annihilateurs, soit de s’emparer des cartes bleues de la mère et de l’autre pour monter un groupuscule paramilitaire en Scandinavie qui aurait pour tâche de s’en prendre à tous ceux qui n’aiment pas Gaston Leroux, pour commencer. Avec le plus grand sérieux et en rédigeant de nuit les organigrammes en question, à l’éclairage de la petite lampe de bureau.
Les passages en classes supérieures s’enfilent et pas de heurts significatifs, c’est-à-dire approfondissant davantage l’expérience du pathétique qu’à l’accoutumée, hormis le port imposé des bottines en daim pendant l’hiver de la cinquième. Elle ne vaut pas mieux que l’autre, finalement, avec ou sans blouse blanche et sous ses airs vaguement plus affectés par notre bien-être. On aurait troqué l’humiliation supplémentaire contre une paire de mandales sans aucune hésitation cependant l’alternative ne s’est pas présentée malgré nos provocations en ce sens. L’évènement fait rapidement le tour de l’établissement, ça se bidonne dans les couloirs peuplés de Fila et d’Adidas. L’actualité nous donnera une occasion de renverser la vapeur l’espace de quelques jours.
Dans le même temps, on continue à prendre soin de ses amitiés murales ; les week-ends sont toujours organisés selon le contournement des règles sociales de base, la misanthropie appliquée par défaut aux jeux de société suit son cours, l’activité lecture se voit complétée par un nouvel arrivant qui nous enjoint à suivre des tribulations chinoises, parfait, il fera donc l’objet d’une demi-douzaine d’observations détaillées afin d’égaler la maîtrise que l’on détient à propos du précédent. Parfois, lorsqu’elle affronte également la supériorité physique de l’autre, on a droit à une séance cinéma en sa compagnie. Ca lui permet de faire un break et de réfléchir à la nullité de son choix en termes de pénis-portefeuille de compagnie, et nous d’assister à un film sans intérêt qu’elle estime des plus éducatifs.
L’autorisation télévisuelle exclusivement balisée autour du journal de vingt heures permet de noter l’inquiétude qui entoure le mutisme de Marc Dutroux et le sort réservé à Sabine Dardenne, énième porte-étendard du phénomène d’enlèvement d’enfants à travers l’Europe. On note la vague punitive qui embrase les communautés, la psychose généralisée et le service que ces dernières sont capables de nous rendre. Puis vient comme toujours l’heure d’aller au lit.
Avec les filles, il n’y a aucun problème par contre. Pas d’interactions, pas de soucis, s’entend. Toute entreprise d’abordage serait ouvertement suicidaire et source de pénibilité accrue, considérant le physique ordinaire moins à disposition et l’exécrable réputation dont nous souffrons, à mi-chemin de l’intello et du malade mental. Une ignorance réciproque est donc en l’occurrence un compromis de bon aloi. Notre cote se limite aux professeurs de français, tantôt ébahis tantôt perplexes en regard de nos productions torturées, correctement orthographiées et porteuses d’un fatalisme là encore jugé précoce mais remarquable dans la forme.
Néanmoins, certains membres de la gente féminine n’acceptent pas pour autant notre position de repli et outrepassent notre périmètre social de sécurité, par pure méchanceté le plus souvent et motivées par le besoin d’asseoir leurs images de contemptrices sans scrupules. Comme dans tous les groupes, il y a un leader au charisme plus développé que les autres, régulièrement aux avant-postes quand il s’agit de ridiculiser son prochain. Elle ne fait pas dans le détail et s’attaque invariablement aux choses du sexe, du haut de ses quatorze ans, avec une crudité qui a fait sa renommée. Hargneuse et impudente auprès des enseignants, son dossier disciplinaire tient plus de l’encyclopédie.
Tant et si bien que le sous-directeur n’est pas allé chercher très loin quand l’inscription « Monsieur Noël est un pédophile » a été découverte en lettres capitales sur le tableau de la salle de permanence. L’attention que portait l’infortuné professeur de géographie à certains élèves du premier rang avait alimenté les rumeurs depuis un certain temps, de fausses rumeurs évidemment. Exploitables tout de même. Il n’a pas été inquiété et on a pu entendre la petite garce hurler à l’erreur judiciaire depuis le deuxième étage alors qu’elle était traînée jusqu’au portail, attendue par ses parents eux-mêmes indignés de cette expulsion définitive. Malgré l’intensité dramatique de l’évènement que goûtaient les autres élèves, nous nous sommes personnellement lavés les mains du fait divers mineur. Car il y restait un peu de craie.
On est malin à l’occasion, c’est certain. Mais la ruse à intervalles instables n’est que futilité dans les eaux sales de l’adolescence, plus encore lorsque la conscience de cette futilité est acquise. Des victoires faciles, rares et insignifiantes face à la consternation qui nous tenaille d’être encore debout chaque matin pour supporter un imbécile violent et une égoïste impuissante à peine capable de distribuer de l’aspirine dès le petit-déjeuner. Pour affronter l’absence de solutions, la prémonition constante d’un futur inévitablement tragique puisque rien ne sait instiller la passion ou ne serait-ce que l’envie au cœur de nos entreprises machinales.
L’idée sérieuse d’un suicide ne fait pas que nous effleurer. Malgré tout et suite à un débat impitoyable au sommet, on décide amèrement de remettre à plus tard : derrière le soulagement instinctif et contradictoire d’avoir opté pour la continuation, se cache un espoir sans fondements. Un espoir qui n’arrive pas à se justifier lui-même, cependant il est là et joue son rôle de dernière ligne défensive avant capitulation. La suite démontrera l’inexactitude de cette pensée, toutefois nous croyons alors que la patience sera salvatrice, que les années passant on se soignera, que cette période désespérante à vivre implique logiquement des lendemains qui ne pourront que chanter, que pire ne saurait s’étaler sur notre face. Fous que nous étions.

J’ai parcouru les années qui suivirent la sourde abnégation en bandoulière, un mal-être grossier en tête et l’âme en veille. Le papier peint ne me parlait plus et mes complices intérieurs étaient allés épauler d’autres crevettes peinées par leurs existences sans issues, estimant sans doute que je pouvais à présent me débrouiller seul. Les élans de confiance et d’enthousiasme qui m’atteignaient parfois plus jeune s’étaient considérablement réduits, presque jusqu’à l’évanescence, au même titre que mes propensions schizophréniques. L’invivable prenait une dimension que je n’avais pas eu le courage de soupçonner dans mes pronostics d’enfant tourmenté.
L’accession au lycée s’intégra à mon parcours linéaire et désabusé alors qu’à la maison, j’avais réussi à m’emmurer suffisamment pour décourager quiconque d’entamer avec moi un échange construit et l’autre avait largement modéré la fréquence de ses coups, sachant qu’il n’obtiendrait plus en retour qu’un mur d'indifférence. Je ne parlais que si la situation l’imposait et je guettais une opportunité de fuite, qui adviendrait un peu plus vite que je ne m’étais résolu à l’attendre.
Un temps, j’ai bercé l’ambition de me déployer dans l’écriture, pour m’apercevoir en fin de compte que je ne faisais que reproduire avec une intensité moindre les structures et les styles qui m’avaient charmé ailleurs. Au nombre des exutoires défectueux, je pouvais aussi compter le dessin paysager, la peinture de petits soldats Warhammer, une tentative instantanément avortée en tant que philatéliste amateur, la cinéphilie qui m’avait lassé par sa récurrence, le jardinage et son lot de déceptions inhérentes à l’impossibilité de cultiver des plantes carnivores sous un climat tempéré, l’étude de la zoologie et de ses spécimen méconnus… Abandons sur abandons, c’était trop ridicule, de toute façon. Restaient les Pink Floyd, la branlette et l’envie intermittente de sauter par la fenêtre, dépendante de mon niveau toxicologique du moment. Et c’était à peu près tout.
Mes activités foireuses avaient été permises à contrecœur suite à mon coma de quatre jours. J’avais patienté une bonne heure, dans une lutte infernale qui m’opposait à l’effet des somnifères, avant de me pendre comme dans un rêve au lustre du vestibule. La couardise qui me définissait aurait dû faire pencher la balance vers une consommation exclusive autant que massive de médicaments, l’alternative féminine par excellence, mais là encore, j’ai cru pouvoir m’octroyer un niveau comportemental qui était hors de ma portée en occultant la règle. La fine ceinture en cuir avait tenu contrairement à la fixation du plafonnier, j’aurais dû m’en douter tant le coup était classique mais je la pensais apte à supporter mes soixante-cinq kilos tout mouillé. Erreur.
Puisqu’on m’avait retrouvé au pied du buffet, il avait été scientifiquement établi que la contusion cérébrale était due à l’impact de l’os occipital sur l’un des rebords biseautés. Au réveil et pendant les semaines où j’étais gardé en observation, j’avais souffert de nausées et d’arythmies cardiaques inhabituelles. J’étais resté muet aux interrogations des praticiens, ils n’auraient jamais compris que je puisse être terrorisé à ce point : j’étais revenu et la souffrance physique se greffait à mon impression d’être pris au piège quoi qu’il arrivait.
En sortant de l’hôpital, j’ai su que l’emploi de remèdes d’échelon très supérieur était capital à une survie tellement paradoxale que perdre la raison de manière continue et de fait la conscience même de mon mal était effectivement l’unique réponse à mes besoins. L’herbe me torturait à cause de son raisonnement vaseux, la mauvaise ecsta qui circulait me mettait au supplice au bout de quatre heures, la cocaïne était à l’opposé de ce que je recherchais ; je n’avais pas vraiment d’autres choix alors j’ai commencé à me défoncer au Subutex combiné à des bêtabloquants pour les émersions. Toujours à la maison, toujours avec cette pétasse d’infirmière dont l’utilité se cantonnait à détourner les boîtes de substituts au boulot et ce vieil abruti qui commençait à m’éviter, mais sans les cours. Mon état ne me permettait plus de les suivre, j’étais bien inscrit au CNED mais les manuels en tout genre n’étaient jamais sortis du cellophane.
Ce serait verser dans l’évidence que de préciser la non-obtention du Bac ; il aurait fallu se présenter pour avoir une chance et j’avais des préoccupations d’ordre hautement plus existentiel, à savoir me soustraire à la lumière et divaguer dans mon trou à l’abri d’un commencement de pensée. Quand je n’avais plus rien, j’inhalais du déodorant à travers une serviette humide et il m’était arrivé un jour de dèche totale de pallier le manque d’alcool en vidant un flacon de Numéro 5. J’étais un zombie mais une bête enragée, une pauvre merde mais j’avais des couilles pour n’importe quoi tant que ça pouvait me soulager.
Je faisais semblant d’être équilibré et dans la moyenne. En apparence, c’était presque crédible quand on considérait mon boulot à quart-temps payé au black dans la brasserie huileuse du centre, les Hustlers qui avaient remplacé Jules Verne dans la bibliothèque et ma participation honorable au commerce du vagin sur les boulevards à la sortie de la ville. J’allais sur mes dix-neuf ans et j’aurais pu être le premier venu sauf que j’étais moi, avec toute la péjoration qui en découlait.
Un soir dramatiquement habituel, j’avais terminé mon service, exhalant le steak-frites à plusieurs mètres à la ronde, et je m’efforçais sur le retour de décoller mes cachets de la paroi de l’œsophage à grandes lampées de Jameson flash. Arrivé sur place, j’ai immédiatement compris qu’il se tramait quelque chose, une discussion avait eu lieu en mon absence entre les deux individus qui n’arrêtaient pas de vivre et de se mouvoir dans mon espace. J’ai demandé à ma mère d’accoucher rapidement étant donné que je n’étais pas d’humeur, cependant tout à fait paré à lui administrer une volée d’insultes dans le cas où elle persisterait à prendre cet air de tireur embusqué.
Je n’ai pas saisi toutes les subtilités de sa réponse apparemment travaillée à l’entraînement, il y a eu comme un souffle malsain qui gravitait autour des expressions « terminé avec les médicaments », « plus continuer comme ça », « prendre ta vie en main » et « majeur de toute façon ». Avant de me saisir de la petite table en fer forgé pour la mettre en relation avec la baie vitrée, je lui ai demandé un court résumé du monologue, histoire d’être sûr. L’explosion a rameuté le beauf qui a marqué une pause devant la scène de capharnaüm. Un coup de talon au niveau d’une des bordures restantes m’a permis de dégager une plaque de verre à angle aiguë, ce qui a soufflé au tocard qu’il était plus prudent de rester à l’écart de la discussion. Tout cela allait très mal finir car je commençais à penser qu’il me fallait emporter quelqu’un avec moi afin que ma vengeance soit complète et que la cruauté réponde à l’injustice. Il en a été autrement.
Quelques semaines plus tard, installé sommairement dans un foyer où je côtoyais un échantillonnage convaincant du désespoir humain, j’ai contacté un avocat par l’intermédiaire de l’assistance juridique et j’ai traduit ma mère devant un tribunal en invoquant le 205. Le statut social et financier dont elle jouissait depuis son deuxième mariage m’a garanti une victoire sur tapis vert. Elle n’a même pas fait appel du verdict et a versé les trois mille cinq cents francs mensuels que je demandais. Ajoutés à mon salaire de branleur, ça me faisait un SMIC sans loyer à payer. Les deux années suivantes sont passées comme un éclair, meublées par les cadavres de bouteilles, mes transactions régulières avec les deux dealers du centre et ma dizaine d’heures de taff hebdomadaire.
La piaule était dégueulasse et rien ne tenait debout correctement là-dedans, si bien que je n’allais m’y poser que pour la nuit et parfois dans l’après-midi pour comater en l’absence de mes colocataires ; sinon je passais mes journées à zoner sans but avec les soûlards de la grand-place, à écouter de la musique en accès libre à la FNAC et il m’arrivait encore de griffonner des ébauches d’idées de textes sur un cahier à spirales qui partait en morceaux. Je n’avais plus attenté à mon existence depuis l’histoire du lustre défaillant et j’avais en quelque sorte réussi mon coup : oublier le cycle des levers et des couchers et ne plus ressentir que du rien suspendu au-dessus du vide. Ca aurait pu durer encore et encore jusqu’au jour où j’aurais estimé que ce cirque ne méritait plus mon audience, à ceci près que je ne détenais alors de mon seuil de tolérance en la matière qu’une vague évaluation.
Et Lucile est venue me sortir de là, temporairement. Cette rencontre influerait sur peu de choses et ne représenterait qu’un sursis, ou plutôt une diversion à laquelle j’allais croire et m’accrocher, persuadé d’avoir mis le doigt sur une forme de vie saine et authentique. Je me trompais à nouveau mais qu’importe, l’ignorance était à cette époque mon plus grand bénéfice et l’épisode qui incarnerait le début de ma fin serait, au moment de clôturer les comptes, celui que je chérirais le plus.

La came et mes cocktails éthyliques divers me revenaient assez chers et même si je restais modéré sur l’alimentation et autres dépenses secondaires, je m’en sortais difficilement. Surtout depuis qu’un propriétaire un peu laxiste avait gobé mon histoire inventée à propos de ma situation d’étudiant boursier étranger et accepté de me louer son douze mètres carrés sans garantie statutaire. J’avais ainsi obtenu mon premier chez moi pour deux milles balles en liquide et m’assurer une source de revenus supplémentaire était devenu ma principale préoccupation. J’ai alterné mon baratin dans le bureau de la Mission Locale en y intégrant des détails affligeants, démarche assez vaine puisque la permanente a ignoré ma variante des « Misérables » en m’inscrivant d’office à une formation rémunérée sur cinq mois censée m’indiquer quelle était ma voie.
J’ai tout de suite vu que je n’étais pas le seul à avoir flairé la bonne planque, un ramassis d’oisifs et d’âmes égarées constituait l’écrasante majorité des participants à ce programme d’orientation. Ils avaient tous la dégaine de parasites, hormis une dizaine de filles qui allaient probablement finir shampouineuses dans un salon de coiffure de banlieue ou aides-soignantes à l’hôpital du coin. Rassuré de ne pas dépareiller avec l’ensemble, j’ai subi la séance de présentation en me ralliant à l’indifférence générale, encouragé par les cent cinquante sacs qui récompensaient le déplacement.
Au bout d’un mois, je me suis surpris à sympathiser fugitivement avec quelques membres, notamment un ou deux cloportes de mon envergure et une mignonne plutôt classe atterrie là sans plus d’espoir que je n’en entretenais. L’air de ne pas y toucher, j’ai décroché un entretien minable au café qui faisait l’angle en jouant la carte du désabusé lucide qui parle uniquement pour dire quelque chose d’intelligent ; des réflexions faussement profondes et des critiques alambiquées du système global émises sur un ton fatigué qui éveillèrent son intérêt, du moins à ce qu’il me semblait.
Par la suite, elle a tenu à me préciser que c’était vraiment nul comme discussion. Le niveau d’intimité que nous avions acquis de fil en aiguille lui permettait cette mise au point et je me souviens que j’avais ri humblement à l’évocation du souvenir de nos premiers rencards mal ficelés. Le programme social n’était en effet pas terminé que j’avais plié bagage de ma chambre sordide pour expérimenter la vie de couple en appartement des beaux quartiers. Emancipée à cause de conflits récurrents avec sa mère, le paternel constamment en voyages d’affaires lui avait proposé son soutien financier à distance et le T4 qu’il gardait comme garçonnière depuis le divorce. A ma question évidente alors que je foulais la moquette en laine triple épaisseur, elle avait répondu, pour la millième fois sans doute : « Tu vois la pub Air France avec l’avion qui se pose sur un tourne-disque... c’est lui qui l’a conçue ».
N’importe quel individu doté d’un minimum de sens de l’observation aurait remarqué que Lucile s’emmerdait prodigieusement dans la vie. Son joli minois n’aurait eu aucune difficulté à conduire des verges de toutes tailles jusqu’à son lit trois ou quatre soirs par semaine mais comme elle me l’avait expliqué, allumer était une activité qui la ravissait davantage et une dizaine d’aventures mises à part, elle préférait encore la solitude de ses cigarettes au balcon à la compagnie passagère de séducteurs d’opérette. Au vu de l’abordage initial dont je m’étais rendu coupable, j’avais choisi de ne pas relever.
Notre train de vie était agréable, plus encore lorsque je l’opposais au confort relatif que j’avais admis comme tel durant les années précédentes. La pension que je touchais encore s’ajoutait à celle du Beigbeder de l’aviation civile et bien qu’elle était quatre fois inférieure, cela me donnait une espèce de justification qui me détachait un peu du statut de parasite sans trop m’en éloigner. On avait le temps et les moyens de pratiquer des activités onéreuses, de partir en week-end à l’étranger, de fréquenter les établissements pour bobos amateurs de vie facile et décontractée, de sortir dans les grands restaurants, de partager ensemble nos exils respectifs en faisant tout simplement ce à quoi les modestes rêvassent le samedi après-midi dans les files d’attente aux caisses des grandes surfaces. Beaucoup se seraient pliés à cette règle tombant sous le sens et si notre refus ne nous rendait pas meilleurs que les autres, nous nous disions en tout cas comblés par la manière lymphatique et casanière que nous avions choisie comme leitmotiv existentiel. En cela, nous étions proches, c’est certain.
Elle s’était piquée de criminologie pour des raisons assez floues et n’allait suivre ses cours à l’université que par distraction, seulement en cas d’ennui profond pour dire vrai. Ses périodes de dépression insondable ponctuaient notre cohabitation avec au moins autant de régularité que mes accès mutiques et mon incapacité à influer sur ses humeurs n’avait d’égal que mon fatalisme, sachant pertinemment qu’il n’y avait en moi aucune inspiration compétente afin d’y remédier, ne serait-ce que brièvement.
Le plus clair de mon temps était consacré à la rédaction de petits pamphlets et de récits tortueux sur l’ordinateur du salon : je m’étais remis à l’écriture sans espoir qualitatif particulier, Lucile aimait préparer le café du matin en me trouvant encore hypnotisé devant l’écran et mes heures de pianotage principalement nocturnes donnaient au cadre général un côté artistique des plus incertains mais qu’elle semblait néanmoins apprécier. Passés les premiers mois, on avait glissé logiquement vers des rapports bihebdomadaires et la moindre impression positive, compte tenu de notre sentiment d’affliction généralisé, était source de contentement léger.
Je n’en avais nullement l’air puisque je n’avais jamais eu l’air de rien, mais j’aimais cette situation. J’étais à mon aise quelque part, j’observais dans le roulement de ces jours l’illustration de mon sens de la normalité, l’accessit à ce que j’avais peut-être de tout temps souhaité. Bien sûr, la philosophie du verre à moitié vide l’emportait chez moi en toutes circonstances mais l’optimisme n’avait jamais été une composante de ma vision de la sérénité. Lucile se prenait parfois pour Yoko Ono sur son Yamaha immaculé, alors je tirais doucement la cloison amovible et je revenais à ma prose fatiguée : ça me suffisait et, toute mesure gardée, j’allais presque bien. Le monde aurait pu tourner ainsi en nous rendant le mépris que nous lui opposions. Dommage. Enfin, je suppose.
Trois ans, c’est toute une vie. Toute ma vie. La seule consistance que l’on pourra jamais y trouver se situe dans cet unique espace-temps. Un peu avant la rupture, je me suis rendu compte que je parlais à nouveau dans le vide, un retour aux sources qui n’était apparemment qu’un détail. D’aucuns y auraient vu un signe annonciateur mais ce n’était pas mon genre.
J’étais sorti faire des courses pour préparer un dîner un peu atypique, du poulet Tikka avec une demi-douzaine d’épices inconnues mais attirantes : le marché africain m’avait rendu agoraphobe en moins de cinq minutes et j’étais vite rentré, tout satisfait d’être ressorti vivant de la première phase de ma mission. Il y avait vraiment beaucoup de monde devant chez nous et j’ai compris à la nature de l’attroupement que Lucile avait réussi à attirer l’attention du peuple local en ralliant le trottoir sans utiliser l’ascenseur, pas plus que les escaliers. L’identification de l’évènement comme celle de l’enfer qui s’ouvrait sous mes pieds ne m’a pris quelques secondes ; j’ai contourné la foule puis moi, le gingembre et la touffe de coriandre, on est allé pleurer dans la cuisine. Quatre Seropram et une demi-bouteille de whisky plus tard, il ne se passait toujours rien.
Finalement j’ai vu la lumière et une décision évidente est venue me soulager presque immédiatement de l’ampleur catastrophique de mon angoisse. Tout de suite, je me suis senti mieux et assez léger pour aller cuisiner mon plat. J’ai fini la bouteille et repris trois cachets en peaufinant la sauce. J’ai ensuite ouvert la Zubrowska avec l’authentique brin d’herbe des plaines polonaises inclus à l’intérieur et j’ai installé une petite table sur le balcon pour y prendre mon repas, un hommage plein de défi que je trouvais adéquat. J'ai terminé mon assiette et je me suis assis dans un coin avec la bouteille à portée de main. C'est tout ce dont je me rappelle de ce soir-là.
Vingt-quatre ans : un score décevant. A l’image du reste. J’aurai presque accompli une génération. Celle de ne je sais qui, pas la mienne en tout cas. J’ai triché sans discernement pour essayer de m’en sortir et même de cette façon, je finis vaincu. Je n’ai plus rien à apprendre : je suis faible et réticent au combat, il n’y a pas deux issues pour les individus de ma trempe. La partie devient de fait sans intérêt et je quitte la table sans regrets. Pourtant ça partait pas si mal, j’étais issu d’une famille plutôt aisée, de grandes études m’étaient accessibles, je n’aurais jamais manqué de rien. Si ce n’est d’envie. Bref, inutile de perdre davantage mon temps si peu précieux en conjectures, que les conditionnels aillent hanter ceux qui les supportent encore. Mon problème a rencontré son solutionnement, restons-en là.

Une marche purifiante sera nécessaire, autant d’un niveau pratique que spirituel. Mon bilan personnel profitera de l’occasion pour se contorsionner à nouveau, je le laisserai faire à sa guise. J’irai même jusqu’à lui abandonner mon hémisphère gauche, sedes memoriarum, il aura ainsi toute latitude administrative pour y classer son dossier.
J’aurai de toute façon mieux à faire avec le droit car si les tunnels se ressemblent tous, j’estime qu’il reste ma propriété de sélectionner mon lieu d’extinction avec intransigeance, et toute ma capacité d’imagination sera alors requise. Plusieurs paramètres retiendront mon attention : la longueur, l’exposition, la trajectoire des rails observable en leur endroit ou encore l’absence d’annexes susceptibles de contenir matériel et donc éventuellement personnel de maintenance.
Le travail combinatoire en trinôme avec mes hémisphères cérébraux une fois accompli, je n’aurai plus qu’à installer mon campement provisoire : un duvet de qualité moyenne ainsi qu’un oreiller volumineux, accueillant pour ma tête malade et côté frais. Je jouerai peut-être un peu avec mon tube de Lexomil vide, m’appliquant au lancer vertical et à la récupération aléatoire dans l’obscurité, un œil sur les aiguilles phosphorescentes de la montre. Puis viendra l’heure d’aller au lit.
La continuation pour la continuation est une philosophie dont on se lasse. Cette fois-ci, je ne tricherai pas puisque j’irais en ce cas à l’encontre de mon propre intérêt. La règle édicte qu’une défaite aussi complète que celle qui m’afflige implique une sortie définitive du jeu. Elle sera observée.
A la télévision, c’est l’heure du journal et ce soir, comme tous les soirs, il ne s’est rien passé d’utile dans le monde. Le guide exhaustif des voyageurs SNCF avisés me tient donc lieu de lecture de chevet, c’est un ouvrage plutôt indigeste à vrai dire. J’y cherche à l’instant les modalités de mon dernier tour de passe-passe. Transpiration et tremblements sont les symptômes de ma fébrilité, pas de ma crainte. La lumière pourra fouiner dans tous les coins : elle ne retrouvera pas son loser préféré, demain matin. Il sera trop bien caché.

= commentaires =

nihil

Pute : 1
void
    le 11/02/2008 à 13:11:10
J'ai du sous-traiter la publication de ce texte à un tiers, vu que j'arrivais pas à passer la dixième ligne tellement c'est assomant et chiant. mais vu le résumé, je vais peut-être devoir faire un effort.
Winteria

Pute : 0
    le 11/02/2008 à 13:25:29
À la lecture de l'intro, je m'attendais aussi à me bouffer une merde intello, puisque ça s'est avéré être un genre prospère ces derniers temps. Mais après, ça roule.

C'est l'évolution, ça. À force d'entendre résonner la rengaine du respect du bien-être féminin, on fout des préliminaires partout. Ça dandine du cul, c'est chiant. Mais vivent les sodomies brutales et spontanées, bordel !
B52

Pute : 0
    le 11/02/2008 à 13:40:49
Le début est lourd mais j'y suis arrivée. Le reste se lit bien , l'histoire me rappelle la vie d'un ami, à quelques détails près.
MantaalF4ct0re

Pute : 1
    le 11/02/2008 à 13:53:20
Oh putain, ça aurait pu s'appeler "Autobiographie d'une tête à claques prolixe et fière de son sort"..
Narak

Pute : 2
    le 11/02/2008 à 14:37:52
Ça démarre plutôt mal. Aucune phrase ne passe en dessous de la barre des deux bornes de longueur, les substantifs un peu trop alambiqués à mon goût s'enchainent par paquets de trois... A priori ça ressemble à du Oméga, l'arrogance en moins.
Passé la première partie, laborieuse, j'ai trouvé, ça s'affine un peu, je préfère une (fausse ?) autobiographie, même si je ne l'ai pas demandé, à des vagues de dissertations existentielles. Je me surprends à accrocher là dessus, même si quand même au bout d'une cinquantaine de lignes le style même s'il est bien maitrisé, (j'aurais pas dit racé, faut pas déconner non plus.) devient foutument pesant et handicapant pour ce texte. Il y a quelque chose d' "attendrissant" (Bordel, je vire un peu tapette, quand même) dans cette histoire.
nihil

Pute : 1
void
    le 11/02/2008 à 18:32:52
Rien à dire, c'est génial, mais plutôt que d'ajouter ma voix au choeur de louanges des autres putes, je vais signaler que, putain, tout le début est vraiment rebutant. C'est fangeux au possible, ça dégouline dans tous les sens. Aller à l'essentiel, c'est compliqué ?
Ou comment trouver mille moyens pour exprimer une phrase de quatre mots en quatre lignes, ou comment zigzaguer sciemment autour du pot, ou comment enchainer les métaphores opaques, ou comment obliger le lecteur à lire entre les lignes, comme ça, gratuitement, juste pour le faire chier. Bref je recommanderais pas cette lecture à un mec fatigué. Qu'on me taxe de fainéant mental, rien à braire, aller d'un point A à un point B en passant par deux-cent détours, j'appelle ça de l'enculage de mouches.

Après la TS ratée ça se fluidifie, au point de devenir hautement lisible et de sauver le texte à mes yeux.
Pour peu qu'on s'accroche et qu'on fasse l'effort, ça déchire.

Commentaire édité par nihil.
Myra
    le 11/02/2008 à 22:39:53
Pareil que les autres. Récit fluide, idées excellentes et périphrases jouissives, j'aime, je regrette juste un peu la partie avec Lucile, aussi réaliste qu'elle puisse paraître. J'aime beaucoup. Même que j'ai lu en étant fatiguée.
Monsieur Maurice
    le 12/02/2008 à 20:31:56
Où sont les toilettes, s'il vous plait?
Aesahaettr

Pute : 1
    le 13/02/2008 à 02:40:45
DTCS en circuit fermé.
Mentaltrash

Pute : 0
    le 13/02/2008 à 06:29:08
>Néanmoins, je ne saurais en moi-même accepter une telle présentation quand les limax cinereoniger de ma fierté instinctive me susurrent encore avec obstination que l’inconsistante moelle de mon existence ne peut se voir évaporée sans être d’une quelconque manière retracée. A l’attention de mes doubles, éternellement générés par la matrice de l’échec.


Ca c'est malheureusement un belle phrase de merde qui clos un paragraphe qui etait pourtant potable.
Mentaltrash

Pute : 0
    le 13/02/2008 à 06:37:09
>Avant de me saisir de la petite table en fer forgé pour la mettre en relation avec la baie vitrée, je lui ai demandé un court résumé du monologue

MDR!!! LOL!
Jéhosé
♪ C’est ecsta, les maudits blues ♫ (L.    le 13/02/2008 à 10:46:54
Avec toutes les images qui composent le texte, j’ai cru me trouver dans une salle de cinéma, dos à l’écran et à côté d’une sténo notant fiévreusement tous les plans. C’est bien fait…

J’adore le style qui ressort un peu comme si on remuait un fond de vase avec le bâton merdeux extirpé du fion de Monsieur Maurice…(Ou d’un autre Zonard, suis pas sectaire, si la place intéresse quelqu’une de ces salopes !)
Je signale juste un truc qui a parfois paralysé mon élan de lecture : La ponctuation pifométrique dans les grandes phrases. Ouais Monsieur ! Des fois on n’a pas envie de faire des efforts nous autres les lecteurs ! Et on t’emmerde en plus ! Foiré !
Jéhosé
Merde, va chier !    le 13/02/2008 à 10:49:15
Mon titre était:
♪ C’est ecsta, les maudits blues ♫ (L.Ferré)
Aesahaettr

Pute : 1
    le 13/02/2008 à 10:59:01
On s'en fout, connard.
Jéhosé
    le 13/02/2008 à 15:35:22
Les Aesahaettriens( livre II, 56 )

De même à la fin du repas, Jésus prit Aesahaettr, le sodomit et le jeta comme une vieille capote à ses disciples en disant :
« Prenez et gangbanguez le tous, ceci est mon porc livré pour vous. »

Ainsi fut fait, et bien fait pour connard toi-même Aesahaettr !
Aesahaettr

Pute : 1
    le 13/02/2008 à 16:58:09
Eh beh tu serais pas pris pour un serial edit, toi, tu es faible. Meurs.
Dourak Smerdiakov

site yt
Pute : 0
ma non troppo
    le 13/02/2008 à 21:19:02
'Sodomisa', bordel. 'Sodomita', c'eût été marrant et japonisant à coup de bâtons de dynamite dans le fion. Mais 'sodomit' c'est pathétique.

Pas trouvé tellement d'images, mais le ton est bon et on se laisse happer au bout d'un moment, alors que j'ai également eu de la difficulté à rentrer dedans. En fait, c'est vachement plus déprimant à lire que les textes de Mill qui nous ramènent du boulet vaguement suicidaire. Niveau style, quand même eu parfois l'impression en cours de lecture de me heurter à des épithètes surnuméraires. Notamment dans l'intro, effectivement. Quelques phrases peu claires sur lesquelles je n'avais pourtant pas envie de m'attarder, par flemme de lecteur. En parcourant à nouveau le tout en diagonale, je me rends compte qu'il y a un aller-retour entre temps passés et présent, mais j'avoue que ça ne m'a frappé à la lecture.
Mentaltrash

Pute : 0
    le 14/02/2008 à 11:33:22
J'ai finalement tout lu (enfin, juste la seconde partie)
moi j'ai bien aime le passage avec lucile... mais ca manque de details essentiels, euh, sexuels, de mensurations tout ca... enfin bon.

Ceci dit les formulations a rallonge sont parfois vraiment lourdes(meme si elles sont construites sur un certain contenu)

Mais a part ca, pour donner une impression generale, on a vraiment envie de pouvoir lire une suite (par exemple, une rencontre avec un medium qui permettrait de recontacter lucile qui nous expliquerait en quoi le personnage principal n'etait pas assez interessant pour lui donner envie de rester sur terre, ou alors elle avouerait qu'elle avait tout planifie jusqu'a sa mise en concubinage avant de faire le grand saut, ou alors lucile devenue un spectre sauverait la vie du heros sans qu'il le sache... Ou mieux, le heros trouverait un boulot dans lequel il deviendrait competent puis finalement reconnu et riche et gaspillerait son pognon pour construire un orphelinat sur mars, que sais-je...)


commentaire édité par Mentaltrash le 2008-2-14 11:39:42
Ange Verhell

Pute : 0
    le 15/02/2008 à 21:51:07
C'est très alambiqué. Plus sobre et organique aurait ménagé un peu d'extase au lecteur au lieu de le laisser trier les bonnes idées dans cette logorrhée profuse.
C'est du Prout.
Lemon A

Pute : 1
    le 17/02/2008 à 17:29:48
Pareil que tout le monde. Un gros brouillard au début et puis le texte s'éclairçit peu à peu pour devenir de plus en plus fluide et divertissant.

Bien, ça m'a parut plutot authentique. Quelques traits d'humour m'ont fait sourire, et j'ai trouvé quelques reflexions intelligentes.
    le 19/02/2008 à 14:30:46
-pas lu les autres commentaires, désolé si je répète-

J'ai un avis très mitigé sur le texte.

L'adéquation du style et du personnage me semble réussie, en cela c'est un bon texte : c'est pénible, c'est fatigué et fatiguant, c'est vain au sens où ça n'occupe aucun espace, ça ne tend nulle part, ça traîne juste. Ce qui, considérant le narrateur, est une bonne chose.

L'écriture contient des petits moments de grâce, quelques clausules ou quelques petites phrases isolées et qui portent tout le sens d'un passage, j'ai la flemme de chercher mais c'est toujours dans la mêmem ise en oeuvre, un gros paragraphe puis une petite phrase éclatante. Ca, c'est très bon. Faudrait juste, peut-être, qu'il y en ait plus ; chez Voltaire qui est un maître dans cette façon, les petits éclats, ils sont là à toutes les phrases. Et là, ça devient bon, pas juste une excuse pour un texte lourd par ailleurs. A mon sens là-dessus y aurait matière à reprendre le texte.

Pour ce qui est encore de l'écriture, me gêne beaucoup justement la quasi absence, pour ainsi dire, d'écriture. Que ce soit travaillé, peut-être ; que ça ait été lourd et pénible à écrire, je veux bien le croire ; mais là n'est pas l'écriture, pour moi, écrire c'est pas amasser des mots et des phrases et des pensées et des effets, c'est épurer. Et ce texte n'a rien d'épuré, c'est un tas. Même les phrases sont parfois des tas ; y en avait une, je vais essayer de la retrouver, ah, la voilà, enfin les voilà :
"Des victoires faciles, rares et insignifiantes face à la consternation qui nous tenaille d’être encore debout chaque matin pour supporter un imbécile violent et une égoïste impuissante à peine capable de distribuer de l’aspirine dès le petit-déjeuner. Pour affronter l’absence de solutions, la prémonition constante d’un futur inévitablement tragique puisque rien ne sait instiller la passion ou ne serait-ce que l’envie au cœur de nos entreprises machinales."
La première phrase part bien, dans un rythme ternaire qu'on retrouve souvent, c'est pas mal dit et on suit ; on verrait bien, lecteur, une petite coupe, allez, au moins une virgule avant le premier "pour", mais non, et on part dans une finale (alors qu'on était dans des considérations sur la vie qui traîne, faute de goût), qui continue par contamination sur la mère, qui continue sur une caractérisation, qui finit sur une notation temporelle, et là on se demande qui on est et quel âge on a et si on devrait pas plutôt boire ; mais c'est pas fini, et paf, deuxième tas, deuxième phrase, la totale, on colle tout ce qu'on avait encore à dire et qui tenait pas dans le premier carton, et je détaille pas l'emberlificotement d'adverbes, de concessions, de subordonnées en tout genre, le tout sans proposition principale parce que oh ça fait chier.

Ben là, moi, ça me donne envie de gerber comme une route de montagne.


Demeure qu'il y a beaucoup d'excellence et de justesse là-dedans, mais très mal servies par l'écriture.

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