Cylian ne savait plus où se mettre. Il commença à tourner en rond en se triturant les mains. Steven se leva et s'approcha de la baie vitrée qui s'ouvrait sur la ville. Des colonnes de fumée montaient d'un peu partout et la foule faisait face aux forces de l'ordre dans les rues alentours. Les mains dans les poches, Steven admirait le spectacle. Il ne se retourna même pas pour répondre.
- C'est hors de question, il faudra venir nous chercher !
Cylian écarquilla un peu plus les yeux et l'attrapa par les épaules.
- Mais t'es dingue de les exciter comme ça, ils vont nous massacrer !
- S'ils nous massacrent, c'est qu'on aura été vachement bon sur ce coup là.
Cylian le relâcha et se remit à tourner dans la pièce.
- Ho là là, on aurait jamais dû accepter ce budget !
Steven prit la peine de lui lancer un regard et s'approcha de lui.
- Au contraire, c'était une sacrée opportunité de se faire connaître ! Nous, une jeune agence de publicité, on nous confie un des plus grands défis de ces dernières années, et on y arrive...
- Ca, on peut dire que c'est une réussite, on va se faire égorger par notre cible marketing. Ca n'aurait pas dû fonctionner, c'était impossible…
- Au contraire, notre client avait tout pour plaire. Un "background" solide, implanté dans le temps, un terreau populaire exceptionnel, un vrai potentiel de développement. Il y avait tout le matériel affectif, il suffisait juste de dépoussiérer un peu leur image et d'adopter une communication agressive. Les bus, les télés, les radios, Internet. On a matraqué leur nouvelle identité partout et ça a marché. Avec une bonne bande son et de belles images tout est possible. C’est la victoire du marketing, tu ne comprends qu’on a gagné ? Tu ne peux pas nier que le résultat est là, c’est tout ce qui compte.
Il avait parlé tout seul, plus pour lui-même que pour Cylian. La fierté allumait ses yeux.
- Oui, le résultat est là, d'ailleurs il est en train de défoncer la porte, le résultat !
Steven se retourna et vit quinze centimètres d'acier tranchant passer à travers le bois tendre de la porte. Les émeutiers utilisaient la hache à incendie pour s'ouvrir un passage. Les coups pleuvaient sur la porte qui ne mit pas longtemps à céder. Une dizaine d'émeutiers pénétrèrent dans la salle de réunion en dégageant le canapé. Cylian s’accroupit derrière la table en levant les bras.
- Ne me faites pas de mal, je suis avec vous !
Un des émeutiers fendit la foule. Il se posta devant Steven qui ne bougeait toujours pas, et mit ses poings sur ses hanches en bombant le torse.
- Au nom de la Nouvelle Révolution et du Party, nous sommes venus vous chercher pour vous faire comparaître devant un Tribunal Populaire !
Sur son t-shirt, une faucille stylisée ressemblant étrangement au sigle retourné d'un fabricant de chaussure, croisait un marteau design vert fluo. Cylian leva un peu la tête et se ressaisit.
- Francis ? Mais tu travailles chez nous ! A la comptabilité en plus !
Le leader bolchevik acquiesça.
- Je travaillais, nuance ! Et à ce titre je sais exactement ce dont vous êtes coupables ! Valets du capitalisme !
Il se retourna vers la foule.
- Arrêtez-les !
Quatre hommes saisirent Steven et Cylian et les emmenèrent à travers les couloirs de l'immeuble. Cylian hurlait tant qu'il pouvait.
- Mais c'est nous qui avons refait toute l'image du Parti Communiste ! C’est grâce à nous cette révolution !
Rien à faire. Ses cris étaient étouffés par la foule qui reprenait en chœur l'Internationale sur l'air de la Macarena.
Steven souriait toujours.
Cylian et Steven poussèrent l'énorme canapé en cuir de la salle de la salle de réunion contre la porte. Dans l'escalier, on entendait les échos d'un groupe d'émeutiers qui montaient rapidement. Cylian s'éloigna de la porte à reculons. La peur faisait perler de grosses gouttes de sueur sur son front et ses yeux pleuraient presque. Steven était beaucoup plus calme.
- Ho mon dieu, mais qu'est ce qu'on a fait !
Steven sourit. La panique de Cylian l'amusait.
- Notre boulot mon vieux, on a rien fait de plus que notre boulot.
- Mais tu ne te rends pas compte ! Regarde où on en est!
- Tout ce que je vois c'est qu'on a très bien travaillé, on a atteint nos objectifs, c'est tout.
Les émeutiers étaient déjà derrière la porte. Le canapé s'ébranla quand plusieurs d'entre eux essayèrent de l'enfoncer à coup d'épaules. L'un d'entre eux cria à travers la porte.
- Rendez-vous, il ne vous sera fait aucun mal !
- Ho mon dieu, mais qu'est ce qu'on a fait !
Steven sourit. La panique de Cylian l'amusait.
- Notre boulot mon vieux, on a rien fait de plus que notre boulot.
- Mais tu ne te rends pas compte ! Regarde où on en est!
- Tout ce que je vois c'est qu'on a très bien travaillé, on a atteint nos objectifs, c'est tout.
Les émeutiers étaient déjà derrière la porte. Le canapé s'ébranla quand plusieurs d'entre eux essayèrent de l'enfoncer à coup d'épaules. L'un d'entre eux cria à travers la porte.
- Rendez-vous, il ne vous sera fait aucun mal !
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Et, surtout, ne me demndez ni par qui ni pourquoi ce texte a été lié à Babette, de Bobby-Joe. Ici, c'est la zone, et tout ne s'explique pas.
Ca c'est du bon texte des familles. J'ai bien rigolé, c'est bien fichu (on se doute de ce qu'ils ont fait, mais ça reste du non-dit jusqu'au bout, comme ça on a le plaisir de croire qu'on avait deviné depuis le début), bien écrit (sauf le machin truc là, la fierté je crois, qui "allume" ses yeux, j'ai vu Johnny Hallyday tout à coup, c'était très pénible, et pour ce qui est de l'image franchement y avait des façons plus naturelles de le dire, dommage), et au surplus c'est pas con.
Bienvenue, camarade désabusé potentiel.
Pour l'image, tout est entièrement de ma faute, veuillez me tabasser au préalable, merci. Sauf si tu parlais d'une métaphore.
Putain, l'Internationale sur l'air de la Macarena, je veux entendre ça un jour.
J'aime quand tu fais ton auto-critique, Dourak. C'est beau comme une flagellation monastique. Mais je parlais de la métaphore, je suis quand même un enfoiré de surlittéraire, faut tabler sur ça, toujours, quand on a un doute.
Un doute ? Plutôt crever.
moi j'aimerais quand même savoir ce qu'ils ont fait.
Et moi j'aimerais d'abord savoir de qui on parle.
Bof, j'adhère pas.
En réponse aux trois derniers.
Ange: Ils ont sorti un jeu sur Playstation qui s'appelle "Democracy" et qui cartonne.
Dourak: Moi aussi.
Astarté: Tant mieux, je déteste les pots de colle.
Au coeur de ma frénétique lecture pour rattraper mon retard de ces dernières semaines, ce truc-là a retenu mon attention, et c'est pas peu dire avec ce putain de gloubiboulga de vannes débiles, de mongoliens, de psychotiques et d'Edouard Balladurs en liberté.
C'est de la bonne came, bien lisible, pas chiante avec un certain suspense, vu qu'on aimerait bien comprendre les objectifs atteints par nos héros et qui leur valent l'ire des émeutiers. Bonne idée de voir la subversion se venger un peu du marketing pour décérébrés qui lui suce le sang depuis trop longtemps.
Mon esprit critique me souffle que ça se précipite un peu, que quelques détails et développements supplémentaires auraient pu être valable, mais de toutes façons j'ai pas le temps, j'ai encore dix bouses à me pignoler.
HC, t'occupe donc pas d'Astarté, c'est une anti-communiste primaire cette gonzesse.
Moi, la dernière lecture frénétique à laquelle j'aie assisté, c'était chez le notaire, après un enterrement.