Fort de ces résolutions, je me levai, allumai mon PC, et me mit à taper avec ferveur sur mon clavier logitec tout neuf. Rechercher : dépression, psychologie, test. Résultats : aufeminin.com, mademoiselle.net . Trop mièvre. Je suis un homme, bordel. sante-mag.fr, dochebdo.com . Trop intellectuel. Je suis étudiant, bordel. zone.apinc.org . C’est le site. Celui qui fera de moi un homme accompli.
Comme indiqué, j’ai donc rempli trois pages de questionnaire, essayant d’être le plus objectif possible même face aux énigmes les plus déroutantes (« tu suces ?», « t’avales ? »), j’ai écrit cinq sonnets sur les majorettes sans rechigner, j’ai consenti à tester mes réflexes sur une nouvelle version de Doom où on tire sur des pianistes après s’être auto-médicamenté à grand renfort de Xanax et de Stilnox.
Et - joie, bonheur, ravissement - mes efforts de furent pas vains. Le verdict tomba, clair, limpide, transparent :
« Notre interprétation : Il est évident que vous souffrez d’un trouble post- traumatique persistant se manifestant aux alentours de la vingtaine et lié à un choc psychologique intense ancien. Vous présentez tous les symptômes d’une enfance bafouée ; les réminiscence de vos humiliation vous assaillent : vous vous sentirez souillé et avili jusqu’à la déchéance de cet agresseur séculaire, jusqu’à sa mort par immolation.
« Notre herméneutique aléatoire : Ta chatte, ta chatte, ta chatte. Va mourir, enfoiré de bouffeur de gnou malgache. Connard de lémurien pornographe surnuméraire inférieur void DTCS. Taggle.
« Notre solution : La saint-con. »
Ainsi soit-il, j’allais donc brûler. Brûler celui qui, des années durant, avait fait de ma vie un calvaire. Celui qui avait ruiné mon enfance, qui m’avait humilié en mon for intérieur ; ce monstre qui m’a accablé, abaissé à l’état larvaire, l’être ignoble à cause duquel je me suis senti mortifié à chacune de mes erreurs. Celui qui m’a montré à quel point j’étais un être inférieur.
Petit Ours Brun allait mourir.
Petit Ours Brun, ce fils de pute. Après toutes ces années, j’avais réussi à me débarrasser de son image abjecte de peluche sclérosée à l’anus enfiché d’un manche à balais.
Longtemps, j’avais cru en lui. Petit Ours Brun n’était pas comme tous ces enfants sages fiers de leur moutonnerie : il balançait sa soupe à la gueule de sa conasse de mère, il rigolait en inondant la salle d’eau quand il prenait son bain, il pissait partout pour ne pas aller faire la sieste et vomissait sur le paillasson quand il rentrait bourré (où est-ce ma mémoire qui m’abuse ?). Mais chaque fois, c’était la même désillusion. Je pensais qu’enfin, il allait sortir un peu de la masse, affirmer sa différence et s’assumer complètement comme le préadolescent subversif que j’aspirais si fort à devenir… mais non, Papa Ours surgissait faisait les gros sourcils, et Petit Ours Brun allait passer la serpillière de la cuisine au pas de la porte sans émettre la moindre objection. Ce n’est pourtant pas que Papa Ours prenait la peine de développer une argumentation sans faille sur les faiblesses du comportement de son garnement.
L’évidence a donc fini par s’imposer à moi : il n’y a pas de place au troupeau pour les brebis galeuses. Il faut rentrer dans les rangs.
Petit Ours Brun et sa famille ont fait de moi un bordel de mouton. Je les hais.
Nous sommes le 8 mars. J’ai un mois pour localiser le repère des ours.
8 avril. C’est officiel. D’après l’alignement des planètes face à ton cul, la tanière de l’ours se situe dans la Creuse. J’achète donc mon billet pour Aubusson - billet de bus, cela va sans dire, aucune voie ferrée n’a encore osé s’aventurer jusque là - et je tente de m'équiper convenablement en vue de l’assaut.
10 avril, 7h30. Me voilà fin prêt. Je monte dans le bus, armé d’un jerricane d’alcool à brûler et d’un fer à repasser.
15h15. Je chasse d’un geste irrité le nuage de moucherons voraces qui m’assaille depuis que j’ai passé la lisière de la forêt creusoise. Ca fait deux heures que je marche harnaché de mon équipement para-nucléaire et du groupe électrogène 5cv qui me servira à alimenter mon arme secrète au moment opportun. Tout ça commence à me peser sérieusement sur les épaules, et pour en rajouter un peu à mon état d’épuisement, j’ai la vague impression de tourner en rond. Incapable d’ébranler la ténacité du cumulo-nimbus d’insectes bourdonnants, je me vote une pause à l’unanimité.
15h30. Bordel, je suis complètement perdu. J’ouvre le jerricane d’alcool à brûler et je m’en jette un ch’ti pour me redonner du courage.
20h00. L’alcool à brûler, c’est comme le speed, mais en mieux. J’ai presque fini de quadriller l’intégralité de la des bois environnants. Si mes calculs sont bons, il y a 98% de probabilité pour que la tanière des ours se trouve dans les 764 hectares de frondaisons restants.
22h30. Je suis devant le repère de l’ennemi. Une maison en 2D située dans le plan (xOz) du repère terrestre supposé galiléen. Je me place face à la porte, à une côte y=85cm (une longueur de bras armé) de la charnière gauche. Je branche le fer à repasser, j’avale la dernière goutte de mon fantastique breuvage en attendant qu’il chauffe.
22h35. Je tire la bobinette. L’ourson devait s’ennuyer ferme à regarder Patrick Sébastien à la télé avec son papa, parce qu’il ouvre quasi-immédiatement. J’entends la maman ours crier « qui est-ce ? » depuis la cuisine où elle procède à son ouvrage quotidien.
Mon personnage est parfaitement au point : je suis un représentant en tupperwares qui passent au micro-onde. Comme prévu, ce sale enfoiré n’en a rien a foutre et en avise sa mère. Au moment ou il va me claquer la porte au nez, j’ajoute fort adroitement : « j’ai aussi du crack ». Ca fait son effet. J’en étais sûr.
Petit Ours Brun sors, me souffle « 140 euros », et referme la porte derrière lui. C’est le moment que j’attendais. Peste comme la foudre, je dégaine mon fer à repasser et coince énergiquement son humble gueule de connard en deux dimensions entre la porte rose et la semelle de mon arme.
Mouhahahaha.
L’ours a brûlé en moins de cinq minutes. Dans un élan de bienveillance envers les générations futures, j’ai repassé toute la maison, parents-ours compris. Elle se disperse maintenant au gré des vents, les bribes de ses cendres diaphanes virevoltant entres les feuillages délicats des bosquets alentours. Une larme de ravissement coule le long de ma joue, et achève sa course sur la semelle encore chaude du fer à repasser, laissant échapper un filet vaporeux dans un murmure d’allégresse. Grâce à moi, le monde va enfin retrouver sa quiétude. L’année prochaine, Candy va prendre cher du fer à souder dans son cul salope.
= commentaires =
Supair BIEN.
"We don't nedd no teddy-bear
Burn motherfucker burn"
D'ailleurs j'en profite pour protester, pourquoi ca serait le bloodhund gang qui ferait l'hymne de la saint con? Y'a aussi NTM avec sa chanson "mais qu'est ce qu'on attend?", elle est vachemet plus violente, parle de feu, et y'a des moments rigolos.
Avec un refrain qui colle bien "mais qu'est ce qu'on attend pour foutre le feu?"
Des couplets qui conviennent
"Mais qu'est ce qu'on attend pour foutre le feu?
Aller à l'élysée bruler les vieux et vieilles
Il faut bien qu'un jour ils payent
Le psychopate qui sommeile en moi se réveille"
Enfin voila.
Sinon oui le texte est marrant, il se lit bien et fait sourire, même si y'a pas assez d'insultes.
J'avoue qu'en première lecture j'ai rien compris...je ne connaissais pas le con. Après documentation et relecture, j'ai beaucoup aimé
J'y peux rien si à la maison c'était Ulysse 31 et son Nono.
Foutredieu, c'est excellent *s'incline devant Aelez et son fer à repasser*
Le coup du petit ours brun c'est gode, en 2D c'est very goode.
Petit Ours Brun ne t'avais pas demandé de repasser. ouaf bof
ah ouiiii.
C'est mignon comme histoire,et zonard..Enculé de Petit Ours.
Salope de Candy. Fiotte de Winnie..un conditionnement qui pourrit la vie..
Je revendique de brûler le père Noël l'année prochaine. Prems!
WOUWOUWOUW
Vainqueur absolu dans tout ce que j'ai lu jusque-là.
Je me suis mis en retard pour aller boire une bière avec les copains, pour ce texte. C'est un putain de signe, et de compliment.
Aelez, révérence, et je veux bien te baiser les genoux, aussi.
Purée et en plus, le dernier paragraphe, je m'en remets pas comme il est bien écrit.
Yihaa.
Excellentissime, un potentiel vainqueur ouais.
"Petit Ours Brun, ce fils de pute" m'a fait glousser comme une dinde que je suis. Simplicité efficace.
Aelez président ! Aelez grand inquisiteur !
Ca faisait environ 25 ans que j'avais pas repensé à Petit Ours Brun. rien que pour ça, Aelez mérite mon poing dans la gueule.
ha.
commentaire édité par Aelez le 2006-4-13 23:27:3
Attends, t'as édité ton message "ha.", ça veut dire que sur trois caractères, t'avais fait une faute ?
Tu perds en crédibilité, tout à coup, je sais plus trop quoi faire pour mon vote.
Non mais j'ai posté un message à haut degré d'alcoolémie (si, si, à 23h26, ça arrive même aux meilleurs), puis dans un grand moment de solitude je me suis dit que je perdrais rien à fermer ma gueule. Donc dis merci, plutôt.
Je rappelle que le bouton "éditer le commentaire" est parfois la plus sure échappatoire au bûcher annuel de la Saint-Con. Belle démonstration.
Et Johnny ? Jhonnny aussi il chante la St-Con.
Il fait même des films. Mais ça reste moins drôle que ce texte.
Je suis conne, alors vous pouvez me bruler. En plus je suis pucelle mais j'adore me faire (sodomiter).
Par contre je suis pas sainte et je mettrais pas que ce texte m'a fait sourire parce que je rigolais tellement que mon anus s'est détendu-relaché et qu'un peu de prout est sorti de mon cul.
Oula..
"Une larme de ravissement coule le long de ma joue, et achève sa course sur la semelle encore chaude du fer à repasser, laissant échapper un filet vaporeux dans un murmure d’allégresse"
Une phrase qui m'a mis une bonne claque. Très bon texte.
merci shad, ça m'evitera de lire le texte en question
C'est scandaleux. Ca ne va pas se passer comme ça, alors non, ça non.
t'es gentil Gaston mais maintenant il faut partir.
Ce flot de commentaires de qu'on connaît pas semble attester l'hypothèse scandaleuse selon laquelle Aelez aurait des connaissances, voire des amis, en tout cas une vie sociale.
C'est un scandale.
Qu'on la crame.
yep, il est sympa comme tout ce texte, l'un des meileurs dans cette veine comique/cartoonesque =)
mais perso, je ne m'identifie pas au narrateur. pour ma part, j'aurais plutot cramé l'ours Gaby des petits malins.
Heu je proteste.
Je ne connais ces gens ni d'Eve ni d'Adam, ni de Robert non plus d'ailleurs.
C'est un scandale.
Qu'on les crame.
Beaucoup ri. Merci.