Récemment encore, je ne craignais rien.
J’étais l’ombre, j’étais le prédateur, j’étais la mâchoire…
Voilà, maintenant une semaine qu’elles ne se sont pas manifestées. J’ai peur. Je sais qu’elles sont là, tapies dans les interstices les plus improbables. Là où chaque source de lumière a son opposé. Derrière chaque ombre, sous chaque objet, quand j’éteins une ampoule...Partout.
Je les sens partout. Je sais qu’elles ont accès à tout. Elles peuvent se jeter sur moi depuis le ciel nocturne. Jaillir de sous une voiture garée, de sous une plaque d’égout. La moindre personne que je croise peut tout à coup se transformer en une masse informe de tentacules noirs, mourant par la même occasion. Même dans ma bouche close, même dans le reste de mon corps, quelque chose peut a tout moment décider de s’animer pour me déchirer de l’intérieur. N’importe quand. L’abysse est partout. Il est parfois repoussé mais ce n’est que temporaire. La nuit revient toujours. Je ne peut pas leurs échapper ! Quoi qu’il advienne l’abysse me tuera. Il attend pour le moment. Il attend.
J’essaye de dormir le plus longtemps possible en espérant qu’elles me tueront dans mon sommeil.
J’ai essayé de me protéger au début. Je suis sorti il y a trois jours, à midi. Il faisait chaud. Le soleil brûlait dans un ciel tellement bleu qu’il en devenait blanc. L’air était tiède. L’espace d’un instant, j’ai réussi à les oublier. La solution était devant moi, je…
Je me suis imaginé un instant dans ce ciel. M’envolant à toute vitesse vers ce soleil. Mon corps ce mettait à tournoyer lentement, puis de plus en plus vite. La vitesse augmentait encore, jusqu'à ce que le réchauffement dû au déplacement l’air commence à me brûler.
Mais l’accélération continuait.
Jusqu'à ce que, sur tout mon corps, le passage de l’ombre à la lumière, le passage de la lumière à l’ombre soit tellement rapide qu’un fondu s’opérait. Et il n’y avait plus de lumière, et il n’y avait plus d’ombre. Tout ne faisait plus qu’un seul élément indéfini. J’étais enfin en paix.
Je suis allé acheter des néons. Je m’étais dit qu’en en amassant suffisamment je pourrais peut-être rester dans une lumière perpétuelle. J’ai acheté des néons. Beaucoup de néons. Il m’a fallu aussi des générateurs. J’ai passé une journée entière à faire les allers-retours à pied.
Dans la pièce la plus petite de ma maison, j’ai installé la lumière. J’ai fait passer les câbles des générateurs supplémentaires sous la porte. J’avais réussi. J’ai allumé les néons et j’ai passé la nuit dans cette pièce. Je sentais la lumière sur mon corps. C’était merveilleux ! Mes yeux sont restés ouvert pendant que je m’endormais et que mon esprit sombrait.
Quand je me suis réveillé, il faisait noir.
J’ai hurlé.
Pendant des heures. Je ne m’arrêtais que pour reprendre mon souffle. Je me suis étouffé, seul dans mon abri de verre. J’ai frappé contre les tubes de toutes mes forces. Je me suis lacéré le corps contre les débris. Je n’ai pas trouvé la porte. J’ai essayé de me dire qu’elles n’étaient pas obligatoirement responsables de ça. Les plombs avaient peut-être sauté.
Mais c’est impossible. Elles n’auraient jamais laissé passer une occasion telle que celle-ci.
Elles ne disaient plus rien. J’ai attendu que les voix reviennent, comme avant. Comme avant que je… Rien. Silence.
Me suis-je crevé les tympans dans un accès de rage pour être sur de ne plus jamais les entendre ?
Maintenant, j’ai compris qu’il ne servait à rien de lutter. Je suis la proie. Elles jouent avec moi. Le silence, le silence…Terrifiant. Peut-on mourir de silence ? J’ai tellement hurlé, cette nuit où j’ai cru qu’elles étaient revenues, que ma voix a presque disparue. Silence, encore et toujours. J’ai de grandes croûtes foncées sur tout le corps. Les entailles de referment doucement, mais il reste des éclat de verre dans la plupart d’entre elles, parce que je n’ai pas pris la peine de les retirer. A quoi bon…
J’ai cru sentir quelque chose bouger !
Elles sont là.
Elles sont entrées…Non, je déraille. Je tressaille à chaque bruit.
Pourquoi ne me tuent elles pas ? Pourquoi ne me tuent elles pas ! Je les attends !
Pourquoi m’ont-elles abandonné !
J’étais l’instrument !
Je me jette contre les murs. Mes entailles se rouvrent. Le verre s’enfonce plus profond.
Que dois-je faire !
…
Un temps.
Je sors. Je n’ai plus peur. C’est pourtant simple. Là, les escaliers. Là, la porte. Dehors. Il fait déjà nuit. Je me mords les lèvres et j’attends. J’attend qu’elles viennent me chercher, parce qu’elles viendront. Elles viendront forcément. Ce n’est qu’une question de temps. Dans combien de nuits viendront elles, je me pose la question.
Vous comprenez ? J’ai plusieurs théories là-dessus. Mais aucune n’est vérifiable. Et d’ailleurs, aucune n’est compréhensible. Aucune logique. J’attends qu’on en finisse. Vous comprenez ce que j’essaye de vous dire, n’est ce pas ? Elles viendront. Elles n’ont pas pu m’abandonner ! C’est une évidence ! Il ne me reste qu’à continuer ce qu’elles m’avaient ordonné de faire, mais sans leur soutien.
Ont elles réellement existées ?
Est ce que je n'ai pas tout imaginé ?
Quelque chose ne va pas, j'ai forcément oublié quelque chose, la nuit où j'ai épargné cet homme. Je n'ai pas pu leurs expliquer, mais elles ne veulent pas d'explications. Mais que veulent elles ? La mort ? La folie ?
Oui...C'est ça !
Ma mort...Ma folie !
Votre mort...Notre folie.
LA ZONE -
Je suis le bras désarmé.
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pas con çà comme solution : crever les tympans à tous ces connards de schizos pour leur demontrer que c'est bien d'en dedans de leur tronche que viennent les voix.
Sinon pour être tranquille le mec aurait pu s'emmurer dans un lit de bronzage (je crois que ça s'appelle comme ça ces sarcophages stupides à UV pour putes friquées). Reste aussi pour les pauvres la solution du micro-ondes, bien sûr.
Commentaire édité par nihil.
bon texte psychopatho, bonne progression dans la folie du narrateur. c'est décidément, après liquid inside, un genre qui convient bien a narak. J'en ai deja eu la preuve par sa collabo sur mon texte "i know who you are" à paraitre bientot sur la zone.
Je vais me faire les autres obténébrations, du coup.
je viens de relire les deux premières partie, ca n'en donne que plus d'intérêt à cette conclusion.
Je ne vois pas ce qu'on peut appeler les "réponses aux questions", mais je vois le cheminement depuis le premier jusqu'à celui-ci.
Well done, Narak.
A noter que le demi-nain en question projetait de bêtement balancer ce texte aux orties parce qu'il le trouvait pas très bon, moins en tous cas que les premiers bouts. Il commence à se prendre la noix, ce con.
Commentaire édité par nihil.
La folie est une issue si facile et pourtant sans issues..
Pour rien te cacher je suis légèrement décu que ce ne soit que l'histoire d'un chtarbé de plus, je trouve que la folie est une explication bien confortable. Décu que les questions soulevées ne trouvent que des réponses psychopathologiques hallucinatoires, qui se font très courantes par ici. Je me demande toujours ce que ce con foutait à pieds sur une autoroute. Enfin si, j'ai ma réponse à moi qui est peut etre proche de la tienne, une sorte de métaphore..
En tout cas je dois admettre que dans sa globalité, la trilogie est super bien écrite et menée, et niveau démence surpasse pas mal de trucs, vu que justement ici la folie.. on ne la voit pas vraiment arriver et à la fin peuvent subsister des doutes sur le fait qu'elle soit véritablement l'origine de tout..
Bon je vais briser un mythe...
Mais putain, bien sûr que la folie est confortable ! J'avais aucun autre moyen de terminer ce texte, sauf peut être une idée qui m'est venue en cours d'écriture qui aurait été de le faire revenir sur cette fameuse autoroute apercue au début. Sa paranoïa le poussant hors de la ville, sa fuite aurait été interrompue par ses ténèbres interieures. L'idée séduisante aurait été de paumer les lecteurs avant le début de l'attaque de manière à ce qu'il soit impossible de distinguer les début de l'histoire de la fin. Le premier épisode aurait pu donc être lu comme le dernier...
Mais cette ficelle, je l'ai déjà utilisé sur "Cathédrale" (Que j'essaye de réécrire depuis bientôt quatre mois d'ailleurs) et franchement,
1) J'aime bien varier mes effets, celui ci ayant déjà été utilisé dans une histoire mélangeant aussi le fantastique et la folie avait déjà perdu pas mal de sa saveur.
2) Putain, j'avais une flemme monstrueuse, et je voulais finir cette rubrique pour passer à autre chose.
Voilà, le making-of de la trilogie Obténébration.
Ne Quittez pas ! Après la pub nous vous montrerons une interview de l'auteur, et un reportage sur son actuelle vie sexuelle depuis qu'il élève des palourdes carnivores...
Commentaire édité par Narak.
"un reportage sur son l'actuelle vie sexuelle"
SYNTAX ERROR
T'es vraiment un enculeur de mouche nRz...
ouais...
et va comprendre, ces sales putes de mouches reviennent !
vraiment des salopes ces mouches.
Tiens, un texte que j'ai pas lu !?