Alors elle ne crie pas. A quoi bon ? Elle reste bien sagement le trou béant à combler comme on l’attend d’elle. Et elle aimerait qu’il la crève à la fin, que ça finisse comme dans les films. Se faire tabasser à mort pour ne pas avoir à vivre avec.
Au-delà de la douleur, elle sent déjà le poids de la culpabilité. Elle l’avait remarqué pourtant. Alors pourquoi n’a-t-elle pas couru ? Pourquoi n’a-t-elle pas appelé ? Pourquoi ne s’est-elle pas défendue ? Pourquoi n’a-t-elle pas castré cette queue qu’on lui imposait dans sa bouche ? Pourquoi ? Parce que c’est comme ça. Parce que ce sont les statistiques. Parce qu’il vaut toujours mieux sauver sa peau que son cul. Après tout, à qui va-t-elle faire croire qu’elle est à une bite près ? Cette situation est somme toute bien banale.
Un amant de passage. La personne dont on ne sait rien avant, et encore moins après. Un peu comme le minet ramassé en boîte : celui dont on imagine les pensées le lendemain matin quand, un peu vaseuse, on essaye de se donner une contenance.
Est-elle la première ? Se souviendra-t-il de son visage ? Eprouvera-t-il de la honte, des remords ? Passeront-ils sans le savoir les mêmes nuits d’insomnies ? Se croiseront-ils dans les couloirs du même cabinet de psy ? Iront-ils vomir leurs tripes au même moment quand le souvenir sera si palpable qu’il en deviendra réel ? Commémoreront-ils la date anniversaire ? Auront-ils des crises d’angoisse similaires à l’évocation d’un lieu, à la senteur d’un parfum, à l’intonation d’une voix ?
Deviendra-t-il lui aussi un adepte du « un peu trop » ? Un peu trop longtemps sous la douche, un peu trop longtemps sans baiser, un peu trop longtemps sans aimer, un peu trop longtemps à vivre aussi sans doute...
A quoi bon se torturer, c’est fini : il est déjà parti. Ce on devenu il à cause d'un moment d’intimité. Cet homme qui, contrairement à tous les autres traversant sa vie, elle n’oubliera jamais.
Et on est là, en elle, à déchirer ses chairs. Une jupe peut-être un peu trop courte ? Un regard un tant soit peu aguicheur ? N’empêche qu’on est là, en elle. Comme si là était la place normale, attendue. Comme si le but ultime de son existence avait été d’accueillir en elle cette chose.
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Le paragraphe des questions est très, très bien.
Le reste est attendu sur le fond, mais je le trouve bien mené quand même.
M'a filé une petite crampe au bide moi, ce texte.
C'est marrant comme un texte aussi simple peut faire réfléchir.
Pas mal.
un chouette texte, et qui a l'avantage de traiter ce sujet un peu hors de l'habituel refrain culpabilité-honte-souillure que l'on voit partout ailleurs.
merci Aka. Ce texte me decomplexe completement par rapport aux pulsions qui taraudent mon esprit à longueur de journée. Je m'en vais violer la moitié de la ville la conscience tranquile.
Bah, le viol, c'est très surfait. Le stress, une position infortable, une femelle criaillante et outrée qui tente de labourer le visage du mâle ou alors, et c'est peut-être le cas de figure le moins favorable, tout simplement prostrée. Non, je pense que le viol est à déconseiller quand on fait primer la décharge du regrettable tonus sexuel sur le sport ou la revendication alter-moraliste. La meilleure solution demeure, selon les budgets, l'achat d'une jeune Philippine ou le vol d'une chèvre, les Africaines étant trop bruyantes.
Mais surtout, se rappeler certain passage clef de I, Corinthiens 7, 8-9 : "Je dis donc aux célibataires et aux veuves qu'il est bon de rester ainsi, comme moi. Mais s'ils ne peuvent vivre dans la continence, qu'ils se marient : car il vaut mieux se marier que brûler."
depuis que je suis marié c'est vrai que mes problèmes d'incontinence se sont évaporé
Le viol n'a que des avantages : il détend l'agresseur et distend la victime.
Le texte était à la base plus basé sur l'ironie et le sarcasme que sur une véritable relation d'intimité. La narratrice se rassure comme elle peut devant une situation insupportable, un peu comme la première scène de viol dans "Baise moi".
En même temps elle s'est tellement rassurée qu'elle vous a convaincu aussi.
Ouais honnêtement l'ironie ne transparaît pas et tant mieux, la situation psychologique est crédible comme ça, ça fonctionne.
Moi aussi, ça me gâche le plaisir, toute cette ironie un peu mesquine.
Humm, rien à voir, mais j'envisage d'adopter un furet, alors comme un malade que je suis je vais voir sur le net. Là je trouve tout plein de gens qui ont des furets (ou en vendent) et bien sûr trouvent ça génial... Sion, ils n'en auraient pas, j'imagine :o
Bon ok, mais en vrai ? Alors je cherche sur google "con de furet"... et... désolé... mais la seule page sui sort c'est la tienne ! ;)
Du coup je m'y suis perdu ; heureusement que j'ai promis de faire des crèpes ce soir, sinon je n'en sortirais pas. Ai été surpris par les commentaires sur le texte ci-dessus. Moi je ne l'avais pas vu comme ça. Il m'a filé un peu la gerbe et m'a aussi un peu énervé... Au fond, il est déprimant, je trouve. Pas mal, donc.
Trop bon au niveau de la reflexion. Je lis les commentaires qui sont "que" masculins et pas cons du tout.
et suis d'accord avec Aka : difficile d'ironiser devant une situation insupportable. Là où elle m'a convaincue, c'est que dans cette situation elle veut sauver sa peau et que après tout un viol...y'a pas mort d'homme.
Quoique des viols d'hommes...hummm, grumphhh
Trop bon au niveau de la reflexion. Je lis les commentaires qui sont "que" masculins et pas cons du tout.
et suis d'accord avec Aka : difficile d'ironiser devant une situation insupportable. Là où elle m'a convaincue, c'est que dans cette situation elle veut sauver sa peau et que après tout un viol...y'a pas mort d'homme.
Quoique des viols d'hommes...hummm, grumphhh
très bon texte selon moi : on ne reste pas indifférent, et cela est renforcé par un bon style.Bravo Aka.
Je n'ai asp cherché à repérer d'éventuelles dissonances de second plan, le texte est prenant, original, bien tourné, glauque à souhait, sarcastique au possible, en bref, j'ai apprécié.