Stankson faisait exprès de vivre dans les tunnels qu'empruntaient les trains de marchandise, car il y faisait noir et comme ça il ne pouvait plus reconnaître quand il faisait jour ou nuit.
Il n'aimait pas vraiment les passages incessants des trains qui lui rappelaient parfois l'heure. Pour palier à ce problème, il s'amusait à poser des gros cailloux en file indienne sur les rails, histoire de perturber le traffic, rigoler un coup, et trouver de quoi bouffer, quand même.
Quand il ne mangeait pas les corps que les flics ne retrouvaient pas dans les décombres, il volait la nourriture de ses quelques voisins vivants dans les salles désaffectées longeant le tunnel. La lumière était artificielle, c'était cool. C'était aussi bien pratique quand les gosses venaient fumer et que certains ne revenaient pas. Ils finissaient dans des sortes de cages faites à partir de tables.
Pour faire une cage en table, c'est très facile. Il vous faut une table, si possible pas en bois de cagette, avec quatre pieds solides, du grillage, du fil de fer, et surtout beaucoup d'amour.
Renversez la table, doucement, et coupez cinq rectangles de grillage qui se fixeront entre les pieds, et au dessus. Il vous faudra une pince coupante aussi, mais en général en trouve dans ce genre d'endroit. Attachez les bouts de grillage aux pieds avec le fil de fer, et surtout n'hésitez pas à en mettre plein. Finissez par le toit, et hop, vous voila possesseur d'une magnifique cage. Attention ! Il faudra penser à introduire votre victime avant de fixer la partie finale, sinon ça sert à rien, sauf si vous aimez collectionner les cages en table vides.
Dans la salle qu'occupait Stankson cet après-midi (mais chut), se trouvaient trois de ces cages, et ceux qui les avaient fabriqué avaient oublié d'être cons, car elles étaient toutes occupées.
Par des gosses, donc.
Ils étaient un peu dégoûtés d'avoir été fait prisonniers avant de finir leurs joints, car vous n'imaginez pas ce que ça coûte dans ce quartier. L'angoisse de se faire torturer les avait effleuré, mais ne voyant rien venir depuis trois jours, ils avaient fini par être juste affamés.
Stankson les fixait, ne sachant pas trop quoi faire, car les habiles constructeurs des cages avaient emporté leurs pinces coupantes et il ne pouvait pas les ouvrir pour jouer avec eux. En outre, il ne voulait pas attendre que les autres reviennent. Ce n'était pas un mec hyper sociable.
Ce constat décevant le rendait dingue, il savait qu'il aurait trouvé beaucoup d'amour, car ces cages avaient été faites par des pros dans les règles de l'art.
Stankson était en manque d'amour ces temps-ci, il ne savait pas trop pourquoi. Si il s'intéressait un peu à l'actualité, il aurait su que noël approchait, et tout le monde sait que c'est une période propice à l'affection envers autrui.
Malheureusement, Stankson n'avait aucune notion du temps, et d'autrui.
Comme il n'était pas spécialement violent, il ne lui était pas venu à l'idée de frapper les cages en hurlant des insanités, pisser dessus, ou encore glisser des rats entre les mailles du grillage. Il se contentait de les fixer.
Au bout d'une durée indéterminée pour Stankson et environ une heure dans la vraie vie, une idée brillante lui vint à l'esprit. Si il ne pouvait pas avoir ces gosses, alors personne ne les auraient.
Avec beaucoup d'efforts il parvint à déplacer les cages sur les rails, bien alignées. Les gosses avaient troqué leur angoisse affaiblie par la faim avec une réelle terreur. Ils tentèrent de faire bouger leurs prisons en se jetant contre le grillage, mais le chêne étant un bois particulièrement lourd, il leur était impossible de faire basculer quoique ce soit.
Puis il y eu un hic. Aucun train ne passa pendant longtemps. Les gosses ne s'agitaient plus, ce n'était plus drôle du tout. Stankson décida après un houleux conflit avec lui même de partir explorer le tunnel. L'aventure était un concept qui avait fini par lui causer de terribles maux d'estomac, et l'idée de croiser quelqu'un le mettait très mal à l'aise.
Il partit néanmoins, marchant timidement entre les rails, suivant du regard les lumières qui ponctuaient les parois du tunnel. Cette régularité le rassurait, il lui en fallait peu.
Il continua ainsi jusqu'à ce qu'il tombe sur un genre de station-garage, très éclairé mais apparemment désert. Se sentant investi d'une nouvelle force pour être allé si loin, il inspecta toute la station, en quête d'un train, ou d'au moins un truc roulant suffisamment balèze pour emboutir trois cages en structure de chêne massif, et ne laisser aucun survivant.
Il ne trouva personne, et contrairement à ce qu'il attendait de lui-même, cela l'inquiéta. L'endroit donnait l'impression d'avoir été abandonné dans l'urgence, et probablement la panique.
"Je vais devoir me taper tout le reste jusqu'à l'extérieur maintenant", se dit-il.
Ce qu'il fit. A part des lumières manquantes, rien ne vint perturber la suite du voyage de Stankson,
Une sortie de tunnel, un ciel gris clair, et des gens par terre mais vivants. Trois choses qui donnèrent envie à Stankson de repartir illico. Ce qu'il ne fit point, sinon ça aurait fait une très mauvaise fin.
Le paysage lui rappela son ancien logis, quand il vivait dans une cave d'immeuble, et qu'il lui arrivait plein de trucs trop nul à cause d'une connasse. Les gens qu'il aperçut près de la sortie du tunnel émettaient des bruits pas très joyeux, ils étaient tout recroquevillés et il manquait des bouts à la plupart. En s'approchant de l'un d'eux, il remarqua que les bouts en questions étaient absents. Pendant une seconde il cru qu'ils étaient comme ça à la base, puis se sentit bête, ce qui arrivait souvent quand il se retrouvait dehors.
Il se mit à paniquer, ce qui était sans doute la meilleure chose à faire, car il se rendit compte que tous les gens qu'il croisait étaient dans le même état de délabrement.
L'endroit n'était rien de plus qu'une grande plaine brumeuse parsemée d'éléments de décor angoissant usuels. Et ça sentait bizarre. Plus bizarre que mauvais. Un mélange d'odeur de machines, de colle à bois et de restes.
Et il y avait du bruit, Stankson s'en rendait bien compte maintenant, des bruits qui ne faisaient aucun effort pour s'accorder entre eux.
Mais il était dehors à présent, il ne pouvait plus s'empêcher de faire des choses stupides qu'il regretterait ensuite. Il se laissa guider vers le bruit. La lumière faiblissait, faisant accroître sa panique et son manque de lucidité.
Il courait maintenant, d'une foulée tranquille et régulière. Un bout de soleil était apparu sous la couche de nuages, juste avant de fondre dans l'horizon, assez longtemps pour remplir la plaine d'ombres que Stankson eu du mal à éviter. Il trébucha dans sa course, le bruit s'intensifia dans sa tête et la lumière disparu. Il était arrivé.
Arrivé devant un hangar un peu ridicule, tout en rondins de bois, décoré avec des lumières de tunnel. Le sol devant la grande porte était recouvert de sciure et de sang, ce qui donnait un genre de pâte qui ferait un très mauvais liant. Stankson entra dans le hangar.
L'air qui s'y trouvait lui donna envie de vomir, et tout en s’exécutant, le bruit qu'il avait fini par ne plus remarquer s’arrêta.
Les deux mains dans la sciure sale, il vit plusieurs mecs en tablier, munis d'outils de bûcheron, tous coiffés de chapeaux verts.
"On dirait des sapins", se dit Stankson.
Il espérait ne pas finir en sciure, et se demanda pourquoi il avait couru jusqu'ici. Surement une de ces forces étranges qui le poussait à faire n'importe quoi, et il regrettait maintenant son tunnel. Il y avait du bois partout, et il comprit que ceux chez qui il venait de débarquer n'avaient pas encore appris à reconnaître les gens des arbres.
Un des sapins sourit, s'avança vers lui, et en évitant la flaque de vomi, l'aida à se redresser. Les autres s'avancèrent aussi, et sans dire un mot, le coiffèrent d'un chapeau vert, lui donnèrent une hache, et montrèrent du doigt la pile de tables en chêne qui se dressait, colossale, au fond du hangar.
Résumé : Après deux ans d'absence, Marvin nous gratifie d'un passage éclair sur la Zone. Espérons qu'il décide un jour de s'y sédentariser. Vous vous souvenez probablement de son roman à épisodes "Les Bêtes de poisse", les malheurs de Sophie écrit par une comtesse de Ségur sous speed, les errances survivalistes d'Imperator Furiosa adolescente dans un monde post apocalyptique dans le genre Mad Max où dans le script on aurait remplacé le mot "essence" par "organes" et le mot "punk" par "charcuterie". C'était hyper trash, au delà du supportable, tant par la trame narrative, l'univers malsain décrit, que dans le style, puisque les propos semblaient rapportés réellement par un gamin analphabète accro au crack, un enchaînement de scènes d'action gore avec pour seul intention de dépasser les bornes du tolérable, de dialogues incompréhensibles, d'un bestiaire proche du worst of du registre des naissances des prématurés de Pripyat et Fukushima en jumelage Barnum, très peu de descriptions, la moitié de l'univers devait être deviné par le lecteur en tentant d'imaginer les traumas dans la tronche du narrateur, et bien sûr les réflexions, le recul, les introspections étaient inexistantes. Le tout était donc hyper cohérent et formait un véritable objet littéraire non identifié. D'autant plus qu'en sous-texte, une évidente critique d'une société contemporaine patriarcale, machiste, post Zemmourienne, émergeait. Ici l'auteur nous revient avec un spin-off qu'il qualifie lui même de "tout pourri" en annonçant la couleur : "les mecs, je vous livre ça au cas où vous voudriez ravir les connards du coin avec un conte de Noël quand le moment venu sera, kthxbai" Comme on ne fait pas dans la littérature événementielle, je vous le livre donc en pâture pour la Toussaint. On en apprend d'avantage sur le personnage de Stankson qui était un peu le grand frère body guard de la narratrice des "Bêtes de poisse". Cette dernière semble faire partie de son passé. On ne sait pas trop qui est le narrateur mais il s'est pris un super power up littéraire. L'intention de l'auteur semble cependant être la déconne pure, saccageant du coup le puissant message délivré dans le texte d'origine. Une suite s'impose donc. Exigeons là auprès de Marvin si ce dernier comme on le devine veut faire monter sa licence en puissance afin de clairement peindre un univers étendu storytellique qui tienne la route, qui se recentre sur le crypto-féminisme, avant de le soumettre au comité des fusions/acquisitions de Disney. En l'état, ce one shot, c'est de l'auto-vandalisme, et je sens déjà la fandom gronder, demander des comptes, exiger qu'on lynche l'auteur pour l'exemple.
= chemin =
= résumé =
[ Après deux ans d'absence, Marvin nous gratifie d'un passage éclair sur la Zone. Espérons qu'il décide un jour de s'y sédentariser. Vous vous souvenez probablement de son roman à épisodes "Les Bêtes de poisse", les malheurs de Sophie écrit par une comtesse de Ségur sous speed, les errances survivalistes d'Imperator Furiosa adolescente dans un monde post apocalyptique dans le genre Mad Max où dans le script on aurait remplacé le mot "essence" par "organes" et le mot "punk" par "charcuterie". C'était hyper trash, au delà du supportable, tant par la trame narrative, l'univers malsain décrit, que dans le style, puisque les propos semblaient rapportés réellement par un gamin analphabète accro au crack, un enchaînement de scènes d'action gore avec pour seul intention de dépasser les bornes du tolérable, de dialogues incompréhensibles, d'un bestiaire proche du worst of du registre des naissances des prématurés de Pripyat et Fukushima en jumelage Barnum, très peu de descriptions, la moitié de l'univers devait être deviné par le lecteur en tentant d'imaginer les traumas dans la tronche du narrateur, et bien sûr les réflexions, le recul, les introspections étaient inexistantes. Le tout était donc hyper cohérent et formait un véritable objet littéraire non identifié. D'autant plus qu'en sous-texte, une évidente critique d'une société contemporaine patriarcale, machiste, post Zemmourienne, émergeait. Ici l'auteur nous revient avec un spin-off qu'il qualifie lui même de "tout pourri" en annonçant la couleur : "les mecs, je vous livre ça au cas où vous voudriez ravir les connards du coin avec un conte de Noël quand le moment venu sera, kthxbai" Comme on ne fait pas dans la littérature événementielle, je vous le livre donc en pâture pour la Toussaint. On en apprend d'avantage sur le personnage de Stankson qui était un peu le grand frère body guard de la narratrice des "Bêtes de poisse". Cette dernière semble faire partie de son passé. On ne sait pas trop qui est le narrateur mais il s'est pris un super power up littéraire. L'intention de l'auteur semble cependant être la déconne pure, saccageant du coup le puissant message délivré dans le texte d'origine. Une suite s'impose donc. Exigeons là auprès de Marvin si ce dernier comme on le devine veut faire monter sa licence en puissance afin de clairement peindre un univers étendu storytellique qui tienne la route, qui se recentre sur le crypto-féminisme, avant de le soumettre au comité des fusions/acquisitions de Disney. En l'état, ce one shot, c'est de l'auto-vandalisme, et je sens déjà la fandom gronder, demander des comptes, exiger qu'on lynche l'auteur pour l'exemple. ]
= biblio =
26/10/2016
23/12/2014
28/04/2008
05/02/2007
28/05/2006
Un spin-off tout pourri des Bêtes de poisse que j'ai écrit y'a très longtemps, dans un train.
Retrouvez l'intégrale de l'univers original ici
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J'aime bien ce style, cet univers étrange et obscur, je vais m'en inspirer
Non.
J'aime bien les ponctuations, et surtout, j'aime le mot mâchicoulis, car lui seul sait m'emplir de joie quand je le lis. C'est bien dommage qu'il n'apparaisse pas dans ce texte.
Sinon je suis toujours très content de lire du Marvin, qui me renvoie régulièrement des des images solides de Fallout, auquel je n'ai pourtant jamais joué, et de tout un tas d'autres trucs et le résumé est évidemment trop long mais, oui, Mad Max, pourquoi pas.
Le fait est que ce mélange d'écriture qui, je trouve, oscille entre le naïf (pour des raisons qui me sont propres) et le gore le plus décomplexé est putain d'efficace (j'ai écris putain, donc ce commentaire est Zonard, donc foutez-moi la paix si je me la joue petit doigt levé avant et après). Enorme point positif : tout est absurdement violent et craspec mais, comme dans les bêtes de poisse, les personnages s'en foutent, et ça c'est très bien, bon texte, gentil le texte, bravo le texte.
Ah, oui, les gusses en forme de sapins avec des hâches, là : c'est du Pyramid-Head de Silent Hill ou je ne m'y connais pas ou alors l'auteur est un menteur.
Je kiffe Mad Max. Pouce en l'air pour le texte.
tous les mad max ne se valent pas. Le dernier on jurerait que c'était nihil le chef opérateur directeur de la photographie.
Wow.
Il doit se retourner dans son fjord.
Peuchère
tu ne l'as peut être pas vu mais il y a une rupture de la direction photo qui de post punk dans le 1,2,3 passe à post gothique dans le 4 mais c'est probablement parce que j'y connais rien que je dis ça. En plus tout le monde à bien vu que j'ai rajouté post deux fois juste pour me la péter alors que ça ne veut rien dire. Sinon certains personnages dans le 4 semblent tout droit pompés des tableaux de nihil même si globalement le film est tout pourri, il a au moins cette qualité.
George Miller le mec qui passe de Happy Feet 2 à Mad Max fury road, du froid au chaud, une sorte trempe inversée.
"même si globalement le film est tout pourri"
Non mais non mais non, non.
je pense que le 2 doit être le climax de la licence, le 4 comporte de très bonnes intentions scénarsitiques mais très mal concrétisées, frolant souvent le bennyhillesque ce qui in fine fait un bon liguant entre cette licence et celles de Happy Feet, les pingouins et Babe, le cochon dont George Miller s'est aussi chargé.
De toute façon tout le monde sait que la meilleure synthèse de tout cet univers post-apo à base de cuir, de gros vroum-vroum et de bastons mano à mano, c'est Ken Le Survivant (et les Apple Stores les jours de sorties officielles de leurs déclinaisons téléphoniques)
C'est un putain de texte quand même çuilà. Le mélange narrateur demi-mongo' et ambiance rouille et poussière donne vraiment un style particulier.